Tout le gratin de l'industrie québécoise du jeu vidéo est réuni aujourd'hui et demain au Sommet international du jeu de Montréal. En première partie de notre série de reportages: la révolution du jeu en ligne chez Ludia, qui abandonne la distribution de jeux en boîte dans les magasins.

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Chez Ludia, la révolution du jeu vidéo en ligne et social sera bientôt complète: le studio montréalais, qui produit les jeux Où est Charlie, Price Is Right et Who Wants To Be A Millionaire, abandonnera la distribution de jeux en boîte vendus en magasin. Ludia vendra uniquement ses jeux en ligne et sur les réseaux sociaux. Une stratégie qui devrait faire doubler le chiffre d'affaires et nécessitera l'embauche de 100 employés en 2012.

«Les ventes en magasin n'étaient pas un segment d'affaires en croissance chez nous. Nous croyons que nous seront plus aptes à répliquer nos succès sur les plateformes mobiles et sociales», dit Alexandre Thabet, PDG de Ludia, qui a vu ses ventes en magasin passer de 70% de son chiffre d'affaires en 2009 à 50% en 2010 et à seulement 30% en 2011.

Ludia continuera d'offrir ses jeux sur console, mais seulement celles qui offrent le téléchargement en ligne. «Les prochaines générations de consoles vont devoir s'adapter au succès de l'iPad et de Facebook», croit Alexandre Thabet, qui avait auparavant des ententes de distribution avec Ubisoft et Warner Brothers pour ses jeux en magasin.

Malgré l'abandon des ventes en magasin, Ludia prévoit doubler son chiffre d'affaires de 15 à 30 millions de dollars en 2012 grâce à une vingtaine de nouveaux jeux. Parmi les nouveautés qui s'ajouteront aux succès de Où est Charlie?, Price Is Right et la Guerre des clans (Family Feud): un jeu sur le Parc Jurassique dont le lancement sera rendu possible grâce à une entente avec Universal Pictures annoncée la semaine dernière.

Ludia fera aussi son entrée en 2012 dans l'environnement Google: le studio montréalais lancera ses premiers jeux sur la plateforme de téléphones portables Android de Google ainsi que sur le réseau social Google", qui compte 40 millions de membres trois mois après son inauguration.

Pour mener tous ces projets à terme, Ludia aura besoin de 100 nouveaux employés en 2012 pour atteindre un effectif de 250 personnes. Un défi ambitieux sur le marché de l'emploi déjà saturé de l'industrie montréalaise du jeu vidéo. Cette année, Alexandre Thabet voulait passer de 120 à 170 employés, mais il a dû se contenter de 150. «Nous avons eu de la difficulté à recruter», dit-il.

La popularité des jeux en ligne et des jeux sociaux, la spécialité de Ludia, n'aide en rien le processus de recrutement de la PME du Vieux-Montréal. «Comme nous étions parmi les premiers à produire ce type de jeux, les autres studios s'intéressent de plus en plus à nos employés, dit Alexandre Thabet. En conséquence, nos salaires ont augmenté en moyenne de 10% cette année et ils continueront d'augmenter au cours des prochaines années.»

Alexandre Thabet a tout de même bon espoir de trouver une centaine de recrues prêtes à joindre les rangs de Ludia l'an prochain. C'est qu'au contraire des studios plus traditionnels, il peut piger à l'extérieur de l'industrie du jeu vidéo. «Nous pouvons aussi recruter des gens qui ont de l'expérience dans le développement web et des jeunes qui sortent de l'école, dit-il. Comme nos jeux sont plus simples, nous sommes capables de travailler plus facilement avec de récents diplômés. Nous sommes une belle porte d'entrée pour eux dans l'industrie, car nos jeux ne demandent en moyenne que neuf mois de développement, comparativement à trois ou quatre ans pour certains jeux à grand déploiement.»

Fondée en 2007 par Alexandre Thabet et ses associés québécois, Ludia a été rachetée en 2010 par l'entreprise britannique FreemantleMedia, plus grand producteur de télé au monde qui est à l'origine des succès d'American Idol et The Price Is Right. La transaction doit notamment aider Ludia, dont les bureaux sont situés dans le Vieux-Montréal, à s'implanter en Europe et en Asie.