Au volant de sa Chevy rouge, Wentworth Miller, alias Michael Scofield dans la série américaine Prison Break, manoeuvre sûrement mais calmement dans un dédale de miroirs, pourchassé par des hommes en noir, dans la dernière campagne télévisée de General Motors (gm) en Chine.

Un flegme qui contraste avec la dure réalité à laquelle GM est aux prises de l'autre côté de l'océan Pacifique, acculé par l'administration américaine à un rigoureux plan de restructuration, avec peut-être dépôt de bilan en vue.

C'est qu'en Chine, la donne est totalement différente pour le constructeur américain, qui a encore pulvérisé ses records de ventes mensuelles le mois dernier.

Les perspectives sont autres aussi, quoi qu'il arrive à GM sur le continent nord-américain: «Je ne pense pas que cela fasse une grande différence pour nous. Bien sûr nous aurions préféré que la restructuration se fasse hors des tribunaux. (Mais) nous opérons comme une coentreprise en Chine et nous continuerions à peu près comme aujourd'hui», assurait récemment à l'AFP Kevin Wale, président de GM Chine.

En pleine cure d'amaigrissement aux États-Unis, GM pourrait se doter d'un nouvelle usine en Chine pour arriver à son objectif: le doublement de ses ventes annuelles, de 1 à 2 millions, dans les cinq ans, grâce notamment à des véhicules développés spécialement pour ce pays, qualifié par Kevin Wale de «plus important marché de croissance au monde».

La Chine est effectivement devenue récemment, avec la crise et l'effondrement des ventes dans les autres pays, le premier marché automobile de la planète. Pour GM et ses coentreprises locales, elle a représenté en avril des ventes de 151 084 véhicules, en hausse de 29,9%, grâce notamment à une bonne demande pour les Buick ou les petites Wuling à moins de 5000$US.

«C'est vraiment l'un des leaders ici, en parfait contraste avec leur résultat aux États-Unis», commente Shen Jun, analyste automobile de Roland Berger.

Pu Yi, le dernier empereur, Sun Yat-sen, le «père de la Chine moderne» qui participa au renversement de la dernière dynastie en 1911, ou l'ancien premier ministre de la Chine communiste Zhou Enlai conduisaient tous des Buick.

Le premier point de vente de GM à Shanghai ouvrit en 1929, en s'enorgueillissant que «les propriétaires de Buick soient pour la plupart les hommes dirigeants en Chine».

Pourtant aujourd'hui, l'image de GM - servie par le héros de Prison Break dont les vidéos piratées sont sur tous les étals - s'est fortement modifiée. La Buick est assimilée à une voiture pour la classe moyenne, jeune et en pleine expansion.

Pour M. Shen, ce succès chinois, qui a placé l'américain loin devant ses compatriotes et rivaux Ford et Chrysler, provient à la fois de décisions pertinentes de GM Chine et d'une dose de chance.

GM forme ainsi une bonne équipe avec son partenaire local Shanghai Automotive Industry Group (SAIC), le premier constructeur chinois, alors que les tensions dans les coentreprises sont fréquentes, souligne Zhu Junyi analyste au Shanghai Information Centre.

Les deux partenaires se sont alliés en 1997 après que SAIC eut rejeté Toyota et avant que Ford ne puisse conclure un accord, rappelle Shen Jun.