La valeur des investissements d'une filiale de la Financière agricole a fondu de 50% depuis sa création, en 2002. Maintenant, faute de liquidités, les activités de l'organisme Capital Financière agricole inc. (CFAI) tournent au ralenti, a constaté La Presse Affaires.

> Suivez Hugo Fontaine sur Twitter

CFAI, spécialisé en capital de risque, est né en 2002 pour soutenir des projets de transformation alimentaire en région, souvent des démarrages d'entreprise. La Financière a consacré 24 millions de dollars au fonds de CFAI. Le Fonds de solidarité FTQ a ajouté 2,4 millions en 2006 quand elle a acquis une participation de près de 10%.

Au 31 mars 2011, la valeur comptable des placements de la Financière agricole dans sa filiale ne valaient plus que 11,6 millions, en baisse de 48,5% par rapport à la mise de fonds initiale.

Or, l'obtention de rendements positifs fait partie des objectifs de CFAI. Sur le site web de l'organisme, il est question d'un rendement recherché de l'ordre de 10 à 15% par année.

Le directeur général de CFAI, Dominique Vignola, affirme que cette fourchette de 10 à 15% est bel et bien visée dans un investissement donné, mais que ce n'est pas l'objectif de rendement aux actionnaires, étant donné les pertes et les dépenses administratives. «Les objectifs de rendement n'ont jamais été très bien définis», nuance-t-il.

N'empêche, un recul de 50% est loin d'un rendement positif. La récession a fait mal, soutient Dominique Vignola. «La conjoncture pèse sur la majorité des entreprises de transformation. Il ne faut pas surprendre de voir que des entreprises dans lesquelles nous avons investi peuvent éprouver des difficultés.»

C'est surtout dans le secteur du démarrage d'entreprises que CFAI a enregistré des pertes.

«Le constat qu'on a fait après 10 ans, c'est que d'être concentré dans le créneau du démarrage vient un peu plomber les rendements, étant donné les risques», indique Charles-Félix Ross, économiste en chef de l'Union des producteurs agricoles et membre du conseil d'administration de CFAI. Reste que pour M. Ross, «on a besoin de CFAI si on veut démarrer des entreprises ou lancer des nouveaux créneaux» dans le secteur agroalimentaire.

«C'est sûr qu'on aimerait un plus grand rendement, affirme pour sa part le porte-parole du Fonds de solidarité FTQ, Patrick McQuilken. Mais c'est de l'investissement à long terme. Et sur le plan de la création et du maintien de l'emploi, qui correspond à l'une de nos missions, le fonds de Capital Financière agricole est un succès.»

Manque de capital

Aujourd'hui, CFAI tourne au ralenti. Les pertes ont amenuisé son capital. L'organisme avait aussi placé une douzaine de millions de liquidités dans le papier commercial adossé à des actifs (PCAA), ce qui a compliqué sa situation financière.

CFAI, qui investissait environ 4 millions par année, n'a annoncé que quatre partenariats depuis 2009, pour un total d'un peu moins de 3 millions investis. M. Vignola affirme toutefois que le total est «un peu plus» élevé, puisque CFAI n'annonce pas tous ses réinvestissements chez ses partenaires.

La petite équipe de CFAI est passée de six à quatre employés. «Nous sommes en attente de recapitalisation, souligne M. Vignola. Cela a limité les activités, particulièrement au cours de la dernière année.»

Des investisseurs privés?

Si CFAI doit patienter ainsi, c'est que des discussions sont en cours entre le conseil d'administration et le ministère de l'Agriculture pour voir comment des partenaires privés pourraient contribuer à augmenter le capital de l'organisme. On peut toutefois penser que les partenaires privés exigeront du rendement. Dans ce contexte, on évoque la création d'un fonds agroalimentaire au mandat plus large ou aux modalités différentes.

Capital Financière agricole a investi un total de 29,75 millions depuis sa création. CFAI estime que chaque dollar investi a généré des investissements totaux quatre fois plus importants, soit environ 120 millions.

L'organisme a soutenu des entreprises dans des créneaux variés, dont le cidre de glace, les produits laitiers, les canneberges ou la bière. Des 45 à 50 entreprises soutenues par CFAI depuis 2002, une dizaine ont fermé leurs portes. Une trentaine sont toujours dans le portefeuille.