L'Irak a assuré mercredi être en mesure de produire 10 millions de barils de pétrole par jour (mbj) dès 2020, soit bien plus que le «scénario central» de l'Agence internationale de l'Énergie (AIE) qui prédit 6,1 mbj, atteints au prix d'investissements massifs.

À l'heure actuelle, Bagdad, qui tire l'essentiel de ses ressources de sa manne pétrolière, produit 3,4 mbj, selon des données gouvernementales.

Lors d'une conférence de presse conjointe destinée à étayer le rapport de l'AIE sur les perspectives du brut irakien à Bagdad, Hussein al-Chahristani, vice-premier ministre chargé de l'Énergie, a assuré que ce chiffre pourrait être multiplié par trois en l'espace de huit ans.

«Nos études et celles d'experts indépendants mandatés par le ministère du Pétrole concluent qu'il est possible et même souhaitable que l'Irak augmente sa production de pétrole pour la porter entre 9 et 10 mbj d'ici 2020. L'Irak peut maintenir ce rythme pendant au moins 20 ans», a déclaré M. Chahristani.

«L'Irak est à même de répondre à la moitié de la demande supplémentaire mondiale en pétrole», a-t-il ajouté.

L'AIE est, elle, plus prudente. Dans son rapport, dévoilé mardi à Londres, le bras énergétique des pays de l'OCDE juge que Bagdad pourrait, dans le «meilleur des cas», produire 9,2 mbj d'ici 2020, pour pousser à 10 mbj à l'horizon 2030.

Mais, d'après le «scénario central» établi par l'institution, l'offre d'or noir de l'Irak atteindrait plutôt 6,1 mbj en 2020 et 8,3 mbj en 2035, au prix toutefois d'investissements massifs.

Pour que cette offre se concrétise, «il faudra des investissements cumulés de quelque 530 milliards de dollars» d'ici à 2035, note l'AIE, soit «à peu près 10% des revenus pétroliers et gaziers escomptés sur cette période», juge l'AIE.

Les revenus tirés des exportations de brut pourraient rapporter à l'Irak près de 5000 milliards de dollars au total, sur la période 2012-2035.

Mais, a noté Fatih Birol, chef économiste de l'AIE, le «scénario central» de l'institution met en avant «une hausse plus modeste (de la production de brut irakien) que celle que vise le gouvernement». De plus, il n'est pas acquis que la hausse de la demande absorbe sans coup férir l'offre supplémentaire de Bagdad, a-t-il prévenu.

Il n'est pas non plus exclu que le cadre législatif toujours flou qui entoure le secteur pétrolier et le rythme résolument lent des investissements freinent les ardeurs irakiennes. Dans ce dernier cas, Bagdad n'augmenterait sa production qu'à 4 mbj en 2020 et 5,3 mbj 15 ans plus tard. «C'est un scénario qui devrait tous nous inquiéter», a martelé M. Birol.

Ces «retards» structurels «auront malheureusement un impact considérable sur l'Irak (...), et pas seulement sur l'Irak, mais sur nous tous», a lancé l'économiste aux diplomates assistant à la conférence de presse.

«Si la production irakienne de pétrole est plus faible, au niveau mondial les marchés seront plus tendus, en conséquence de quoi les prix du pétrole seront plus chers de 15 dollars (par baril)», a-t-il conclu

Fort de réserves prouvées de 143,1 milliards de barils de pétrole et 3200 milliards de mètres cubes de gaz naturel, l'Irak pourrait supplanter d'ici 2030 la Russie comme deuxième exportateur mondial de brut, juste derrière l'Arabie saoudite. En septembre, Bagdad a exporté 2,6 mbj, du jamais vu en 30 ans.