Alors que la Banque du Canada se prépare à baisser son taux directeur, le Canada peut se permettre d’avoir des taux d’intérêt plus bas qu’aux États-Unis sans courir le risque de réanimer l’inflation, selon l’économiste en chef de Desjardins.

« Le Canada n’est pas enchaîné à la Fed », a affirmé Jimmy Jean, à l’occasion de la mise à jour des prévisions économiques de Desjardins. Il a rappelé que le Canada et les États-Unis ont eu des taux divergents à six reprises depuis l’an 2000.

La dernière fois remonte à 2016, quand la chute du prix du pétrole a forcé la Banque du Canada à réduire ses taux alors que la Réserve fédérale américaine se préparait à les remonter.

Si la Banque du Canada réduit comme prévu mercredi son taux directeur de 5 % à 4,75 %, les taux d’intérêt seront plus élevés aux États-Unis, ce qui affaiblira le dollar canadien.

Un dollar canadien plus faible signifie des prix plus élevés pour les produits importés au Canada, du pétrole aux oranges en passant par les biens et services produits à l’étranger, ce qui pourrait réalimenter l’inflation.

C’est un scénario peu probable, selon Jimmy Jean. « La sensibilité de l’inflation au dollar canadien est très faible, a-t-il expliqué. Il faudrait une très forte dévaluation du dollar canadien et qu’elle dure longtemps pour créer un problème d’inflation. »

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Jimmy Jean, économiste en chef de Desjardins

Le seul scénario qui pourrait freiner la baisse des taux canadiens, selon lui, c’est si la faiblesse du dollar stimule fortement les exportations et crée une surchauffe de l’économie canadienne. C’est un autre scénario peu probable, estime Jimmy Jean.

Les marchés financiers anticipent déjà des taux d’intérêt plus bas au Canada qu’aux États-Unis, et le dollar canadien ne s’est pas écroulé, a-t-il précisé.

Le différentiel des taux d’intérêt entre le Canada et les États-Unis est un déterminant important de la valeur de la devise canadienne, mais ce n’est pas le seul. « Il faut garder à l’esprit que plusieurs autres variables influencent le dollar canadien comme le prix du pétrole et la sensibilité au risque, qui ont encore plus de poids. »

Merci aux États-Unis

La descente des taux d’intérêt qui devrait commencer cette semaine pourra donc se poursuivre, selon Desjardins, qui voit le taux directeur canadien à 4 % à la fin de l’année et à 2,5 % à la fin de 2025.

L’économie canadienne a évité la récession de peu en 2023 et pour ça, il faut dire merci aux Américains, a souligné l’économiste. Ce sont les exportations qui ont soutenu l’économie canadienne. « La contribution du secteur extérieur à la croissance économique a été la plus forte en 25 ans », a-t-il précisé.

L’économie tant canadienne que québécoise reste dans un état de grande faiblesse. À mi-chemin de l’année, Desjardins prévoit une croissance de 1 % au Canada en 2024 et de seulement 0,7 % au Québec.