La tourmente financière fait partie de l’ADN du manufacturier automobile Aston Martin. En 110 ans, le constructeur favori de James Bond s’est protégé de ses créanciers à sept reprises. Depuis trois ans, Lawrence Stroll fait des pieds et des mains pour éviter que cela ne se reproduise de nouveau. La pente à remonter est abrupte.

Il est encore trop tôt pour dire si la stratégie du milliardaire montréalais portera ses fruits, selon les analystes financiers. Les derniers mois ont marqué un tournant chez Aston Martin : pour la première fois depuis son entrée en Bourse, survenue en 2018, le constructeur de voitures de luxe a affiché un profit trimestriel l’an dernier.

La moins bonne nouvelle : sa dette est toujours supérieure à 1 milliard.

« Ils sont en meilleure posture qu’il y a un an, mais l’entreprise n’est pas encore sortie de l’auberge, affirme Charles Tennant, analyste de l’industrie automobile britannique. La dette est toujours là et la nécessité d’investir dans le développement de produits ne disparaîtra pas avec une transition coûteuse vers les véhicules électriques. »

À en juger par la fortune qu’il y a bâtie, l’industrie du prêt-à-porter ne semble pas avoir de secrets pour lui. L’automobile est un secteur bien différent, mais sa connaissance de l’industrie du luxe devrait néanmoins aider Aston Martin, croit M. Tennant.

Dans ce créneau, une présence en Formule 1 ne fait pas de tort non plus, croit-il.

« On court le dimanche et on vend le lundi [race on Sunday, sell on Monday], souligne l’analyste. Sa nouvelle stratégie mise sur la construction de véhicules pour répondre aux commandes des clients plutôt que de pousser les stocks chez les concessionnaires. »

PHOTO PHIL NOBLE, ARCHIVES REUTERS

Voiture Aston Martin Valkyrie à sa sortie de l’usine en mars 2022

Épopée boursière désastreuse

Le fiasco entourant l’arrivée d’Aston Martin en Bourse, un processus qui s’est amorcé en 2018, a amplifié les défis financiers de la société.

Après avoir fixé un prix d’introduction de 19 livres par action, le constructeur britannique avait réservé une mauvaise surprise aux investisseurs en dévoilant une perte de 68 millions de livres (environ 120 millions CAN selon le taux de change à l’époque). Cela a effrayé les investisseurs. En l’absence d’argent frais, « l’entreprise s’est endettée jusqu’au cou », rappelle M. Tennant.

M. Stroll a néanmoins réussi à améliorer certains indicateurs. L’an dernier, le nombre de voitures livrées par Aston Martin a grimpé d’environ 4 % (6412 unités) et le prix de vente moyen d’un véhicule a bondi de 24 %, à environ 330 000 $.

« Il y a des progrès du côté des prix, mais la route du désendettement demeure sinueuse, a écrit l’analyste Philippe Houchois, de Jeffries, dans un rapport diffusé au printemps. Nous croyons que les actionnaires se sont emballés. »

Depuis le début de l’année, le titre d’Aston Martin a pris environ 95 % à la Bourse de Londres. Cependant, à un prix d’environ 3 livres sterling, il demeure loin de celui fixé en 2018 (19 livres sterling par action) dans le cadre du premier appel public à l’épargne.

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  • 1913
    Année de fondation d’Aston Martin
    SOURCE : aston martin