Un retour sur les lieux de travail, en temps de pandémie, ne s’effectue pas en criant ciseaux. Il faut un plan, des consultations auprès des employés, un suivi de tous les instants et de la flexibilité. « Les organisations prennent ça très au sérieux et sont rigoureuses, constate Josiane Simon, vice-présidente, services-conseils en risques, de BDO Canada. Les gens ont une conscience sociale. Ils ne veulent pas être des vecteurs de contamination. »

La liste de ce qu’elles doivent prévoir est toutefois longue. « Elles doivent faire leurs devoirs, conseille la spécialiste en gestion de risques. Celles qui retournent ce mois-ci se préparent depuis longtemps. Lors de la première vague, on était en mode réactif. En juin, beaucoup en ont profité pour se questionner sur la façon avec laquelle elles avaient réagi. »

Les devoirs des directions touchent à la fois aux lieux physiques et à leurs salariés. Outre le réaménagement des espaces, il faut penser à l’arrivée des employés au travail, à la façon de travailler au bureau. Il faut avoir une procédure détaillée s’il y a de la contamination chez les employés, les clients, les fournisseurs. « Une série d’actions rapides doivent être identifiées, précise Josiane Simon. Offrir un environnement sécuritaire fait partie des obligations des employeurs. Même s’il est impossible de penser à tout, il faut avoir identifié différents cas de figure et s’être entendus sur la façon de réagir. L’important est d’avoir une structure de gouvernance agile. »

« On encourage un bon leadership réactif et flexible, ajoute Sophie-Annick Vallée, vice-présidente, stratégie de l’agence de pub et communications lg2. Il faut savoir comment communiquer en amont et penser à divers scénarios de retour. »

Il faut aussi penser à l’hiver qui s’en vient et au quotidien qui se passera davantage enfermé. « Je reviens sur la notion d’agilité, martèle Josiane Simon. Ça prend une équipe de travail qui suit ça de façon très serrée. C’est un travail évolutif. Et les entreprises qui ont une structure où l’information voyage vers le haut et redescend facilement ont une longueur d’avance. Les mieux organisées sont aussi celles qui ont des équipes multidisciplinaires. »

Mais avant tout, il ne faut pas négliger l’humeur et la résistance au stress des employés. Selon un sondage de l’agence de recrutement Robert Half, réalisé en mai, 46 % des professionnels craignaient de se trouver à proximité de leurs collègues. « Ceux qui se sentent inconfortables de retourner au bureau évoquent l’entourage qu’ils ne peuvent contrôler, raconte Ève Laurier, directrice générale de la firme de relations publiques Edelman Montréal, qui a mené un sondage à ce sujet auprès de tous ses employés. Ils mentionnent, entre autres, les ascenseurs. »

La pandémie est une belle occasion de considérer sa force de travail individuellement et non comme un tout. D’écouter les employés qui parlent plus franchement depuis quelques mois également. « Combien de fois peut-on avoir un vrai son de cloche ? » demande Ève Laurier.

Cela dit, la majorité des entreprises resteront en télétravail ou opteront pour un modèle hybride pour ce qu’il reste de l’année 2020, selon un sondage de la firme spécialiste en rémunération Normandin Beaudry (61 %), réalisé en juin. À plus long terme, le bureau risque ainsi de perdre en pieds carrés, de devenir un endroit de passage. « C’est du cas par cas, dit Sophie-Annick Vallée, selon les secteurs et le désir de retourner au travail des employés. »