Les gens d’affaires appellent Trudeau à aborder le protectionnisme américain durant la visite de Biden à Ottawa

(Ottawa) À quelques jours de la visite officielle du président des États-Unis, Joe Biden, les gens d’affaires exhortent Justin Trudeau à rappeler à son invité que le Canada doit être traité comme un partenaire commercial de première importance par Washington.

L’administration Biden continue de préconiser des politiques protectionnistes qui nuisent aux entreprises canadiennes, déplore la PDG des Manufacturiers et Exportateurs du Québec, Véronique Proulx.

Le PDG du Conseil canadien des affaires, Goldy Hyder, est du même avis. « Il faut rappeler à nos amis aux États-Unis que dans un contexte géopolitique incertain, il faut solidifier nos relations. Nous sommes des amis et des alliés. Ils doivent se rendre compte que nous sommes plus forts ensemble. Et cela comprend le Canada, les États-Unis et même le Mexique », a dit M. Hyder, qui se trouve à Washington pour un séjour de trois jours afin de sensibiliser des sénateurs américains à ce sujet.

Le président Biden effectuera une visite officielle de deux jours à Ottawa les 23 et 24 mars. Il s’agira de sa première visite officielle depuis son arrivée à la Maison-Blanche. M. Biden prononcera d’ailleurs un discours devant le Parlement le vendredi 24 mars.

Selon Véronique Proulx, le premier ministre Justin Trudeau doit rappeler au président américain que les politiques protectionnistes découlant du Buy American nuisent aux bonnes relations commerciales entre les deux pays et perturbent la chaîne d’approvisionnement du continent nord-américain.

« Il y a plusieurs mesures protectionnistes qui ont été annoncées dernièrement, notamment lors du discours sur l’état de l’Union. Le président Biden a indiqué qu’il voulait adopter de nouvelles normes pour s’assurer que les matériaux de construction utilisés dans les projets d’infrastructures fédéraux soient fabriqués aux États-Unis. En arrivant au pouvoir, il avait déjà adopté des décrets pour renforcer le Buy American Act. Il poursuit donc sur sa lancée », a souligné Mme Proulx.

La PDG des Manufacturiers et Exportateurs du Québec craint aussi les retombées de l’Inflation Reduction Act, un plan de l’administration Biden qui prévoit des investissements colossaux de quelque 370 milliards US pour revigorer le secteur manufacturier aux États-Unis et accélérer la transition vers l’énergie propre.

« Les États-Unis sont vraiment en train de penser à tous les ingrédients nécessaires pour renforcer d’une manière importante leur secteur industriel. Mais cela ne se fait pas en voyant le Canada comme un partenaire commercial de première importance. Ça doit être absolument sur la table lors de la rencontre entre le premier ministre Trudeau et le président Biden. Ça doit être une priorité dans les sujets qu’ils vont aborder », a analysé Mme Proulx.

Elle a rappelé que la chaîne d’approvisionnement sur le continent nord-américain est fortement intégrée. Mais l’administration Biden multiplie les mesures afin de favoriser les entreprises locales et de limiter l’accès aux contrats gouvernementaux pour les entreprises étrangères, y compris les entreprises canadiennes.

Pour contourner ces politiques protectionnistes, des entreprises canadiennes sont contraintes d’investir dans des usines aux États-Unis ou d’y ouvrir des locaux afin de pouvoir participer aux grands appels d’offres publics. Mme Proulx donne en exemple l’entreprise Lion Électrique, le manufacturier de véhicules lourds à zéro émission, qui a notamment ouvert une usine à Joliet, dans l’État de l’Illinois.

« Mais c’est aussi vrai dans le secteur des matériaux de construction. Il faut faire comprendre à l’administration Biden que les concurrents ne sont pas au Canada, ils sont ailleurs en Chine ou en Asie. Il faut donc travailler ensemble. Nous sommes des pays alliés. »

De nombreux dossiers sont à l’ordre du jour durant la visite officielle de M. Biden. Il doit notamment être question des liens commerciaux entre le Canada et les États-Unis et leur désir de renforcer la chaîne d’approvisionnement sur le continent afin de réduire leur dépendance envers la Chine dans les secteurs stratégiques comme les semi-conducteurs et les minéraux critiques.

La guerre en Ukraine, la lutte contre les changements climatiques ainsi que la crise des opioïdes qui sème la mort dans les deux pays sont à l’ordre du jour. La modernisation du NORAD et la défense du continent nord-américain sont aussi au menu, tout comme la crise qui secoue Haïti depuis plusieurs mois et le flux migratoire qui affecte les deux pays.