Le variant Omicron a laissé des séquelles chez Transat A.T., qui doit renflouer ses coffres pour être capable de se relever de la pandémie même après avoir reçu un nouveau coup de pouce financier de plusieurs dizaines de millions d’Ottawa.

Malgré le rebond des réservations observé depuis l’annonce, le 15 février dernier, d’assouplissements des restrictions sanitaires, la marge de manœuvre de la société mère d’Air Transat demeure mince. La flambée des prix du carburant observée depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et l’incertitude provoquée par ce conflit pourraient teinter la reprise.

« Nous avons repris les discussions avec le gouvernement fédéral […] qui s’est montré très réceptif », a expliqué jeudi la présidente et cheffe de la direction de Transat A.T., Annick Guérard, en conférence téléphonique pour discuter des résultats du premier trimestre – pendant lequel le voyagiste est demeuré dans le rouge.

Entre décembre et février, les réservations nettes ont décliné pendant sept semaines consécutives à cause du variant Omicron et la recommandation d’éviter les voyages non essentiels. L’entreprise a annulé près de 30 % de ses vols pendant le premier mois de l’année, mais n’a pas pris d’autres « mesures draconiennes », comme sabrer son effectif.

Résultat : Transat A.T. a mensuellement puisé 27 millions dans ses réserves en novembre, décembre et janvier, presque deux fois plus que pendant le quatrième trimestre. Cette cadence est appelée à se poursuivre au cours des prochains mois, a prévenu Mme Guérard.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Annick Guérard est présidente et cheffe de la direction de Transat A.T.

Le voyagiste n’a pas chiffré la somme qu’il tentait d’obtenir auprès du gouvernement Trudeau, mais le chef de la direction financière, Patrick Bui, a tenté de calmer le jeu en disant jouer de « prudence ».

« Nous avons accès à des liquidités [directes et avec restrictions] de plus de 500 millions », a-t-il répondu à un analyste qui lui demandait pourquoi Transat A.T. avait besoin d’un coup de main d’Ottawa alors que le ciel semble s’éclaircir. « La dernière vague a un impact significatif sur notre bilan. Omicron est encore présent. Il y a une certaine volatilité géopolitique. »

Un autre prêt

Transat A.T. a emprunté 43,3 millions de plus au gouvernement fédéral pour rembourser ses clients dont les vols avaient été annulés par la pandémie. La somme s’ajoute au plan d’aide annoncé au printemps dernier.

Parallèlement, la société a été capable de reporter de 20 mois l’augmentation prévue des intérêts sur le prêt d’urgence contracté auprès d’Ottawa. L’argent mis à la disposition de l’entreprise atteint 743,3 millions.

Au 31 janvier, la dette totale nette de Transat A.T. était de 1,3 milliard. Ses liquidités totalisaient 343 millions.

D’après Robert Kokonis, président de la société de conseil Air Trav, établie à Toronto, le voyagiste pourrait tenter d’obtenir un prêt oscillant entre 100 et 130 millions.

« Transat a écopé sur ses deux principaux marchés depuis le début de la pandémie : les destinations soleil et l’Europe, affirme l’expert. Ses liaisons intérieures sont limitées. L’endettement des compagnies aériennes a augmenté de manière significative depuis la crise. Cela sera assurément un défi pour Transat. »

Est-ce que le voyagiste est encore capable de résister à un soubresaut, comme l’apparition d’un nouveau variant ? Il s’agit d’une « bonne question », selon M. Kokonis.

D’un côté, prévient l’expert, Transat A.T. devra rivaliser avec un nouvel acteur aux reins solides dans le créneau du voyage d’agrément si WestJet avale Sunwing. Vers l’Europe, l’entreprise devra continuer de concurrencer Air Canada, très active sur ce marché.

D’autres nuages dans le ciel

Le prix du carburant constitue la principale dépense des compagnies aériennes. Pour absorber une partie de l’explosion des prix, le voyagiste a déjà commencé à « adapter » sa structure tarifaire, affirme Mme Guérard. Selon l’Association du transport aérien international (IATA), en date du 4 mars dernier, le prix du carburant pour avion en Amérique du Nord avait presque doublé comparativement à l’année précédente.

« Nous observons certains changements dans le marché en ce qui a trait aux surcharges de carburant, a dit Mme Guérard. C’est donc rassurant. »

Dénonçant l’attaque de la Russie envers l’Ukraine, la dirigeante de Transat A.T. a indiqué que le conflit n’avait pas eu d’incidence sur les réservations à destination de l’Europe. Toutefois, depuis le début de la pandémie, les voyageurs réservent beaucoup plus près de leur date de départ.

Si le conflit s’envenime davantage, certains vacanciers pourraient décider de repousser leurs plans, ce qui risque d’avoir des conséquences négatives pour le voyagiste sur son principal marché pendant la saison estivale.

À la Bourse de Toronto, jeudi, l’action de Transat A.T. a clôturé à 4,65 $, en hausse de 2 cents, ou 0,4 %.

En savoir plus
  • 500
    Depuis novembre dernier, Transat A.T. dit avoir rappelé 500 employés qui avaient perdu leur gagne-pain à cause de la pandémie.
    SOURCE : Transat a.t.
    91
    Le voyagiste s’attend à fonctionner à 90 % de sa capacité d’avant la pandémie pendant la saison estivale.
    SOURCE : Transat a.t.