Le cafetier québécois Van Houtte multiplie les projets d'expansion un an après son achat par Green Mountain Coffee Roasters, société multimilliardaire du café établie au Vermont.

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Des embauches par dizaines, des investissements par millions, une croissance des ventes hors du Québec, une relance d'expansion des cafés-bistrots. Bref, un scénario tout autre que celui qui survient normalement après le rachat d'une entreprise spécialisée par une autre beaucoup plus grosse; cela se traduit souvent par une chasse aux synergies et aux économies en fusionnant des actifs et en éliminant des emplois.

Mais chez Van Houtte, admettent ses dirigeants en entrevue, leur plus grand défi depuis un an a été de s'adapter à «une tout autre vitesse de croissance».

«C'est un défi évidemment très motivant comme dirigeant d'entreprise. Mais ça exige aussi de bien s'organiser pour gérer les embauches et les investissements suscités par une telle croissance», indique Gérard Geoffrion, président et chef de la direction de Van Houtte.

Son principal adjoint, Sylvain Toutant, chef des opérations depuis trois ans et gestionnaire d'expérience chez de grands détaillants (SAQ, Réno-Dépôt, etc.), s'empresse d'aligner quelques chiffres.

Entre autres, la croissance des revenus de Van Houtte s'est fortement accélérée, frôlant les 40% par année. C'est trois fois plus qu'auparavant.

Et malgré la revente récente de sa filiale américaine de pause-café, tel que l'avait énoncé Green Mountain l'an dernier, Van Houtte se dirige vers des revenus supérieurs aux 445 millions de dollars atteints avant son acquisition. «Cette filiale américaine représentait environ 20% de nos revenus. Mais cette perte a été plus que compensée par la croissance forte au Canada», selon M. Toutant.

Van Houtte prévoit plus que doubler, à 25% d'ici peu, la proportion de ses ventes qui proviennent de l'extérieur du Québec.

Pour être à la hauteur des ambitions canadiennes que lui a confiées Green Mountain, Van Houtte a dû embaucher 215 personnes depuis un an. Son effectif, qui atteint 1540 employés, devrait encore croître encore de 75 personnes l'an prochain.

Il s'agit autant d'emplois de manutention, d'administration que de postes d'ingénieurs et de techniciens, afin de bien exploiter des appareils de production et d'emballage de plus en plus sophistiqués.

Côté investissements, Van Houtte consacre cette année quelque 15 millions en achats d'équipements et en réaménagement de bâtiments qui ont été repris chez ses voisins dans le parc industriel du quartier Saint-Michel, à Montréal.

D'autres projets, d'une valeur atteignant la vingtaine de millions, sont en préparation pour l'an prochain.

Entre autres, Van Houtte investira «quelques millions» pour augmenter sa capacité de torréfaction de café, qui sera bientôt saturée même après une augmentation substantielle des horaires de production.

Aussi, Van Houtte doit encore augmenter sa capacité de production de son produit-vedette avec Green Mountain: les cafés de spécialité mis en capsules individualisées Keurig K-Cups pour les cafetières semi-automatisées.

Van Houtte cible une capacité de production de 25 millions de capsules par semaine à partir de l'an prochain. Une fois installée, une telle capacité sera plus du double des 10 millions de capsules d'il y a un an.

En forte croissance, le marché du café en capsules individualisées a déjà fait la fortune de l'entreprise d'origine vermontoise. Son chiffre d'affaires cette année voisinera les 2,7 milliards$US, cinq fois plus qu'il y a trois ans.

En Bourse, Green Mountain a plus que doublé de valeur, à 14 milliards US depuis un an. Au point de faire sourciller certains analystes, malgré leur appréciation soutenue pour le plan d'affaires de l'entreprise.

Chez Van Houtte, les dirigeants font peu de cas de la performance boursière de Green Mountain, si ce n'est une certaine réserve quant aux informations pouvant être divulguées.

En contrepartie, Gérard Geoffrion et Sylvain Toutant avouent bien apprécier la culture d'entreprise qu'ils ont dû apprivoiser chez Green Mountain. Van Houtte a été acquise il y a un an pour 915 millions auprès de la société d'investissement Littlejohn, aussi américaine.

«On nous a très bien accueillis, comme les nouveaux gestionnaires pour tout le Canada. Et ça s'est fait sans prétention avec tout ce qui a déjà été accompli avec succès chez Green Mountain ces dernières années», relate M. Toutant.

Pour sa part, Gérard Geoffrion avoue avoir retrouvé le plaisir de «gérer de la croissance et de créer des emplois de valeur».

C'est ainsi qu'il prépare sa prochaine rencontre avec le conseil d'administration de Green Mountain, dans une dizaine de jours, afin de lui présenter la suite des projets d'expansion de Van Houtte.