(Paris) Devant les parlementaires français qui lui ont réservé plusieurs ovations debout, le président ukrainien  a demandé mercredi de l’aide pour mettre fin à la « guerre contre la liberté, l’égalité et la fraternité » dans son pays, et exhorté les entreprises françaises à quitter la Russie.

« Les entreprises françaises doivent quitter le marché russe. Renault, Auchan, Leroy Merlin et autres, ils doivent cesser d’être les commanditaires de la machine de guerre de la Russie », a-t-il déclaré Volodymyr Zelensky qui s’adressait par visioconférence aux députés et sénateurs réunis exceptionnellement pour l’occasion.

Elles « doivent arrêter de financer le meurtre d’enfants et de femmes, le viol », a-t-il martelé. « Tout le monde doit se rappeler que les valeurs valent plus que les bénéfices ».

Il n’a pas cité le groupe pétrolier TotalEnergies qui a annoncé mardi renoncer à tout achat de pétrole ou produits pétroliers russes au plus tard à la fin de l’année, mais pas de gaz.

« Nous attendons de la France, de votre leadership […], la restauration de l’intégrité territoriale de l’Ukraine », a aussi affirmé le président ukrainien, en se disant à plusieurs reprises « reconnaissant » envers les efforts de la France pour mettre fin au conflit et en particulier au président Emmanuel Macron qui a fait preuve d’un « véritable leadership ».

Il a aussi rappelé sa volonté d’adhérer à l’Union européenne et souligné que « pendant la présidence française de l’Union européenne une décision mûrie sera prise », « une décision historique à un moment historique, comme cela a toujours été le cas dans l’histoire du peuple français ».

« Vous savez qui est coupable », a-t-il lancé aux parlementaires dans une allocution d’une quinzaine de minutes, ponctuées par une minute de silence à sa demande « en mémoire » des victimes depuis un mois de l’invasion russe.

Plusieurs images des villes d’Ukraine « rappellent les ruines de Verdun » lors de la Première Guerre mondiale, a-t-il relevé, dans une autre référence à l’histoire française.  

À « ceux qui ont des doutes, je peux vous dire que votre peuple est sûr » du combat à mener, a-t-il affirmé, face à plusieurs candidats à la présidentielle ayant eu des positions pro-Russie comme Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Nicolas Dupont-Aignan, présents au Palais Bourbon en tant que députés.

Si ce dernier a estimé qu’il n’avait « malheureusement pas vu de main tendue vers la paix » de Mr Zelensky, les deux autres n’ont fait aucune déclaration à la presse.

Avant l’intervention de M. Zelensky, le président du Sénat Gérard Larcher (LR) avait souligné, dans un hémicycle où avait été installé le drapeau ukrainien, que le moment était « solennel » car « pour la première fois de notre histoire parlementaire, nous accueillons le président d’un pays en guerre », alors que « l’inadmissible est en train de se produire ».

Son homologue à l’Assemblée Richard Ferrand (LREM) avait rappelé que la France appelle « la Russie à se conformer au droit international humanitaire » et que « nous continuerons de veiller à ce que tout soit mis en œuvre pour vous porter assistance ». « Nous demeurons à vos côtés », avait-il assuré sous les applaudissements.    

Les parlementaires ont ensuite salué à l’unisson un « discours fort et poignant » ainsi que sa référence à la devise républicaine, disant leur « admiration pour ce président résistant ».

« Sans aucune note, il a parlé de ce qui se passait concrètement, de la souffrance des êtres humains », a retenu le sénateur PS Jean-Pierre Sueur.

« Au-delà de ce président qui est un président héroïque, qui est aussi un président qui sait utiliser les codes de communication, on a une vraie fraternité d’armes parce qu’on partage les mêmes valeurs », a déclaré Bruno Retailleau, patron des députés LR.

Le député LR Eric Ciotti, conseiller de la candidate Valérie Pécresse, a cependant exprimé ses réserves sur un départ des sociétés françaises de Russie : « Il faut que chaque entreprise mesure quelle est la conséquence de ce retrait et nous devons aussi penser à l’intérêt de l’Europe et à l’intérêt des Français ».

L’allocution était également retransmise devant le Conseil de Paris, présidé par la candidate PS à l’Élysée Anne Hidalgo.