Oui, le gouvernement Trudeau a demandé au CRTC d'exiger des chaînes télé des garanties supplémentaires pour la production d'émissions originales francophones. Mais ce n'est pas tout : Ottawa veut aussi que l'organisme réglementaire réévalue sa décision d'abolir un financement d'environ un million de dollars pour les vidéoclips québécois.

« Nous sommes heureux que le gouvernement Trudeau ait eu une oreille attentive, nous avons senti rapidement une compréhension du problème. Dans le dossier du financement des vidéoclips, le CRTC l'a échappé », dit Solange Drouin, directrice générale de l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ), qui avait demandé au gouvernement Trudeau une révision de la décision du CRTC.

Dans sa décision de mai dernier sur les licences de MusiquePlus et Max (anciennement MusiMax), le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a décidé que les deux chaînes de télé n'avaient plus à contribuer à même leurs revenus au Fonds Remstar, qui finançait des vidéoclips québécois à hauteur d'environ un million de dollars par an.

Ce fonds représentait environ 60 % de toutes les sommes publiques destinées aux vidéoclips québécois, les 40 % restants provenant de Québec et d'Ottawa.

Sans ce financement d'un million par an, le vidéoclip québécois aurait de sérieuses difficultés à se financer, selon l'ADISQ. Mais Ottawa a demandé au CRTC de réexaminer les conditions de licence des chaînes télé pour s'assurer qu'elles « contribuent de façon notable à la création et à la présentation [...] d'émissions de musique ».

L'ADISQ ne demandera pas que MusiquePlus et Max, propriété de Groupe V Média, reprennent leurs cotisations au Fonds Remstar, ni que les deux chaînes diffusent un seuil de vidéoclips. L'ADISQ suggérera plutôt que l'industrie de la télé dans son ensemble finance les vidéoclips à hauteur d'un million de dollars. L'ADISQ suggérera probablement de verser ce million de dollars par le truchement des contributions des distributeurs au contenu télé - les distributeurs doivent consacrer 5 % de leurs revenus au contenu télé, que ce soit par l'intermédiaire des fonds privés (comme le Fonds Québecor), du Fonds des médias du Canada ou des télés communautaires.

« Le financement des vidéoclips deviendrait la responsabilité de l'ensemble des câblodistributeurs. Nous aurions accès à une source [de financement] plus horizontale, comme les dramatiques et les documentaires qui sont financés avec les autres fonds », dit Solange Drouin, de l'ADISQ, qui présentera un plan précis au CRTC aux futures audiences sur les licences télé. Selon l'ADISQ, un vidéoclip québécois coûte environ 20 000 $ à produire, et le Fonds Remstar en finançait une soixantaine par an.

PAS DE NOUVELLES DEMANDES POUR MUSIQUEPLUS

Il y a un an, dans le cadre du processus ayant mené aux décisions du CRTC en mai dernier, l'ADISQ demandait que MusiquePlus conserve des conditions de licence liées à la diffusion de musique. Mais en 2015, le CRTC a choisi d'abolir la protection des genres dans les chaînes spécialisées, ce qui n'oblige plus MusiquePlus à diffuser de la musique, mais qui permet à d'autres chaînes d'en diffuser. Par conséquent, le CRTC a aboli les conditions de licence musicales de MusiquePlus et Max.

Cette fois-ci, l'ADISQ ne demandera pas d'imposer à MusiquePlus des conditions de licence musicales.

« Malheureusement, on ne peut pas aller à l'encontre de [la protection des genres] qui a été abolie par le CRTC. On était contre, mais là, on ne la conteste pas [dans ce cadre]. »

- Solange Drouin, directrice générale de l'ADISQ

NOUVELLES CHAÎNES DE VIDÉOCLIPS DE STINGRAY

Alors que MusiquePlus peut diffuser moins de musique, l'entreprise montréalaise Stingray a acheté des licences télé et lancé quatre chaînes anglophones de vidéoclips au début de l'été (Stingray Retro, Stingray Vibe, Stingray Loud et Stingray Juicebox). D'ici l'automne, Stingray veut lancer deux chaînes francophones de vidéoclips.

« Le côté positif [de l'abolition de la protection des genres], c'est que tout le monde peut faire des émissions de musique. Si l'ensemble du système peut en faire, on devrait avoir accès aux autres sources [de financement de l'ensemble du système] », dit Solange Drouin.