Chaque samedi, un de nos journalistes répond, en compagnie d’experts, à l’une de vos questions sur l’économie, les finances, les marchés, etc.

Hydro-Québec examine un projet de construction de centrale hydroélectrique de 1200 mégawatts sur la rivière du Petit Mécatina. Je suis perplexe. Selon Hydro-Québec et le ministre Pierre Fitzgibbon, le Québec a besoin de 100 térawattheures. Est-ce que ça veut dire qu’il faudra construire un peu moins de 100 000 centrales comme Petit Mécatina ? J’espère que je me trompe dans mes calculs. Sinon, nous sommes très loin du compte.

Pierre Nadeau

D’abord, il faut faire la distinction entre mégawatts, une unité de puissance, et mégawattheures (ou térawattheures), une unité qui exprime une quantité d’énergie. Si elle fonctionnait à plein régime 24 heures par jour et 365 jours par année, ce qui est toutefois irréaliste, la centrale du Petit Mécatina pourrait produire environ 10,5 térawattheures par année (1200 x 24 x 365).

Cela dit, vous avez raison, les besoins du Québec en électricité ont été estimés à 100 térawattheures pour décarboner entièrement son économie, c’est-à-dire éliminer le recours aux énergies fossiles.

C’est 50 % de plus que la capacité de production actuelle d’Hydro-Québec, et c’est pour ça qu’on dit qu’il faudra construire une demi-Hydro-Québec.

L’ajout de nouvelles centrales hydroélectriques n’est pas la seule façon d’augmenter la production d’électricité. Les éoliennes et les parcs solaires y contribueront, avec des installations de stockage qui permettent d’accumuler de l’énergie et de s’en servir selon les besoins. Déjà, Hydro-Québec est en train de doubler ses approvisionnements en énergie éolienne de 4000 mégawatts actuellement à 8000 mégawatts.

Les économies d’énergie sont aussi une mine qui a été très peu exploitée au Québec et qui peut contribuer à satisfaire une partie des besoins futurs. Il y a 25 térawattheures à récupérer là d’ici 2030, selon les plus récentes estimations d’Hydro-Québec.

Cela dit, les 100 térawattheures évoqués par le ministre Fitzgibbon représentent beaucoup d’énergie. Mais il s’agit de besoins estimés à l’horizon 2050, soit dans un peu plus de 25 ans. Ces besoins augmenteront graduellement. Bien des choses peuvent se passer d’ici là.

Les besoins peuvent évoluer et la technologie peut certainement contribuer à réduire la demande d’électricité. Il faudra peut-être construire d’autres centrales hydroélectriques, mais ce n’est pas la seule avenue possible.

La firme Dunsky Énergie estime que l’objectif d’atteindre la carboneutralité en 2050 est réalisable, avec un recours accru à l’énergie hydroélectrique, éolienne et solaire, mais aussi en misant sur l’efficacité énergétique.

C’est aussi possible que cet objectif soit trop ambitieux ou qu’il ne se réalise pas pour toutes sortes de raisons. Ce ne serait certainement pas la première fois que les objectifs à long terme fixés par un gouvernement s’avèrent impossibles à atteindre, particulièrement en matière climatique.

Lisez le rapport Trajectoires de réduction d’émissions de GES du Québec Consultez notre section « Démystifier l’économie »