Son montage financier tarde toutefois à être finalisé

Télésat veut prendre le chemin de la Bourse alors qu’elle s’affaire à boucler le montage financier de son réseau de satellites de télécommunication – qui doit générer des retombées au Québec –, mais ce processus tarde à se finaliser selon certains analystes.

Cette entreprise d’Ottawa vient de déposer un prospectus pour s’inscrire à la Bourse de Toronto et souhaite faire de même au NASDAQ. L’opération pourrait s’effectuer dès le 19 novembre.

Évalué à 6,5 milliards, le projet Lightspeed prévoit, dans un premier temps, le déploiement de 298 satellites en orbite basse (LEO), à plus de 1000 kilomètres au-dessus de la Terre, afin notamment d’offrir l’accès à l’internet haute vitesse dans des régions éloignées.

Télésat est financièrement appuyée par le gouvernement Legault (400 millions) – l’annonce remonte à février dernier – et Ottawa (1,5 milliard), mais la société n’a toujours pas trouvé les fonds nécessaires pour financer ses ambitions.

« Oui, je suis surpris qu’il faille autant de temps pour obtenir du financement, a souligné Caleb Henry, analyste principal de la firme américaine Quilty Analytics, qui se spécialise dans l’aérospatiale, en entrevue avec La Presse. En accumulant un retard, il est probable qu’elle [verra lui échapper] des occasions au profit de rivaux. »

Se battre contre Amazon

L’entreprise canadienne a du pain sur la planche, puisque des milliardaires comme Elon Musk et Jeff Bezos s’activent dans ce créneau. Amazon vient de demander l’autorisation de déployer jusqu’à 7775 satellites, soit le double de ce qui avait été dans un premier temps proposé par le géant américain.

De plus, Starlink, le projet du célèbre entrepreneur Elon Musk, veut exploiter une constellation de 12 000 satellites.

C’est Thales Alenia Space qui construira les satellites de Télésat, mais l’assemblage sera réalisé au Québec. À l’instar de la majorité des entreprises manufacturières, le géant franco-italien doit composer avec des difficultés d’approvisionnement.

« Ce retard [dans la fabrication] avec Thales retarde également notre capacité à finaliser nos arrangements avec les agences [de crédit à l’exportation] », avait reconnu le président et chef de la direction de Télésat, Daniel Goldberg, dans le cadre d’une conférence téléphonique avec des analystes financiers américains.

La Presse a pu obtenir une transcription de l’appel, où la question du financement a aussi été abordée.

Au stade de projet

Télésat n’a pas encore lancé son premier satellite, qui doit en principe permettre à 40 000 foyers canadiens d’avoir accès à l’internet haute vitesse, la technologie LTE et la 5G à compter de 2024. Les pépins de Thales pourraient retarder cet échéancier.

L’entreprise doit encore trouver 2,5 milliards et elle souhaite convaincre des agences de crédit à l’exportation comme Exportation et développement Canada et la banque publique d’investissements Bpifrance de sauter dans l’aventure.

En mai dernier, Quilty Analytics soulignait déjà, dans une note, que Télésat accusait plus de deux années de retard par rapport à certains concurrents et que son projet risquait de faire face à des dépassements de coûts.

Les entreprises qui souhaitent déployer des constellations de satellites visent des créneaux différents. Les appareils de Télésat doivent envoyer des signaux à des tours de retransmission au sol. Contrairement au projet Starlink, ces signaux sont ensuite réacheminés par des fournisseurs, et non directement envoyés aux consommateurs et aux entreprises.

Québec propose de prêter 200 millions à Télésat, en plus d’injecter 200 millions pour des actions privilégiées. En échange, l’entreprise promet de s’enraciner à Gatineau en créant 300 emplois.

L’ontarienne MDA, qui exploite une usine à Sainte-Anne-de-Bellevue, a été retenue pour fabriquer les antennes actives des satellites. Elle doit agrandir ses installations et embaucher 280 personnes grâce à un prêt de 50 millions.

Pas d’émissions de titres

Télésat appartient à Loral Space & Communications, société de portefeuille dont les actions sont négociées au NASDAQ, et à l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public.

« En tant qu’entreprise cotée en Bourse, nous aurons la possibilité de récolter des fonds pour financer de nouvelles initiatives », a commenté dans un courriel la porte-parole de l’entreprise, Lynette Simmons.

Télésat n’est pas un nouveau venu dans le domaine de l’aérospatiale. Fondée en 1969 par le gouvernement fédéral, l’entreprise a lancé son premier satellite de communication, Anik A1, trois ans plus tard et a mis sur pied la première couverture internet pour les fournisseurs en 1996.