Donald Trump a échoué à rééquilibrer les échanges commerciaux des États-Unis en 2018, le déficit commercial se hissant à un niveau inédit en dix ans.

Pire, la politique résolument protectionniste du président républicain, dans une volonté de placer « l'Amérique, d'abord », n'a pu empêcher l'afflux record des importations en provenance de Chine, du Mexique et de l'Union européenne, malgré les taxes douanières punitives imposées aux biens venus de l'étranger.

Le déficit des biens et services s'est établi à 621 milliards de dollars (+12,5 %) avec un record à la fois des exportations à 2500 milliards (+6,3 %) et des importations à 3121 milliards (7,5 %), a détaillé le département du Commerce.

Et, sans l'excédent des échanges de services (+270,2 milliards), le déficit commercial atteint même 891,3 milliards (+10,4 %), un record absolu dans l'histoire de la première puissance mondiale. De quoi hérisser Donald Trump, qui a fait de la réduction de ce déficit une priorité de sa politique économique.

L'ascension vertigineuse s'est déroulée bien que l'administration Trump ait déclaré l'an passé une guerre commerciale à ses principaux partenaires qui s'est traduite concrètement par des vagues successives de taxes douanières supplémentaires allant de 10 à 50 % sur l'équivalent de 283 milliards d'importations américaines.

Les partenaires commerciaux des États-Unis, dont Pékin et l'UE, ont répliqué avec des tarifs douaniers de 16 % en moyenne portant sur quelque 121 milliards de dollars d'exportations américaines.

Ce conflit a, certes, affecté l'économie chinoise dont la croissance est tombée en 2018 à son plus bas niveau depuis 28 ans.  

Mais la vigueur du dollar a défavorisé les exportations américaines quand le yuan a dopé les exportations chinoises.

La croissance de l'économie mondiale a, elle, été moins forte que prévu, pâtissant des inquiétudes des investisseurs.

N'en déplaise au président américain, les Américains ont un appétit insatiable pour les biens de consommation courante notamment chinois vendus à bas prix. Ce qui n'est pas forcément une mauvaise nouvelle puisqu'une hausse du déficit commercial accompagne généralement une économie en pleine expansion. Ce fut le cas en 2018 avec une croissance qui a frôlé les 3 %, l'objectif de Donald Trump.

Pour l'heure, les États-Unis n'ont pas ressenti les effets des représailles commerciales. Mais les experts s'accordent à dire que l'économie américaine va ralentir dès cette année à mesure que les mesures telles que la baisse des impôts vont s'estomper.

Soja américain, victime collatérale

Dans le détail, « les États-Unis ont enregistré des importations record en provenance de 60 pays à commencer par la Chine (539,5 milliards), le Mexique (346,5 milliards) et l'Allemagne (125,9 milliards) », a commenté le département du Commerce.

Les exportations de soja, très prisées des Chinois, mais frappées par les représailles de Pékin, ont baissé de 18 % à 18,2 milliards.

Ces données sont publiées alors que l'administration Trump négocie âprement un accord commercial avec Pékin pour mettre fin à leur conflit. L'objectif est d'obtenir des changements structurels dans les pratiques commerciales chinoises jugées déloyales, telles que les subventions d'État, le transfert de technologie forcé ou le vol de la propriété intellectuelle.

Si Donald Trump a affiché ces dernières semaines sa confiance quant à un possible accord avec son homologue chinois Xi Jinping, les négociateurs sont plus prudents.

Les tractations commerciales sont « très difficiles » et « il reste encore beaucoup à faire » malgré des percées dans certains domaines, a ainsi déclaré mardi le ministre chinois du Commerce, faisant écho à des propos similaires tenus la semaine dernière par le représentant américain au Commerce Robert Lighthizer.

« Donald Trump découvre peut-être désormais que les tweets et les fanfaronnades ne vont pas à elles seules réduire significativement le déficit commercial », a réagi Scott Paul, le président de la Fédération pour l'industrie américaine.

« Si le président veut concrétiser ses paroles par des actes, tout accord avec la Chine devra se focaliser sur les changements structurels de l'économie étatique chinoise », a-t-il ajouté. « Nous ne pouvons nous contenter d'un accord qui ne se traduirait pas par un réel changement durable ».

Ces données sont par ailleurs publiées le jour même où la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström rencontre M. Lighthizer pour préparer des négociations commerciales.

Bruxelles est sous pression, Washington envisageant d'imposer des taxes douanières supplémentaires dans le secteur automobile, stratégique pour l'Allemagne en particulier.

Donald Trump a reçu le 20 février un rapport de son ministère du Commerce sur l'industrie automobile, au contenu toujours confidentiel.

« Si nous ne trouvons pas un accord (commercial avec l'UE), nous imposerons des tarifs douaniers » sur les voitures, avait menacé le président américain quelques jours plus tard.