Hydro-Québec et son partenaire américain ont obtenu gain de cause devant la Cour suprême du Maine, qui reconnaît que le référendum qui a dit non au projet d’interconnexion vers le Massachusetts était inconstitutionnel. Mais la route vers ce lucratif contrat est toujours bloquée par d’autres embûches judiciaires.

Le tribunal a en effet renvoyé la cause devant une instance inférieure, qui devra déterminer si les permis et les autorisations obtenus par Avangrid, le partenaire américain d’Hydro-Québec, l’ont été conformément aux lois et règlements et si l’entreprise a agi de bonne foi dans le processus. Des délais supplémentaires qui pourraient mettre le contrat d’Hydro-Québec en péril sont à prévoir.

Les travaux de construction de la ligne de 233 kilomètres devant relier le Québec à l’État du Massachusetts, en passant par le Maine, étaient déjà bien avancés quand des opposants de l’État du Maine ont obtenu le feu vert pour permettre à la population de se prononcer sur le projet par référendum.

À 59 %, les opposants ont rejeté le projet d’interconnexion et décidé que cette interdiction devait s’appliquer rétroactivement au début des travaux lors de la consultation populaire tenue le 2 novembre 2021.

C’est cette rétroactivité que la Cour suprême vient de juger illégale. Toutefois, le renvoi de la cause devant la Cour supérieure de l’État causera des délais supplémentaires qui risquent d’être fatals pour le contrat d’Hydro-Québec.

Il est trop tôt pour s’avancer sur cette question, fait toutefois savoir la porte-parole d’Hydro-Québec, Lynn Saint-Laurent.

Ce qu’on peut dire, c’est que la décision de la Cour suprême du Maine est favorable pour la suite des choses, mais on est encore au milieu d’une démarche judiciaire. Il faut prendre le temps d’analyser la décision.

Lynn Saint-Laurent, porte-parole d’Hydro-Québec

En plus du renvoi devant un tribunal de première instance, Hydro-Québec et son partenaire attendent une autre décision de la Cour suprême du Maine concernant un bail controversé sur une portion de 1,4 kilomètre du tracé sur des terres publiques.

« Hydro-Québec et son partenaire américain NECEC Transmission LLC étudient actuellement les décisions du tribunal afin de déterminer la suite à donner, ainsi que les impacts potentiels sur le calendrier de construction de la ligne de transport », ont fait savoir officiellement les deux entreprises.

Le Massachusetts s’attend à recevoir ses premières livraisons d’électricité québécoise en 2024. Il y a de ce côté « une certaine marge de manœuvre », a fait savoir Hydro-Québec.

Les opposants au projet, de leur côté, espèrent que les délais supplémentaires décourageront le Massachusetts, qui se tournera vers d’autres options que celle offerte par Hydro-Québec. L’un d’eux, Tom Saviello, a indiqué aux médias locaux que la lutte contre le projet d’interconnexion est un « marathon » dont les dernières étapes sont les plus difficiles.

Hydro-Québec et Avangrid se sont heurtés à l’opposition de plusieurs environnementalistes, mais aussi à un front commun des producteurs d’électricité de la région, dont Calpine, qui craignent de perdre du terrain au profit des énergies renouvelables.

Travaux stoppés

Avangrid, société mère de Central Maine Power, principal fournisseur d’électricité de l’État, affirme avoir déjà dépensé 450 millions US dans les travaux de construction de la ligne de transport, dont le coût total est estimé à 1,2 milliard US. Des travaux de déboisement ont été réalisés et des pylônes ont été érigés sur des portions du tracé, avant d’être stoppés en raison du référendum.

Au Québec, les travaux estimés à 600 millions sur la portion québécoise de la ligne de transport jusqu’à la frontière du Maine, longue de 103 kilomètres, ont été mis sur pause en raison du blocage du côté américain.

La mise en service de la ligne de transport a été reportée plusieurs fois. Hydro-Québec s’est engagée à livrer 9,45 térawattheures d’électricité au Massachusetts pendant 20 ans, un contrat qui doit lui rapporter plusieurs milliards de dollars de revenus supplémentaires. Le prix de vente moyen de l’électricité est de 8,8 cents le kilowattheure, soit le double du tarif industriel au Québec.

Le projet de ligne de transport qui passe par le Maine est la solution de rechange élaborée par Hydro-Québec et son partenaire américain après que leur premier tracé à travers le New Hampshire, connu sous le nom de Northern Pass, a été rejeté.