Les très nombreuses pertes d'emploi de l'automne et de l'hiver incitent les Canadiens à goûter davantage, peut-être malgré eux, aux joies de la simplicité volontaire.

Après avoir fait fi de la dure réalité économique durant trois mois pour profiter des multiples soldes des détaillants, les consommateurs ont choisi de leur laisser moins d'argent en avril. La valeur des ventes au détail a fléchi de 0,8 %, à hauteur de 33,5 milliards. Il s'agit du montant le plus faible depuis décembre, indiquait hier Statistique Canada.

À l'échelle provinciale, les marchands québécois ont encaissé le pire recul à hauteur de 2,5 %. Il faut préciser cependant que c'est dans la société distincte où les ventes avaient le plus progressé en mars.

Les nombreux soldes expliquent sans doute le repli de 1,8 % de la valeur des ventes de véhicules neufs. Une enquête précédente de l'agence fédérale avait révélé que les ventes des concessionnaires étaient restées stables lorsqu'on les exprime en volume. Les résultats préliminaires de mai indiquent une augmentation des volumes de 1,0 %

Les autres détaillants n'ont pas cette chance. Même en consentant des rabais ou en multipliant les promotions, le volume de l'ensemble des ventes au détail a reculé de 0,6 % au cours du mois.

Seuls les magasins de matériaux de construction ou de produits extérieurs pour la maison ainsi que les commerces de marchandises diverses ont connu un chiffre d'affaires un peu plus élevé au cours du mois.

Les premiers commencent à profiter des déductions fiscales pour favoriser la rénovation tandis que la bonne fortune des seconds est sans doute attribuable à des modifications des habitudes d'achat : on fréquente davantage les magasins de type Dollarama dans le but de faire des économies.

Le taux d'épargne personnel a d'ailleurs progressé rapidement au cours de la dernière année pour atteindre 4,7 % au premier trimestre, note Sébastien Lavoie, économiste chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne. « Les ménages veulent payer moins cher en ces temps difficiles. Pour bien des gens, le luxe et les petites gâteries n'ont plus leur place en cette période de récession. »

À preuve, les ventes de magasins de bière, de vin et de spiritueux ont baissé de 1,7 % au cours du mois, celles des magasins d'alimentation spécialisée de 1,8 %, soit autant que celles des magasins de meubles.

« La diminution observée en avril est un rappel que les difficultés du commerce de détail ne sont pas complètement effacées », souligne Benoit P. Durocher, économiste senior chez Desjardins.

Il note toutefois que le volume des ventes des détaillants paraît s'être stabilisé depuis quelques mois après de forts reculs durant l'été et l'automne.

Cela signifie donc que les marchands rognent leurs bénéfices pour attirer les clients. Il faut rappeler que ces mêmes marchands ont mis plusieurs mois à refiler aux consommateurs leur pouvoir d'achat accru par la force du dollar canadien qui s'est maintenu en haut des 90 cents d'équivalence pendant plus d'un an avant de plonger sous les 80 cents US, en octobre.

« La stabilisation des mises en chantier de logements et une quatrième hausse consécutive des ventes de logements existants en mai pourraient aider à inverser la longue décroissance des ventes en volume des magasins de meubles, de produits électroniques et d'appareils ménagers », fait remarquer pour sa part Marc Pinsonneault, économiste principal à la Financière Banque Nationale.

Cela dit, les beaux jours des détaillants reviendront quand le marché du travail se sera vraiment stabilisé. Cela va exiger encore quelques mois.