Vous l'avez peut-être vue à la télé. La campagne publicitaire «L'immigration, c'est Bienvenue!» lancée cet automne par Yolande James, ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, visait à sensibiliser la population à l'apport positif des immigrants dans notre société. Et aussi, à convaincre les employeurs de les embaucher. Car dénicher un emploi ici quand on vient d'ailleurs, ce n'est pas facile!

La preuve: chez les immigrants, le taux de chômage moyen était de 12%, comparativement à 8% dans la population en général, selon les données de 2006. Et même si le temps arrange les choses, l'amélioration est lente. Pour ceux qui sont au Québec depuis moins de cinq ans, le taux de chômage était de 18%. Chez ceux arrivés depuis cinq à dix ans, il était de 13%. Pour les immigrants arrivés depuis dix ans et plus, le taux était de 9%, soit un peu plus que dans l'ensemble de la population.

 

Pourtant, ils sont qualifiés! Parmi ceux de 15 ans et plus, 67% ont au moins 14 ans de scolarité, selon le MICC. «Près des deux tiers des immigrants font partie de l'immigration économique, c'est-à-dire qu'ils ont été sélectionnés sur la base de leurs qualifications. Sauf qu'en même temps, les exigences du marché du travail augmentent», dit Claude Fradette, porte-parole du MICC.

Les obstacles

Trois obstacles principaux se dressent entre eux et le marché du travail, explique M. Fradette. D'abord, la langue. Aujourd'hui, 60% des immigrants admis au Québec connaissent le français, comparativement à 35% en 1997. Mais comme beaucoup de professionnels sont sélectionnés pour immigrer, l'exigence de la langue est plus importante pour les emplois qu'ils pourraient occuper. Il ne suffit plus de parler, il faut aussi bien écrire le français pour répondre aux attentes des employeurs.

L'autre obstacle est celui de la reconnaissance de la formation par les différents ordres professionnels.

Parlez-en à Cheikh Dia, 34 ans. Détenteur d'une maîtrise en administration, ce Sénégalais arrivé au Québec il y a deux ans devrait suivre des cours pendant deux ans et demi pour faire partie de l'Ordre des comptables en management accrédités du Québec. Il a commencé sa formation, mais étudier coûte cher! En attendant, il participe au Programme de parrainage professionnel de la Ville de Montréal. Pendant six mois, il est stagiaire dans son domaine.

«Ce n'est pas facile quand on vient d'arriver et qu'on a de l'expérience ailleurs, de presque tout recommencer à zéro, dit-il. Quand on arrive, on croit qu'on va pouvoir continuer sa carrière, mais c'est très difficile de trouver quelque chose dans son domaine.»

M. Dia n'est pas le seul dans son cas. Souvent, les premiers emplois des immigrants sont équivalents à ceux qu'obtiennent les jeunes diplômés québécois, même s'ils ont plusieurs années d'expérience, indique Claude Fradette.

Toutefois, les professionnels dont la compétence n'est pas reconnue par les ordres ne sont pas aussi nombreux qu'on le croit, précise-t-il.

«En fait, ceux qui ont besoin d'être admis par un ordre pour exercer leur métier représentent 15% du total des immigrants.»

Les préjugés

Autre obstacle: les préjugés et la gestion de la diversité en milieu de travail.

«Certains employeurs éprouvent une gêne à embaucher quelqu'un de l'extérieur, car ils craignent que ce soit plus compliqué pour l'intégrer au groupe, dit M. Fradette. Les grandes entreprises ont les moyens de se doter de politiques pour gérer l'intégration, mais au Québec, on a surtout des PME.»

Mais il y a de l'espoir: de plus en plus, la diversité devient une composante essentielle de la gestion des ressources humaines. Les entreprises réalisent qu'une équipe de travail diversifiée, c'est une équipe plus créative, performante, qui permet d'être plus concurrentiel.

D'autre part, des programmes incitatifs sont mis sur pied pour encourager les entreprises à embaucher des immigrants. C'est le cas du Programme d'aide à l'intégration des immigrants et minorités visibles (PRIIME).

«Pendant six mois, on subventionne l'emploi à 50%, dit Claude Fradette. Depuis 2005, 4000 personnes y ont participé et le taux de rétention en emploi est de 80%.

Évidemment, il y a aussi une question de personnalité et d'initiative personnelle. «Il y a des gens qui tirent bien leur épingle du jeu plus rapidement, dit Claude Fradette. On observe que chez les immigrants économiques, la courbe d'intégration est plus rapide que chez les autres, parce que leur projet était plus réfléchi. Et il y aura toujours des individus qui s'adaptent plus facilement que d'autres.»