(Montréal) Un boni monétaire à l’embauche, le remboursement des frais d’études, des horaires flexibles, les entreprises de transport du Québec et de l’Ontario s’arrachent la relève à coups d’opérations charme.

Depuis 2015, l’Association du camionnage du Québec (ACQ) déploie des campagnes de sensibilisation qui visent à attirer les jeunes de 15 à 24 ans vers une carrière dans l’industrie du transport, que ce soit comme chauffeur ou chauffeuse, comme mécanicien ou mécanicienne, ou encore comme gestionnaire.

La plus récente démarche s’intitule « Choisis ta route » et s’adresse aux jeunes sur les réseaux sociaux par la diffusion de capsules vidéo notamment et avec la complicité de personnalités appréciées des ados.

« On cherche des gens dans tous les types d’emploi, mais le besoin le plus apparent bien sûr ce sont des chauffeurs », souligne le président et directeur général de l’ACQ Marc Cadieux. Il avance qu’il manque environ 4200 camionneurs et quelque 1500 mécaniciens de véhicules lourds en ce moment.

Selon les données du Comité sectoriel de main-d’œuvre de l’industrie du transport routier (CAMO-Route), on compte pratiquement en tout temps plus de 1000 postes vacants de camionneurs au Québec.

Un nombre qui risque de continuer de prendre de l’ampleur alors que la main-d’œuvre se fait vieillissante. D’après le rapport « Diagnostic professionnel et état du marché du travail », publié en mai 2017 par CAMO-Route, on recense « 6 camionneurs sur 10 âgés de 45 ans et plus ».

« Les départs à la retraite commencent, confirme Michel Viel de Highland Transport. Il y a des jeunes qui sortent de l’école, mais on demande au moins un an d’expérience chez nous, alors on se retrouve un peu pris. »

Pour séduire les camionneurs d’expérience intéressés à faire le saut chez eux, Highland offre un boni à l’embauche de 2500 $.

D’autres vantent des avantages sociaux, des vacances, des horaires flexibles.

Mot-clé : adaptation

Au cours des trois derniers jours, des dizaines de transporteurs ont tenté d’attirer l’attention de la future main-d’œuvre au salon ExpoCam à la Place Bonaventure à Montréal. Des affiches aux couleurs vives, du maïs soufflé, des incitatifs financiers et des promesses d’une meilleure qualité de vie faisaient partie des stratégies d’attraction.

Chez Kenworth, Caroline Plante reconnaît que la concurrence est forte alors qu’on s’arrache la main-d’œuvre, mais ce sont les jeunes qui tiennent le gros bout du bâton et qui posent leurs exigences en cherchant d’abord la meilleure qualité de vie possible.

Pour répondre à ces nouveaux besoins exprimés par les camionneurs, la directrice adjointe des ressources humaines chez Transport Bourassa, Jacynthe Séguin, admet avoir dû s’adapter.

« Dans le passé, le papa pouvait rouler 70 heures, aujourd’hui le papa veut aller à la garderie chercher ses enfants et c’est bien correct comme ça. C’est pour ça qu’on accepte d’avoir des horaires flexibles, de faire moins d’heures, mais pour y arriver ça prend plus de chauffeurs », explique-t-elle.

Transport Bourassa propose à ses employés des départs du lundi au samedi en plus d’offrir la « garde partagée » : sept jours de transport local et sept jours aux États-Unis.

Ces mesures d’atténuation de la charge de travail ont pour but d’améliorer la qualité de vie des employés, mais afin d’y arriver, il faut augmenter le nombre de chauffeurs. Ce qui accentue la pénurie.

Henri Dolders a vendu son entreprise de transport en Belgique pour se joindre à l’équipe de Bourret Transport, à Drummondville, il y a 12 ans.

À son avis, le salaire a longtemps nui au recrutement, mais la rémunération a fortement augmenté. Il reste maintenant à développer la passion du métier, croit-il.

« Peut-être que les gens sont plus intellectuels que manuels actuellement, je ne sais pas. Trouver des gens passionnés c’est très difficile, observe M. Dolders. Les jeunes sont très bien. Je ne demande qu’une chose, c’est qu’on engage le plus de jeunes possible pour leur montrer le beau métier que l’on fait. »