Le promoteur du projet de gazoduc souhaitant acheminer du gaz naturel albertain vers le Saguenay à compter de 2024 n'a pas tardé à s'activer sur le terrain en retenant les services de plusieurs lobbyistes depuis un mois.

Au Registre des lobbyistes, La Presse canadienne a constaté qu'au moins quatre mandats avaient été confiés à des lobbyistes-conseils au nom de Gazoduq. La plus récente inscription a été publiée pas plus tard que cette semaine. En plus de ces lobbyistes, six représentants de l'entreprise peuvent également effectuer des représentations auprès de différents ministères, villes et autres organisations dans le but de faire avancer ce projet.

Alors que Gazoduq affirme que cette démarche s'inscrit dans un « souci de transparence », les écologistes ont une interprétation différente et estiment que le promoteur va un peu vite étant donné que l'étude d'impact n'a pas encore été réalisée.

« Il me semble raisonnable que, lorsque l'on fait appel à un consultant pour nous aider [...], d'être transparent, a expliqué la directrice des affaires publiques et des relations avec les communautés de la compagnie, Marie-Christine Demers. Nous ne voulons pas nous faire reprocher d'avoir caché une rencontre. »

Dévoilé en novembre, le projet Énergie Saguenay propose la construction d'une conduite souterraine de 750 kilomètres, ce qui serait piloté par Gazoduq, ainsi qu'une usine de liquéfaction et un terminal maritime d'exportation, exploités par GNL Québec.

Selon les inscriptions au Registre des lobbyistes, les nombreuses rencontres, communications écrites et appels téléphoniques visent principalement à faciliter l'obtention de « toutes les autorisations et permis requis afin de compléter le projet » estimé à 14 milliards.

À l'heure actuelle, c'est à Nicole Perrault que le mandat le plus large a été confié, puisqu'elle recevra entre 50 000 $ et 100 000 $ pour ses services. Son inscription fait mention de représentations auprès de ministères comme ceux de l'Énergie et des Ressources naturelles, de l'Économie et de l'Innovation et des Finances.

Toutefois, en fin de journée, vendredi, Mme Demers a précisé qu'il y avait eu une erreur faite par Mme Perrault, ajoutant que son mandat n'incluait pas les différents ministères et que l'inscription serait prochainement mise à jour.

En ce qui a trait aux autres lobbyistes retenus par Gazoduq, leur rémunération oscillera entre 10 000 $ et 50 000 $. Il pourrait également y avoir d'autres inscriptions au registre, a dit l'entreprise.

Mme Demers a reconnu que le recours au lobbyisme pourrait être perçu par certains comme une tentative de faire pression auprès des différentes instances afin d'accélérer le processus d'approbation.

« La démarche peut donner cette perception, a-t-elle dit. Ce n'est évidemment pas notre objectif. Mais à moins d'avis contraire, je crois que nous allons continuer d'avoir la même approche. »

Des groupes écologistes ainsi que les partis d'opposition à l'Assemblée nationale souhaitent une évaluation globale du projet qui tiendrait compte des impacts du gazoduc, de l'usine et du terminal. Tout indique que les facettes du projet seront toutefois évaluées de façon distincte par Québec et Ottawa.

Le porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin, a estimé que la démarche de Gazoduq en matière de lobbyisme était « problématique », étant donné qu'il n'y avait toujours pas d'étude d'impact sur le projet.

« Cela ressemble à une stratégie visant à aller chercher l'appui d'un gouvernement (du Québec) qui s'est dit intéressé à ce projet alors que nous n'avons pas encore tous les détails », a-t-il dit au cours d'un entretien téléphonique.

À son avis, la seule façon d'aller « au fond des choses » sera d'évaluer des « documents officiels » qui auront été « déposés et évalués », ce qui n'a pas encore été fait.

Mme Demers a précisé que les mandats de lobbyisme n'avaient pas tous la même portée et que certaines inscriptions étaient directement liées aux démarches de l'entreprise sur le terrain dans le cadre de ses consultations.

Le ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques devrait prochainement donner ses directives pour la réalisation de l'étude d'impact sur l'environnement. Vendredi après-midi, le ministère n'avait pas répondu aux messages et courriels envoyés par La Presse canadienne sur cette question.