(Ottawa) Afin de réduire les pressions inflationnistes au pays, le chef du Parti conservateur, Erin O’Toole, presse le premier ministre Justin Trudeau de renoncer au plan de relance de 100 milliards de dollars sur trois ans que le gouvernement libéral a concocté dans son plus récent budget.

Dans une lettre qu’il a fait parvenir au premier ministre vendredi et que La Presse a obtenue, M. O’Toole affirme que des investissements de cette ampleur de la part d’Ottawa risquent de causer plus de dommages à l’économie étant donné que l’inflation atteint des sommets inégalés depuis près de deux décennies.

Qui plus est, cela augmentera inutilement la dette accumulée, qui a bondi de plus de 340 milliards de dollars à cause de la pandémie durant l’exercice financier 2020-2021. Le déficit anticipé pour l’exercice financier en cours, qui prend fin le 31 mars, est d’environ 154 milliards. La dette accumulée a franchi le cap des 1114 milliards de dollars durant le dernier exercice financier. Depuis que les libéraux sont arrivés au pouvoir en 2015, la dette accumulée a presque doublé. Elle s’établissait à 615 milliards de dollars en 2015-2016.

Près du tiers de la somme consacrée au plan de relance du gouvernement Trudeau (30 milliards) doit servir à créer un réseau national de garderies à 10 $ par jour d’ici 2026.

Statistique Canada a rapporté cette semaine que l’indice des prix à la consommation (IPC) avait continué d’augmenter en septembre à un rythme plus élevé que prévu. L’IPC a bondi de 4,4 % le mois dernier à rythme annualisé, soit le niveau le plus élevé en 18 ans. De nombreux économistes estiment qu’il faudra composer avec un taux élevé d’inflation pendant quelque temps encore.

Dans sa missive, le chef conservateur indique aussi que le premier ministre doit s’entretenir dans les plus brefs délais avec le président des États-Unis, Joe Biden, afin de travailler de concert à solidifier la chaîne d’approvisionnement en Amérique du Nord.

Il réclame également la reprise rapide des travaux parlementaires afin d’aborder des enjeux cruciaux tels que la reprise économique et la hausse des coûts de la vie. M. Trudeau a déjà fait savoir que les travaux parlementaires reprendraient le 22 novembre, soit deux mois après le scrutin fédéral qui a vu les électeurs élire un Parlement quasi identique au précédent.

Les propositions d’Erin O’Toole

Dans sa lettre, le chef conservateur soumet quelques propositions au premier ministre Trudeau.

« Vous devez agir de toute urgence face aux risques posés par l’inflation et maintenir le cadre de politique monétaire de la Banque du Canada sur la cible d’inflation de 1 % à 3 %. Pendant la campagne électorale, vous n’avez pas semblé vous préoccuper de la cible d’inflation, ce qui transmet un message erroné. Vous devez résister à la tentation d’inclure la croissance ou d’autres élargissements du mandat social au cadre de la Banque du Canada », affirme le chef conservateur.

« Vous devez revoir l’engagement envers un nouveau déficit additionnel de 100 milliards de dollars prévu dans le budget de 2021. Les dépenses excessives intensifient les pressions inflationnistes et entraîneront un déficit structurel plus élevé, auquel il sera impossible de répondre après la pandémie. Le directeur parlementaire du budget était déjà plutôt critique de ces dépenses de 100 milliards de dollars, les qualifiant de “ risquées ” pour nos perspectives économiques, et ce, avant l’augmentation de l’inflation et les autres risques graves pour notre économie », ajoute-t-il.

M. O’Toole invite d’ailleurs le gouvernement Trudeau à présenter une mise à jour économique et financière cet automne pour confirmer qu’il renonce à ce « déficit additionnel ».

La Chambre des communes doit vite reprendre ses travaux afin de tenir une session automnale sérieuse à la suite de l’élection. De nombreuses provinces préparent des énoncés économiques de l’automne afin d’offrir à leurs citoyens une évaluation transparente de l’état de leur économie, alors que le Parlement fédéral aura à peine le temps de débattre du discours du Trône.

Erin O’Toole, chef du Parti conservateur du Canada

Dans sa lettre, M. O’Toole presse également M. Trudeau de mettre fin progressivement à tous les programmes d’urgence qui ont été instaurés pour soutenir les familles, les travailleurs et les entreprises durant la pandémie de COVID-19.

Jeudi, M. Trudeau et la ministre des Finances, Chrystia Freeland, ont annoncé une refonte des programmes d’aide aux entreprises et aux individus afin de les limiter aux secteurs les plus durement touchés par la crise sanitaire, comme le tourisme, la restauration et l’hébergement.

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« Notre économie est en train de rebondir, et nous sommes en train de gagner le combat contre la COVID », a soutenu Mme Freeland, soulignant à grands traits que le pays a maintenant retrouvé le niveau d’emplois qu’on observait avant la pandémie.