L'italien Fiat a fait un pas décisif vers la prise de contrôle de l'américain Chrysler en parvenant à un accord pour acheter une part supplémentaire de 16%, et voit désormais son «rêve» à portée de main: donner naissance à un nouveau géant de l'automobile.

Fiat, qui détient déjà 30% de Chrysler, a indiqué jeudi être parvenu à un accord avec l'américain et les autres actionnaires (États américain et canadien et fonds de pension du syndicat UAW) afin d'acheter 16% de plus pour 1,268 milliard de dollars (environ 870 millions d'euros) et monter ainsi à 46%.

Il exercera cette option d'achat lorsque Chrysler aura remboursé «au cours du deuxième trimestre» plus de 7 milliards de dollars de prêts accordés par les États américain et canadien, en émettant de la dette sur le marché.

Fiat pourra ensuite prendre le contrôle de Chrysler en montant à la fin de l'année à 51% lorsque l'américain aura produit une voiture économe en carburant basée sur une plate-forme Fiat, ce qui lui donnera droit à 5% de plus.

«L'opération annoncée aujourd'hui, avec l'obtention de 5% de plus d'ici la fin de l'année, nous amènera à réaliser le rêve duquel est née cette alliance: donner naissance à un constructeur automobile mondial (...) déterminé à se positionner parmi les leaders du secteur», a commenté Sergio Marchionne, directeur général des deux groupes, qui ne cache pas son intention de monter à terme à plus de 51%.

Alors que l'exercice de l'option d'achat des 16% était initialement prévu à partir de 2013, Fiat a décidé d'accélérer afin de disposer de conditions financières plus avantageuses qu'après l'introduction en Bourse de Chrysler, prévue fin 2011.

Une décision saluée par les investisseurs. Tôt ce matin, Fiat bondissait de 3,19% à 6,785 euros à la Bourse de Milan.

Fiat a pris les rênes de Chrysler lors de sa sortie du dépôt de bilan en juin 2009. L'accord signé à l'époque lui permettait de monter de 20% à 35% par paliers de 5% sans débourser d'argent, mais à condition qu'il permette à l'américain d'atteindre des objectifs précis de production et de ventes.

M. Marchionne, patron italo-canadien à l'éternel pull ras du cou, a fixé aux deux groupes l'objectif de produire 6 millions de véhicules par an en 2014. Un seuil qu'il considère comme un minimum de survie pour un groupe automobile.

Cet objectif est toutefois jugé trop ambitieux par certains, alors que Fiat et Chrysler produisent actuellement moins de 4 millions de voitures par an.

Les deux groupes «sont encore loin des 6 millions. Comment peuvent-ils y arriver? Certainement grâce à une nouvelle alliance», estime Giuseppe Berta, professeur à l'université Bocconi de Milan et spécialiste de Fiat.

Le japonais Toyota, numéro un mondial, a vendu 8,42 millions de véhicules en 2010 et l'américain General Motors, numéro deux, 8,39 millions.

En Italie, où Fiat est un symbole national, les salariés craignent que la Péninsule ne soit reléguée au second plan et que «Marchionne l'Américain» ne déplace le siège à Detroit, même s'il a assuré qu'aucune décision n'avait été prise à ce sujet.

Le climat social est tendu chez Fiat dans le pays alors que M. Marchionne a entamé depuis un an un bras de fer avec les syndicats pour imposer un durcissement des conditions de travail.

L'annonce de jeudi est «la confirmation d'un déplacement de l'orientation de Fiat vers les États-Unis», a réagi Susanna Camusso, la secrétaire générale de la CGIL, principal syndicat italien.