(Montréal) En dépit de progrès visant à redresser sa division déficitaire des ressources, SNC-Lavalin a décidé d’accélérer son recentrage vers les services d’ingénierie et la gestion de projets en laissant aller ses activités pétrolières et gazières.

La multinationale québécoise s’est entendue avec Kentech Corporate Holdings, établie à Dubaï, pour un prix qui n’a pas été dévoilé, mais qui devrait se traduire par un « gain » après la clôture de la transaction, prévue au deuxième trimestre. Entre-temps, SNC-Lavalin comptabilisera une charge oscillant entre 250 millions et 295 millions.

Parallèlement, la firme comptabilisera des provisions de 480 millions au quatrième trimestre à la suite d’un examen approfondi des contrats à prix fixe du carnet de commandes, d’une révision à la baisse de ses réclamations commerciales et d’une réévaluation à la hausse de ses dépenses.

Les investisseurs ont néanmoins réagi favorablement, puisque sur le parquet de la Bourse de Toronto, le titre de SNC-Lavalin a pris 11 %, ou 2,52 $, pour clôturer à 215,31 $.

« Nous sommes en mesure de réduire rapidement nos risques en délaissant les contrats à prix fixe dans le secteur pétrolier et gazier et de diminuer considérablement les obligations de livraison et de garantie sur tous les contrats en cours », a souligné le président et chef de la direction de SNC-Lavalin, Ian Edwards, au cours d’une conférence téléphonique avec les analystes.

En prenant les commandes de l’entreprise de manière intérimaire en juin 2019, celui-ci avait rapidement décidé que le temps était venu de délaisser les contrats de construction à prix forfaitaires, pour lesquels les promoteurs absorbent généralement les dépassements de coûts, au profit des services d’ingénierie.

Pour Benoit Poirier, de Desjardins Marchés des capitaux, SNC-Lavalin a saisi une occasion de réduire considérablement le niveau de risque de ses activités.

« Même si (elles) comprenaient un certain nombre de charges, nous estimons que les annonces vont réduire l’exposition de l’entreprise aux contrats à prix fixe dans le secteur des ressources, la plus importante source de risque pour SNC-Lavalin », a écrit l’analyste dans une note.

Important transfert

Kentech héritera ainsi d’un carnet de commandes d’environ 745 millions et de 7100 employés. Les activités vendues représentent 90 % des revenus de 988 millions générés par le segment des ressources au cours des neuf mois terminés le 30 septembre. Le Moyen-Orient représente environ 55 % du chiffre d’affaires des activités pétrolières et gazières.

À la fin du troisième trimestre, le carnet de commandes de l’ensemble des activités de SNC-Lavalin s’élevait à 10,7 milliards.

La taille de la firme québécoise dans le secteur pétrolier et gazier avait gonflé de manière significative lorsqu’elle avait mis la main en 2014 sur l’entreprise britannique Kentz, qui était présente dans environ 40 pays, pour 2,1 milliards.

SNC-Lavalin avait signalé, en août dernier, qu’elle étudiait ses options à l’égard de son secteur des ressources lorsqu’elle avait annoncé une restructuration visant à réduire les activités de ce segment, notamment en quittant 21 des 30 pays où elle était présente. M. Edwards a expliqué que la firme avait l’intention de demeurer présente dans ce secteur, mais que des acquéreurs ont cogné à sa porte.

« Nous avons évalué les options de conserver les activités ou de s’en départir, a-t-il dit. Nous pensons que […] nos efforts seront mieux déployés à faire de SNC-Lavalin une entreprise prospère dans l’ingénierie. »

La présence de l’entreprise dans le segment des ressources se limitera désormais au secteur minier, où une charge de 95 millions en lien avec un dernier projet de construction à réaliser sera inscrite dans les résultats du quatrième trimestre — qui doivent être dévoilés au cours des prochaines semaines.

Entre-temps, les perturbations provoquées par la pandémie de COVID-19 continuent de faire dérailler les plans de SNC-Lavalin, qui pilote trois projets d’infrastructure de train léger au Canada, dont le Réseau express métropolitain (REM). Des pertes de productivité se traduiront par un impact négatif de 90 millions au dernier trimestre de l’exercice.

Les restrictions au Québec et en Ontario limitent le nombre de travailleurs qui peuvent se trouver simultanément sur les chantiers, a expliqué M. Edwards.

« Cette (situation) se prolongera certainement jusqu’au printemps, a-t-il souligné. Mais vraiment au-delà de l’été, nous supposons que les choses devraient revenir largement à la normale. »

Parallèlement aux nombreuses annonces effectuées, SNC-Lavalin a réitéré qu’au quatrième trimestre les revenus générés par ses activités d’ingénierie devraient, comme il avait déjà été évoqué, fléchir d’entre 1 % et 5 % par rapport à il y a un an.