Les annonceurs profitent, plus que jamais, du Super Bowl pour tenter de se démarquer et créer du « buzz », mais attention à ne pas chatouiller Donald Trump, connu pour ses attaques directes contre des sociétés et des marques.

Peu connu aux États-Unis, le spécialiste des matériaux de construction 84 Lumber était prêt à débourser 15 millions de dollars pour diffuser une publicité de 90 secondes durant le Super Bowl et marquer les esprits, dimanche.

Cette année, pour être vu par plus de 100 millions de téléspectateurs, le tarif a encore augmenté, autour de cinq millions de dollars les 30 secondes, soit plus du double du prix facturé il y a dix ans seulement.

Mais avant même le coup d'envoi, 84 Lumber a déjà réussi son pari, sans débourser un centime, avec l'aide de la chaîne Fox, qui a retoqué son spot, jugé potentiellement polémique.

Point d'appui d'une grande campagne de recrutement, on y voyait des candidats séparés de l'entreprise par un mur, qui rappelait dangereusement, au goût du diffuseur, le grand projet du président Donald Trump pour marquer la frontière entre États-Unis et Mexique.

Pour Mike Bernacchi, professeur à l'université de Detroit Mercy et spécialiste de l'économie du Super Bowl, il y a bien un « effet Trump » cette année parmi les annonceurs. Toute l'Amérique des affaires se méfie des tweets rageurs du président, qui ont déjà visé Boeing, Lockheed Martin ou General Motors.

188 millions de téléspectateurs

« Toutes les publicités vont être observées à la loupe », dit-il. « Et tout le monde va bien réfléchir à ce qu'il va proposer ».

Il ne faut pas chercher ailleurs, selon lui, la raison du repli des constructeurs automobiles, traditionnellement grands consommateurs de publicité, qui ne seront que 7 cette année, contre 9 l'an dernier ou 11 il y a trois ans.

« Personne n'a été autant mis sur la sellette [par Donald Trump] que l'industrie automobile », rappelle-t-il, souvent accusée de délocaliser à tout crin.

Le brasseur Budweiser prévoit lui une publicité centrée sur l'un des deux fondateurs de la marque, Adolphus Busch, et son parcours d'immigré allemand aux États-Unis. Un sujet très actuel et délicat.

« C'est à double tranchant. Plus d'attention, c'est bon. Le côté dangereux, c'est que s'ils ne le font pas avec attention et précision, cela pourrait être mal vu », explique Dereck Rucker, professeur de Marketing à la Kellogg School of Management de l'université de Northwestern.

Mais malgré cette contrainte inédite, le Super Bowl continue d'attirer les marques comme aucun autre événement aux États-Unis. L'audience y est colossale, avec 188 millions de téléspectateurs attendus, à un moment ou un autre, devant leur téléviseur, et, une fois n'est pas coutume, bienveillante à l'égard de la publicité.

Les réclames, meilleure partie du Super Bowl

Selon un sondage réalisé l'an dernier par le site YouGov, 26 % des Américains considèrent que les réclames sont la meilleure partie du Super Bowl.

Pour tirer son épingle du jeu, rien n'est laissé au hasard. Le contenu du spot, d'abord, est soigné. Pour promouvoir sa nouvelle marque sportive, AMG, Mercedes-Benz s'est offert les frères Coen, l'hébergeur de sites internet Squarespace l'acteur John Malkovich dans son propre rôle, et la marque de boissons antioxydantes Bai Justin Timberlake.

Certains donnent dans l'innovation, comme Snickers qui va filmer sa publicité en direct, une première, ou Hyundai, qui va monter une publicité avec des images du match et la diffuser immédiatement après la fin de la rencontre.

Mais le film publicitaire ne se suffit plus à lui-même. Toutes les marques ont mis en ligne des « teasers », préparent le terrain sur les réseaux sociaux, qui seront également mis à profit après la diffusion.

Pour les annonceurs, « c'est un événement plus coûteux que jamais en temps et en argent », résume Dereck Rucker.

Mais le jeu en vaut la chandelle, dit-il, car la portée d'une publicité au Super Bowl peut être considérable.