Si un appareil Boeing 737 MAX d'Air Canada, WestJet ou Sunwing avait subi la même avarie technique que ceux de Lion Air et d'Ethiopian Airlines qui se sont écrasés, l'information mise à la disposition des pilotes canadiens par Boeing et Transports Canada ne leur aurait probablement pas permis d'en garder la maîtrise, peut-on conclure à la lecture d'un rapport préliminaire publié hier matin.

Des indices similaires

Les autorités éthiopiennes ont publié hier un rapport préliminaire sur les causes de l'accident qui a tué les 157 personnes à bord d'un Boeing 737 MAX 8 de la compagnie Ethiopian Airlines, le 10 mars dernier, sur leur territoire.

On y apprend notamment qu'à quatre reprises durant les six minutes qui se sont écoulées entre le décollage et l'écrasement, l'avion a de lui-même manoeuvré pour pointer son nez vers le bas, contrecarrant la volonté de ses pilotes.

Le rapport note aussi qu'une des deux sondes d'incidence, qui mesurent l'angle de l'avion, a semblé se montrer défectueuse dans les secondes suivant le décollage.

Ces deux indices concordent avec ceux observés lors de l'écrasement d'un avion de Lion Air, en Indonésie, au mois d'octobre.

>>> Consultez le rapport (en anglais)

PHOTO MULUGETA AYENE, ARCHIVES AP

Les pilotes ont suivi la procédure

Après l'accident de Lion Air, Boeing avait transmis à tous ses clients exploitant des 737 MAX des directives leur rappelant l'existence d'une procédure censée régler un tel problème. Les pilotes de Lion Air n'avaient, semble-t-il, pas suivi celle-ci, qui a d'abord été pensée pour un problème similaire, mais pas ce problème particulièrement.

Or les pilotes d'Ethiopian Airlines ont, eux, bien suivi la procédure en question, a déclaré hier la ministre des Transports d'Éthiopie, Dagmawit Moges, en se basant sur les informations contenues dans le rapport préliminaire.

PHOTO ISSOUF SANOGO, AFP

Même chose au Canada

« Après l'accident de Lion Air et le rapport préliminaire à ce sujet, expliquait la semaine dernière le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, nous avons reçu une directive d'urgence de la FAA qui disait : "Pour empêcher une telle chose de se reproduire, il faut faire les choses suivantes : ..." »

« Nous l'avons regardée et nous avons dit : "Ce n'est pas assez." Le Canada a donc exigé de ses pilotes qu'ils mémorisent les cinq étapes [plutôt que de simplement savoir qu'elles sont décrites dans un manuel], parce qu'ils ne disposeraient que d'un certain nombre de secondes pour réagir. Nous sommes donc allés plus loin que l'avis de la FAA et de Boeing. »

Or cette procédure est celle-là même que semblent avoir suivie, sans succès, les pilotes du vol fatal d'Ethiopian Airlines.

PHOTO CLEMENT SABOURIN, ARCHIVES AFP

Boeing accuse le coup

Dans une vidéo publiée hier sur le site de l'entreprise, le président et chef de la direction de Boeing, Dennis Muilenburg, a reconnu que les écrasements des deux avions étaient probablement dus au même système.

« Il est apparent que dans les deux cas, le système MCAS [Maneuvering Characteristics Augmentation System] s'est activé en réponse à de fausses informations sur l'angle d'incidence. [...] Comme nous l'ont dit des pilotes, une activation erronée du système MCAS peut ajouter à ce qui est déjà un environnement de travail très chargé. C'est notre responsabilité d'éliminer ce risque. Nous en prenons la responsabilité et nous savons comment le faire. »

>>> Voyez la vidéo de Dennis Muilenburg (en anglais)

PHOTO BEN STANSALL, ARCHIVES AFP

Transports Canada se joint à l'enquête

Transports Canada a confirmé, hier, qu'il accepterait l'invitation de son homologue américaine, la FAA, de se joindre à un panel international « pour effectuer un examen exhaustif du système de contrôle des vols du Boeing 737 MAX 8 ».

Cet examen, indique-t-on, ne remplacera toutefois pas l'examen indépendant de la mise à jour logicielle promise par Boeing qu'avait déjà décidé le ministre Garneau.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES PC

Marc Garneau, ministre des Transports