(Montréal) La Société canadienne des postes a enfreint les droits linguistiques d’une plaignante francophone en adoptant une adresse URL en anglais seulement pour son site web, a statué le Commissaire aux langues officielles.

Dans un rapport préliminaire qu’il vient de remettre à une citoyenne du Nouveau-Brunswick, Chantal Carey, qui avait déposé une plainte à cet effet en décembre dernier, le Commissaire aux langues officielles juge que ses droits linguistiques ont été brimés.

Le problème vient du fait que l’adresse en français de la Société canadienne des postes, www.postescanada.ca, dirige désormais les internautes vers une adresse URL en anglais. La Société canadienne des postes n’a pas préservé le caractère en français du nom de domaine (NDD) dans l’architecture de son site en français.

La Société canadienne des postes a expliqué que les URL — Uniform Resource Locator — sont en anglais parce qu’elle a fusionné les deux domaines précédents, soit canadapost.ca et postescanada.ca, en un seul pour des raisons techniques et d’image de marque. Elle a soutenu qu’avoir deux domaines séparés et deux ensembles de pages « portait à confusion et nuisait à la facilité de recherche ».

De plus, cela représenterait des dépenses importantes, ce qui « aurait une incidence négative sur toutes les ressources de l’entreprise », a-t-elle fait valoir au Commissariat aux langues officielles.

Le Commissaire aux langues officielles a statué qu’il incombe aux institutions fédérales, dont la Société canadienne des postes, de veiller à ce que le nom de domaine et l’URL de chaque page web « soient parfaitement bilingues ou dans la même langue officielle que le contenu de la page web ».

PHOTO DARRYL DYCK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Il rappelle également que la Loi sur les langues officielles stipule « clairement les obligations des institutions fédérales en matière de communication par écrit, et dans ce cas, l’information communiquée par la SCP dans les URL de son site web n’était pas dans la langue officielle de choix du plaignant, malgré le fait que le plaignant avait indiqué sa langue officielle de préférence en recherchant le site web en français de l’institution ».

« Pour le principe de l’égalité »

Mme Carey s’est dite satisfaite de la décision du Commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge.

« C’est pour le principe de l’égalité. Souvent, les gens renoncent en se disant : “on va faire une plainte et on va avoir une réponse dans deux ans, à quoi ça sert ? » Mais il faut, il faut ! Et souvent, justement, c’est le fait de rendre ces informations-là publiques qui fait bouger les choses. Lorsque les rapports ne sont pas rendus publics, l’institution dit « il n’y a pas trop de conséquences, donc on ne fera rien” », a-t-elle justifié.

Et la Société canadienne des postes est une institution au pays ; elle doit donc surveiller son image et la perception qu’en a le public, a fait valoir la citoyenne néo-brunswickoise. « C’est l’image aussi : tous les Canadiens qui cherchent un code postal, ils doivent passer par ce site-là. »

Recommandations

Le Commissaire aux langues officielles recommande à la Société canadienne des postes de s’assurer « que l’offre active soit présente de manière non équivoque dans le nom de domaine de son site web et que l’URL de chaque page affichée soit, en tout temps, de qualité égale dans les deux langues officielles ».

Il lui recommande également de « mettre en œuvre des procédures officielles documentées afin de s’assurer que l’offre active de service bilingue soit prise en compte dans toutes les décisions institutionnelles touchant les médias électroniques ». Et il lui donne 12 mois pour le faire suivant la date du rapport final.