Le ministre des Finances n’a pas l’intention d’ébranler les colonnes du temple : Eric Girard ne « s’attaquera pas » au monopole de la SAQ. S’il ne veut pas faire la promotion de la consommation d’alcool, M. Girard rappelle toutefois que la société d’État est condamnée à être plus « efficiente », car ses dividendes financent notamment les hôpitaux et les écoles.

« Nous n’avons pas l’intention de nous attaquer ou de modifier le monopole de la SAQ qui amène 1,4 milliard de dividendes. Ça va jusqu’à 2,2 milliards si on compte les taxes », a déclaré le ministre Girard mercredi, lors de l’étude des crédits budgétaires de la société d’État.

M. Girard a fait cette déclaration alors que des militants de son parti ont signifié leur intention de présenter une proposition demandant la fin du monopole de la Société des alcools du Québec à l’occasion du congrès de la Coalition avenir Québec (CAQ) qui se tiendra dans quelques jours. « C’est très sain [pour] un parti politique qu’il y ait un débat dans les congrès », a-t-il dit, tout en fermant la porte à la privatisation de la SAQ.

Consommation responsable

Autant le ministre Girard que la présidente et chef de la direction de la SAQ, Catherine Dagenais, présente à Québec lors de l’étude des crédits budgétaires, ont insisté pour dire que la société d’État ne faisait pas la promotion de la consommation d’alcool et que l’on s’assurait de faire des « ventes responsables ».

« On est très sensible face à la vente d’un produit qui n’est pas un produit comme les autres », a souligné Mme Dagenais, qui quittera son poste en juin.

Est-ce que le rôle d’Éduc’Alcool suffit à lui seul à sensibiliser les consommateurs ? La SAQ peut-elle faire plus ? lui a-t-on demandé. « Éduc’Alcool, c’est un organisme indépendant qui a un rôle d’éducation, s’est-elle d’abord contentée de répondre. Le rôle de la SAQ, c’est de faire des ventes responsables. » Ne pas vendre d’alcool à des mineurs ou à des clients en état ébriété et offrir des produits sans alcool font partie des mesures prises par la société d’État, a énuméré la présidente.

Des caisses automatiques et de la vente de données ?

Par ailleurs, à l’instar de ce que font déjà certains supermarchés et détaillants, Mme Dagenais a laissé entendre que des caisses automatiques pourraient un jour faire leur entrée dans les succursales de la SAQ.

« On n’a jamais dit que [des caisses automatiques] ne pouvaient pas être installées, a précisé Catherine Dagenais en réponse à une question du député libéral Frédéric Beauchemin. Ce n’est pas une orientation à laquelle nous sommes fermés. »

Or, les clients qui espèrent bientôt pouvoir eux-mêmes scanner leurs bouteilles devront attendre. Quelques heures après que Mme Dagenais a évoqué l’idée, la porte-parole de la SAQ, Geneviève Cormier, a indiqué que la société d’État n’avait « pas de plan de déploiement prévu concernant l’installation de caisses automatisées en succursale ».

« Nous sommes à l’affût de l’évolution des technologies et des solutions qui pourraient nous aider dans le contexte actuel du marché de l’emploi, a-t-elle ajouté dans un courriel envoyé à La Presse. Cela étant dit, réaliser des ventes responsables demeure une priorité pour la SAQ. Dans l’éventualité où nous [envisagerions] cette solution, une réflexion devra nécessairement être faite en amont afin de nous permettre d’appliquer notre éthique de vente. »

En ce qui concerne le « data » généré grâce des informations amassées avec le programme Inspire, l’équipe des communications de la SAQ a tenu à assurer que la SAQ n’avait aucunement l’intention d’en vendre à des entreprises. Mme Dagenais avait plus tôt laissé entendre que cette pratique était possible, mais que c’était « très marginal ».

Demande d’aide pour les distillateurs

Les microdistillateurs qui souhaitaient que le gouvernement mette fin à la majoration des frais d’exploitation perçue par la SAQ sur les bouteilles vendues sur les lieux de production risquent d’être déçus. Eric Girard n’a pas l’intention de l’abolir, affirmant que « l’équilibre dans le commerce de l’alcool est précaire ».

En plus du poids des taxes, dénoncent les microdistillateurs, ceux-ci doivent faire face à une vive concurrence. Les distilleries se sont multipliées au cours des dernières années.

La SAQ en bref

  • PDG : Catherine Dagenais (jusqu’en juin)
  • Résultats nets (rapport annuel de 2022) : 1,350 milliards de dollars
  • Nombre de succursales : 410 et 426 agences
  • Nombre total d’employés : 7474, dont 5738 en succursale
  • Nombre de produits commercialisés : 43 900
  • Membres Inspire : 1,9 million d’adhérents