Montréal espère retrouver la moitié des visiteurs d’avant la pandémie dès la prochaine saison

L’annonce jeudi de la levée de l’interdiction des croisières internationales dès le 1er novembre prochain a fait souffler un vent d’optimisme dans les neuf ports québécois, notamment à Québec et à Montréal, les deux plus importantes escales.

Le ministre fédéral des Transports, Omar Alghabra, a en fait devancé de trois mois cette levée d’interdiction, qui avait été initialement imposée en février dernier pour une durée d’un an. « Là, on lance le message qu’on va être prêts en 2022 », dit René Trépanier, directeur général de Croisières du Saint-Laurent, une association regroupant neuf escales sur le fleuve.

Alors que les croisières internationales ont repris sous haute surveillance dans de nombreux pays, notamment en Europe et aux États-Unis, « on était dans un no man’s land, le Canada est un peu en retard à confirmer qu’on est prêts à repartir », déplore M. Trépanier.

Jusqu’à 48 000 touristes

Selon les statistiques de cette association, les croisières internationales ont des retombées directes et indirectes de 711 millions associées à quelque 5000 emplois au Québec. À l’échelle du Canada, selon Ottawa, il s’agirait de 4 milliards et de 30 000 emplois directs et indirects.

À Montréal, on estime que les 80 311 passagers reçus en 2019 ont injecté 30 millions directement dans le secteur touristique, notamment en nuitées et en dépenses au restaurant, indique Yves Gilson, directeur marketing et croisières au Port de Montréal. Des 16 entreprises qui ont fait 60 escales, 13 ont annoncé leur retour en 2022 pour 36 escales.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Vue du centre-ville de Montréal depuis le pont du navire de croisière MV Viking Sea, lors de son passage en 2018

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, l’organisation de la saison 2022 est déjà bien avancée, si on se fie aux réservations des sociétés.

Selon nos prévisions, pour la saison prochaine, on recevra entre 37 500 et 48 000 passagers [selon le taux d’occupation établi par les sociétés]. On a bon espoir de reprendre notre essor, une cinquantaine de navires en construction pourraient venir à Montréal dans les cinq prochaines années.

Yves Gilson, directeur marketing et croisières au Port de Montréal

La métropole québécoise suscite toujours beaucoup d’intérêt pour ces croisières et bénéficie d’une excellente réputation sur le plan international, note M. Gilson. On s’y spécialise dans les paquebots de taille moyenne, accueillant environ 1400 passagers, ainsi que dans les plus petits, de 400 à 800 passagers, mais hyperluxueux. Trois paquebots peuvent être accueillis en même temps, deux dans le Vieux-Port et un dans un site nouvellement aménagé à l’est du pont Jacques-Cartier.

« Les très gros navires de 5000 ou 7000 passagers ne viendront jamais à Montréal parce qu’il y a des ponts depuis Québec, ce n’est pas notre marché, précise M. Gilson. On ne souffrira pas de surtourisme comme dans certaines villes européennes. »

Montrer patte blanche

À Québec, on ne dispose pas encore des statistiques préliminaires pour la saison 2022. Dans la capitale nationale, il y a presque trois fois plus de visiteurs qu’à Montréal. En 2019, 230 000 visiteurs y ont été accueillis pour 154 escales. « Nous, on est un port d’embarquement et de débarquement aussi, on reçoit les navires de Montréal deux fois et on a des gabarits de ponts différents, explique Nancy Houley, directrice développement des croisières à l’Administration portuaire de Québec. Jusqu’à Québec, il n’y a pas de limite de hauteur. »

Elle pense qu’il est « un peu tôt » pour estimer le nombre de visiteurs en 2022, avec la pandémie qui est loin d’être terminée.

Oui, on a des réservations, mais avec les nouvelles lois, on ne sait pas quel sera le taux de remplissage des navires. Ça prend également des lignes aériennes. On ne peut prédire, mais on fait tout pour avoir du succès… de façon sécuritaire.

Nancy Houley, directrice développement des croisières à l’Administration portuaire de Québec

Jeudi, le ministre Omar Alghabra n’avait guère donné de précisions concernant les mesures sanitaires, se contentant de demander aux sociétés de « se conformer entièrement aux exigences en matière de santé publique ». Les pratiques varient en fait d’un pays et d’un exploitant à l’autre, note Yves Gilson au Port de Montréal. « Il y a des compagnies qui n’acceptent que ceux qui ont eu deux vaccins, d’autres un minimum de 95 % de gens doublement vaccinés, mais avec le port du masque pour ceux qui ne le sont pas. »

Considérés au printemps 2020 comme le symbole de la pandémie, les croisiéristes ont dû montrer patte blanche pour reprendre leurs activités, précise René Trépanier. « On a établi des protocoles en 80 points, on a imposé des conditions sévères, mais au moins, c’est reparti. »