Le producteur d’or Gold Fields – l’un des plus importants au monde – vient de trouver une façon de mettre les pieds au Québec : en proposant 600 millions à Minière Osisko pour lui acheter la moitié du projet aurifère Windfall, jugé très prometteur.

Situé à 115 kilomètres à l’est de Lebel-sur-Quévillon, sur les terres traditionnelles de la Première Nation des Cris de Waswanipi, ce gisement de calibre mondial valorisé à 1,2 milliard franchit ainsi une étape importante. Il pourrait s’agir de la prochaine mine d’or construite en territoire québécois.

Dans un contexte où les fusions et les prises de contrôle sont fréquentes dans l’industrie minière, l’accord intervenu avec le géant minier sud-africain permet à Minière Osisko, dont le siège social se trouve à Toronto, de s’assurer de garder un contrôle sur le projet, selon son président, Mathieu Savard.

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Mathieu Savard, président de Minière Osisko

« Nous aurions pu aller chercher du financement sur les marchés, mais cela aurait modifié l’actionnariat, explique-t-il dans un entretien téléphonique. Nous voulions nous assurer qu’Osisko puisse franchir le fil d’arrivée [la phase d’exploitation] et aller au-delà. C’est tout un engagement que prend Gold Fields en venant investir au Québec. »

L’entente prend la forme d’une coentreprise. Elle sera détenue en parts égales par les deux sociétés. La multinationale versera une première tranche de 300 millions à son partenaire et les autres paiements s’effectueront au fur et à mesure que les permis – construction et exploitation – seront obtenus. Elle injectera aussi 75 millions pour financer de l’exploration minière régionale.

C’est tout un deal. Osisko va chercher de l’argent, et l’équipe actuelle, qui a bâti les relations avec les Premières Nations, reste en place.

André Gaumond, fondateur de Mines Virginia, l’un des plus grands succès d’exploration québécois des dernières décennies

Au-delà du risque financier qui s’amoindrit pour le projet Windfall, M. Gaumond, en entrevue téléphonique avec La Presse, se réjouit surtout de voir le Québec attirer l’un des plus grands acteurs de l’industrie aurifère.

Cela est de bon augure à plus long terme, selon l’homme d’affaires.

« On vient d’attirer une nouvelle multinationale qui vient dépenser au Québec, dit-il. Elle fera peut-être d’autres acquisitions dans le futur. On deviendra peut-être leur pôle américain. »

Longue réflexion

Au moment d’écrire ces lignes, il n’avait pas été possible de discuter avec des représentants de Gold Fields. Dans un communiqué, l’entreprise établie à Johannesburg souligne s’être penchée sur plusieurs endroits dans la région avant de conclure une entente avec Osisko.

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« Nous croyons que cette mine sera la première d’une série de plusieurs dans le cadre de ce partenariat, dans une région très prometteuse », affirme le chef intérimaire de la direction chez Gold Fields, Martin Preece.

Analyste minier chez EBL Consultants, Éric Lemieux est du même avis que M. Gaumond. S’il estime qu’Osisko a obtenu un prix juste pour la moitié du projet aurifère, le spécialiste croit néanmoins que Gold Fields fait une « bonne affaire » en nouant un partenariat de 600 millions. Pas plus tard qu’à l’hiver 2022, le projet de coentreprise d’Osisko avec le producteur australien Northern Star avait avorté, rappelle M. Lemieux.

Il y a « toujours des défis » avec des projets miniers, souligne l’analyste, avant d’ajouter que « les choses ont été très bien faites » jusqu’à présent en ce qui a trait au projet Windfall.

« Le Québec a bonne réputation, mais chaque projet, c’est au cas par cas, dit M. Lemieux. Quand Northern Star avait décidé de se retirer, est-ce que c’est parce qu’il y avait quelque chose ? L’arrivée de Gold Fields est néanmoins favorable. Cela démontre qu’une compagnie extérieure voit de la valeur dans une juridiction stable. »

À la Bourse de Toronto, la réaction des investisseurs a été mitigée en dépit de l’arrivée de Gold Fields aux côtés de Minière Osisko. Mardi, sur le parquet de Bay Street, le titre de l’entreprise a reculé de 19 cents, ou 5 %, pour se négocier à 3,58 $.

Une décennie

Selon l’étude de faisabilité d’Osisko, la durée de vie de la mine Windfall, si elle voit le jour, devrait être de 10 ans. Le projet pourrait entraîner la création de 670 emplois permanents pendant l’exploitation. On anticipe une production moyenne annuelle de 306 000 onces de métal jaune.

À la fin de mars, l’étude d’impact a été déposée auprès du Comité d’examen des répercussions sur l’environnement et le milieu social. Il s’agit d’un organisme indépendant formé de membres nommés par Québec et la Nation crie. Ceux-ci se penchent sur l’impact des projets en territoire régi par la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.

Les entreprises en bref

Année de fondation

Osisko : 1997

Gold Fields : 1897

Présence mondiale

Osisko : 1 pays (Canada)

Gold Fields : 5 pays (Australie, Afrique du Sud, Ghana, Pérou, Chili)

Mines en activité

Osisko : 0

Gold Fields : 9

Effectif

Osisko : 175 employés

Gold Fields : 22 000 employés

En savoir plus
  • 6
    Rang mondial occupé par Gold Fields au chapitre de la production d’or en 2022.
    Source : investing news network
    1994
    Année où la minéralisation d’or a été découverte dans la zone du projet Windfall.
    Source : MINIÈRE OSISKO