Les 550 employés de l’entrepôt de Loblaw, à Laval, perdront leur emploi d’ici deux ans. Le même sort attend aussi leurs 250 confrères d’Ottawa. Pour réduire ses coûts, l’épicier a décidé de confier une partie de la distribution de ses aliments secs à un sous-traitant ontarien qui utilise des robots.

Loblaw, qui exploite les enseignes de supermarché Provigo et Maxi au Québec, fermera progressivement son entrepôt de 680 000 pi2 de l’avenue Francis-Hughes d’ici « la fin 2021 ». Les employés ont été informés de la nouvelle en arrivant au travail mardi. L’entreprise n’a pas diffusé de communiqué de presse.

« On est déçus qu’ils quittent le Québec. C’est une perte pour l’économie québécoise. […] On est déçus pour nos travailleurs. On va tout mettre en œuvre pour leur négocier de bonnes allocations de départ », a commenté Roxanne Larouche, porte-parole du Syndicat des Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC). La convention collective viendra à échéance le 1er février.

La distribution des aliments frais et congelés demeurera toutefois au Québec ; l’entrepôt de Loblaw à Boucherville emploie 600 personnes.

L’épicier fermera du même souffle son entrepôt d’Ottawa, qui compte 250 travailleurs. Comme celui de Laval, il est « désuet et près de la fin de sa vie utile », selon la porte-parole de Loblaw au Québec, Johanne Héroux.

Loblaw affirme avoir « considéré tous les scénarios possibles » avant de prendre ces décisions. « Le plus réaliste à long terme, pour demeurer compétitif », était le transfert des activités de distribution à Cornwall.

Des robots pour réduire les coûts

C’est dans cette ville ontarienne que Matrix Logistics s’affaire présentement à agrandir son entrepôt robotisé « à la fine pointe de la technologie ». Celui-ci dessert déjà les pharmacies Pharmaprix. Une fois les travaux terminés, il sera en mesure d’approvisionner les supermarchés du groupe Loblaw situés dans l’est de l’Ontario et au Québec.

Mme Héroux ne savait pas combien de personnes travailleront pour Matrix Logistics, une fois l’agrandissement terminé. Mais le recours à des robots réduit forcément les besoins en humains.

« Derrière tout ça, il y a une recherche d’efficience et de réduction des coûts. Là où on peut réduire les coûts, c’est avec l’automatisation. Et en plus, il y a une rareté de personnel. C’est une équation financière. » — JoAnne Labrecque, experte en vente au détail à HEC Montréal

La pression sur la marge de profit, déjà mince dans l’industrie des supermarchés, ne fait que s’accentuer ces dernières années avec Amazon (propriétaire de Whole Foods Market) et Walmart qui vendent de plus en plus de nourriture, rappelle l’universitaire.

Tendance dans l'industrie

D’ailleurs, les TUAC ont vu venir la décision de Loblaw. « À partir du moment où Sobeys a construit son entrepôt robotisé à Terrebonne [en 2013], c’était écrit dans le ciel que les autres suivraient », lance Roxanne Larouche.

Chez Loblaw, on affirme que « la tendance dans l’industrie en ce moment » est d’avoir « des mégacentres de distribution à la fine pointe », même si cela suppose plus de transport pour certaines denrées. Des aliments fabriqués à Québec devront en effet passer par Cornwall avant de retourner en Beauce avec les coûts que cela provoque, par exemple.

Mais selon Mme Labrecque, dans « l’épicerie sèche », les fournisseurs québécois ne sont pas très nombreux par rapport à ceux qui sont établis en Ontario. Bien des géants comme Campbell, Kellogg et Post se trouvent dans la province voisine.

Négociations teintées par la fermeture

Étant donné la pénurie de main-d’œuvre qui sévit au Québec, les TUAC ont bon espoir de trouver un nouvel emploi aux centaines de travailleurs touchés par la fermeture. Mais ils demeurent réalistes. « Ce sont quand même de bons salaires et des entrepôts, il n’y en a pas tant que ça », précise Roxanne Larouche. La bonne nouvelle, c’est que le syndicat aura deux ans pour faire le travail.

Selon les fonctions, les salaires atteignent 25 ou 26 $ de l’heure au sommet de l’échelle salariale.

La négociation en vue du renouvellement de la convention collective sera « orientée, bien entendu », par cette fermeture, notent les TUAC.

Il est possible que certains employés soient transférés vers l’entrepôt de Boucherville, « où des postes sont ouverts », selon Loblaw. « On va bien les soutenir et les accompagner pendant la transition et on va travailler avec le syndicat pour proposer différentes options », dit Mme Héroux, tout en promettant « équité et respect » aux travailleurs.

Dans une réaction envoyée sur Twitter, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale du Québec, Jean Boulet, a compati avec les travailleurs et soutenu que le gouvernement allait s’assurer que Loblaw offre l’occasion à ses employés d’être reclassés dans l’entreprise.