Justin Trudeau n'a pas l'intention de s'engager dans une guerre de mots avec Donald Trump. C'est ce qu'il a signalé mardi matin, alors que le président venait de se livrer à une nouvelle charge contre le premier ministre canadien en marge de son sommet sur la paix avec Kim Jong-un.

À son arrivée au parlement, Justin Trudeau a commencé par dire que le Canada appuyait «évidemment les efforts du président sur la Corée du Nord» et avait «hâte de regarder les détails de ce qui a été conclu».

En ce qui a trait aux commentaires désobligeants du locataire de la Maison-Blanche, il a fait valoir qu'il préférait «continuer de rester focussé (sic) sur les emplois canadiens et les intérêts des Canadiens».

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh estime que c'est l'approche à préconiser.

«C'est inacceptable (que l'administration Trump) continue à attaquer avec des mots et des gestes qui sont incohérents, et on va continuer à répondre de cette façon. Je pense que c'est la meilleure façon», a-t-il offert en point de presse dans le foyer des Communes, mardi.

Il a rappelé que le Parlement a adopté unanimement, lundi après-midi, une motion en appui au premier ministre. «On est uni comme pays contre cette stratégie d'intimidation que l'administration de Trump a faite quelques fois et continue de faire», a-t-il indiqué.

Le président des États-Unis avait de nouveau attaqué le premier ministre du Canada dans les heures précédentes, lors de la conférence de presse qui a suivi le sommet historique de plusieurs heures qu'il a tenu avec le dirigeant de la Corée du Nord, Kim Jong-un.

«Il a appris. Ça va coûter beaucoup d'argent aux gens du Canada. Il a appris. Tu ne peux pas faire ça», a-t-il lancé en faisant référence au fait que Justin Trudeau a réitéré, à l'issue du sommet du G7, ses critiques face à l'imposition de tarifs sur l'acier et l'aluminium.

D'autres taxes punitives pourraient tomber, puisque l'administration Trump a ouvert une enquête sur la possibilité d'imposer des tarifs de 25 pour cent sur les véhicules automobiles, a rappelé mercredi la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland.

Elle a refusé de spéculer sur des «actions hypothétiques» que pourrait poser le Canada si Donald Trump mettait sa menace à exécution, mais elle a soutenu que le gouvernement Trudeau travaillait toujours en espérant le mieux, mais en étant «prêt au pire».

La ministre Freeland a tenu ces propos lors d'un bref point de presse dans le foyer des Communes, quelques heures avant de monter (encore) à bord d'un avion à destination de Washington.

Elle rencontrera mercredi le comité sénatorial des relations étrangères des États-Unis, et tentera de s'entretenir avec le représentant américain pour le commerce extérieur, Robert Lighthizer, qui pilote la renégociation de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA).

«Place spéciale en enfer»: Navarro s'excuse

Après avoir pris connaissance des propos du premier ministre Trudeau en fin de sommet du G7, le président Trump a taxé Justin Trudeau de «malhonnête» et de «faible» sur Twitter, tout en rejetant le communiqué final du G7 auquel il avait auparavant donné son sceau d'approbation.

Dans les heures suivantes, des membres de sa garde rapprochée ont tenu des propos encore plus cinglants sur les plateaux de certains réseaux télévisés américains. La palme de l'insulte la plus vitriolique revient au conseiller du commerce du président, Peter Navarro.

«Il y a une place spéciale en enfer pour tout dirigeant étranger qui fait preuve de mauvaise foi diplomatique avec le président Donald J. Trump et qui tente ensuite de le poignarder dans le dos», a-t-il lancé sur les ondes du réseau favori du président, Fox News.

Selon des médias américains, il a exprimé ses regrets mardi en plaidant que son travail était d'«envoyer un signal de force», et qu'en voulant transmettre ce message, il a employé «un langage qui était inapproprié» qui a porté ombrage au message.

«J'en prends la responsabilité; c'était mon erreur, mes mots», a-t-il offert.

Le premier ministre Justin Trudeau n'a pas répondu aux journalistes qui lui demandaient, mardi après-midi, s'il acceptait cet acte de contrition.

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Motion adoptée lundi aux Communes

Que la Chambre :

a) reconnaisse l'importance de la relation commerciale de longue date et mutuellement bénéfique que le Canada entretient avec les États-Unis d'Amérique ;

b) est solidaire des travailleurs et des travailleuses du Canada, ainsi que de leurs communautés, qui dépendent directement ou indirectement de cette relation commerciale ;

c) s'oppose fermement aux tarifs douaniers illégitimes imposés par le gouvernement des États-Unis aux travailleurs et aux travailleuses du secteur canadien de l'acier et de l'aluminium ;

d) est solidaire du gouvernement du Canada dans sa décision d'imposer des tarifs douaniers de représailles ;

e) fait preuve d'unité dans son soutien aux fermiers et aux fermières du Canada, ainsi qu'à la gestion de l'offre qui s'applique intégralement pour la production agricole des produits laitiers, du poulet, de la dinde et des oeufs ;

f) rejette les déclarations ad hominem désobligeantes faites par des responsables américains qui desservent les relations bilatérales et vont à l'encontre des efforts visant la résolution de ce différend commercial.