Les principales banques canadiennes sont déjà en posture avantageuse face aux nouvelles normes de réserve financière qui émanent du principal organisme de coordination bancaire du monde.

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Il s'agit du Comité de Bâle III, du nom de sa ville hôtesse en Suisse. Ce comité planche depuis plus d'un an sur un resserrement des normes de sécurité financière des banques afin de parer à une autre crise comme celle d'il y a deux ans.

Or, depuis dimanche, le Comité a publié une entente préliminaire sur des normes plus sévères qui sont accueillies très différemment selon les régions du monde.

Alors que les dirigeants de grandes banques européennes et américaines - les plus touchées par la crise de 2008 - s'inquiètent du coût de ces nouvelles normes, leurs vis-à-vis dans les banques canadiennes affichent leur satisfaction parce leurs normes de gestion de capital approchent ou dépassent même les prochaines normes internationales.

La conséquence? Les principales banques canadiennes, déjà parmi les mieux capitalisées du monde industrialisé, auront moins à se presser pour augmenter encore leurs réserves de capital au cours des prochaines années.

Et pour leurs actionnaires, ce scénario laisse prévoir une disponibilité plus importante et hâtive de capital excédentaire, ce qui pourrait ouvrir la voie à des hausses de dividendes dès les prochains trimestres.

En Bourse, les investisseurs n'ont pas tardé à signaler leur satisfaction. L'indice sectoriel des banques et services financiers a grimpé à un rythme trois fois plus élevé que celui de l'indice de marché S&P/TSX, hier, à la Bourse de Toronto.

«L'entente préliminaire de Bâle III s'avère positive pour les six principales banques au Canada, tant pour la teneur des nouvelles normes que leur calendrier d'implantation d'ici 2018», a résumé Peter Routledge, analyste à la Financière Banque Nationale, dans une note à ses clients-investisseurs.

«L'implantation des nouvelles normes de Bâle III durera encore plus longtemps que nous anticipions. Les banques canadiennes pourront facilement s'ajuster aux nouvelles normes de capitalisation d'ici là», a estimé pour sa part André-Philippe Hardy, analyste bancaire chez Marchés des capitaux RBC.

Selon l'énoncé préliminaire de Bâle III, le principal renforcement des normes touche le capital des banques dit de «première catégorie». En fait, Bâle III prévoit une définition plus restrictive de ce capital de base des banques, tout en le comparant davantage à leurs actifs pondérés selon leur niveau de risque. La future norme principale de capitalisation déduirait du capital de première catégorie des actifs considérés «intangibles», tels que la mesure comptable de l'achalandage.

Pour les six principales banques canadiennes, cela signifie que leur capital actuel de première catégorie, qui totalise 137 milliards, serait réduit à 88 milliards environ, selon une évaluation de l'analyste Peter Routledge.

Dans le cas de la Banque Nationale, la plus importante au Québec, le capital de première catégorie de 5,7 milliards serait réduit à 4,5 milliards.

En dépit de cette réduction de capital admissible, les six banques canadiennes afficheraient encore un niveau de réserve - en pourcentage des actifs financiers à risque - qui serait presque équivalent à la norme édictée par Bâle III d'ici... huit ans!

Cette future norme sera d'au moins 7% en capital tangible. Or, les principales banques canadiennes cotent déjà en moyenne à 6,6%, selon l'analyse de Peter Routledge.

La Banque de Montréal (BMO) est la plus élevée, avec 9% de capital tangible par rapport à ses actifs financiers pondérés selon le risque.

En revanche, la Banque TD affiche la cote la plus basse, à 5,4%, ce qui est déjà mieux que la moyenne des grandes banques d'Europe et des États-Unis.

Quant à la Banque Nationale, son capital admissible selon la nouvelle définition de Bâle III cote actuellement à 6,8% de ses actifs à risque.

C'est d'ailleurs pourquoi les analystes et les investisseurs boursiers s'attendent à ce que la Nationale soit la première à reprendre la hausse de dividende. Probablement dès le premier trimestre de son exercice 2011, qui commencera en novembre prochain.

TORONTO SE DOTE D'UN «INSTITUT DU RISQUE»

Fort de la bonne réputation des banques canadiennes depuis la crise de 2008, le milieu financier de Toronto se dote d'un Institut mondial de gestion des risques. Cet institut d'analyse et de formation professionnelle est le premier projet d'envergure qui émane de l'Alliance des services financiers de Toronto. Il s'agit d'une coalition regroupant des représentants de Bay Street et des gouvernements qui vise à hisser Toronto parmi les 10 principaux centres financiers du monde. La création de l'Institut mondial de gestion des risques a été confirmée hier par le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, et son homologue ontarien. Ces deux gouvernements fournissent 10 millions de dollars chacun pour l'établissement de l'Institut.