(Pékin) L’économie chinoise pourrait avoir encore ralenti au premier trimestre, en dépit des efforts de stabilisation de la conjoncture engagés par Pékin, selon des experts sondés par l’AFP.

Le chiffre officiel sera publié mercredi, de concert avec une salve de statistiques mensuelles.

D’après la prévision médiane de 12 analystes, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de la Chine devrait s’établir à 6,3 % sur un an sur la période janvier-mars, après 6,4 % au 4e trimestre 2018 – son plus faible niveau depuis 2009.

Et « il est peu probable qu’une forte reprise économique se produise cette année », prévient le cabinet Capital Economics.

L’an dernier, la croissance chinoise a connu un fort ralentissement, dans un contexte d’efforts de désendettement des autorités, de demande intérieure en baisse, mais aussi de tensions commerciales avec l’administration Trump.

Ce bras de fer, qui s’est matérialisé par des droits de douane punitifs réciproques sur des centaines de milliards de dollars de marchandises, a entamé la confiance des marchés et pénalisé l’économie chinoise en fin d’année. En décembre, les exportations chinoises ont plongé de 4,4 %.

Prêts aux petites entreprises

Pour soutenir l’économie, Pékin s’est engagé en mars à baisser de près de 2000 milliards de yuans (265 milliards d’euros) la pression fiscale et sociale sur les entreprises.  

Mais « une baisse d’impôts n’a pas systématiquement d’impact sur l’économie », prévient Björn Giesbergen, économiste chez RaboResearch.

D’autant que ces mesures fiscales sont « moins importantes » que celles déployées lors des précédents ralentissements, selon l’économiste Mark Williams, du cabinet Capital Economics, et ont par conséquent « peu de chances » de contribuer à un rebond significatif de l’économie.  

Les banques ont également été encouragées à gonfler leurs prêts aux petites entreprises, jusque-là délaissées au profit des grands groupes publics.

Sur ce point, les premiers effets de la politique accommodante ont commencé à se faire sentir. Il y a eu « une forte impulsion du crédit » en janvier, relève Raymond Yeung, analyste de la banque ANZ.  

Les prêts bancaires ont bondi sur la période janvier-février (+10,9 % sur un an) alors que « les niveaux d’endettement de la Chine sont déjà excessifs », s’alarme Björn Giesbergen.

Cependant, « les investissements donneront un nouvel élan à partir du deuxième trimestre », assure M. Yeung.

Épée de Damoclès

L’immobilier, pilier de la croissance chinoise, affiche « une certaine résistance malgré un ralentissement des ventes », constate l’économiste Liu Ligang, de la banque Citigroup.

De même, la consommation s’est « largement maintenue malgré un contexte extérieur difficile », souligne M. Liu. Cela semble traduire une certaine stabilisation de l’économie.

La reprise reste toutefois fragile. Vendredi, les Douanes ont annoncé un nouveau repli des importations en mars (-7,6 %), signe d’un affaiblissement de la demande intérieure.

Le taux de chômage, dont les chiffres officiels sont pourtant traités avec précaution, confirme une dégradation du marché de l’emploi, bondissant à 5,3 % en février (contre 4,9 % en décembre).

L’incertitude autour de la guerre commerciale a pesé, bien que Pékin et Washington aient multiplié ces dernières semaines pourparlers et annonces rassurantes sur l’imminence d’un accord.

Mais même après la signature d’un accord, « bon nombre des droits de douane déjà en vigueur resteront en place », relativise Björn Giesbergen.

L’administration Trump souhaiterait conserver l’épée de Damoclès des sanctions commerciales pour s’assurer que les mesures conclues avec la Chine soient bien appliquées.

« Bien qu’un accord commercial puisse être à portée de main, une paix définitive reste une perspective plus lointaine », tranche l’économiste Jamie Thompson, chez Oxford Economics.

Le Fonds monétaire international semble toutefois un peu plus optimiste et a relevé la semaine dernière sa prévision de croissance à 6,3 % pour la Chine en 2019, contre 6,2 % selon sa précédente estimation.

Le gouvernement chinois a annoncé un objectif de croissance compris entre 6 % et 6,5 % pour l’ensemble de l’année, après les 6,6 % enregistrés en 2018. Il s’agissait du score le plus bas depuis 28 ans.