Le département de communication et journalisme du pavillon Loyola de l'Université Concordia respire le neuf, mais certains couloirs font écho au passé depuis qu'on y a installé des enseignes de commerces qui ont rendu l'âme. Depuis quelques mois, on ne lève en effet plus la tête pour voir les enseignes des Warshaw, Ben's, Monkland Tavern et Monsieur Hot Dog.

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Le professeur Matt Soar, la société Enseignes Transworld et des étudiants les ont dépoussiérées, restaurées et disposées à la hauteur des yeux. Elles ont officiellement été dévoilées samedi lors des célébrations du 45e anniversaire du département de communication de Concordia, à Notre-Dame-de-Grâce. «Ces enseignes évoquent diverses histoires de Montréal, celle des syndicats, de la multiethnicité de la ville, de son architecture», souligne Matt Soar, professeur associé en études des communications à l'Université Concordia.

Pour Bill Kovacevic d'Enseignes Transworld, elles symbolisent d'abord une époque révolue. «Quand je suis arrivé à Montréal en 1951, à l'âge de 7 ans, le centre-ville m'a ébloui, raconte le vice-président, recherche et développement de produit. Il y avait toutes ces enseignes rue Sainte-Catherine, ces marquises de lumière. Elles étaient une façon pour les propriétaires de manifester leur fierté. C'était vraiment impressionnant. On ne voit plus ça aujourd'hui. Ce type d'enseignes disparaît au fur et à mesure que les commerces et leur campagne d'image de marque changent.

«En 2007, on a pleuré la disparition du Spectrum de Montréal, ajoute Bill Kovacevic. Moi, c'est lorsqu'on a enlevé l'enseigne du défunt Cinéma Alouette, à la même adresse, que j'ai pleuré.»

Le plastique (abordable au milieu du XXe siècle), les lettres découpées à la main, le lettrage «bâtard» et l'éclairage au néon ont fait place avec les années à d'autres matériaux et techniques de conception. «Avant, il n'y avait pas de réglementation, raconte Bill Kovacevic. Aujourd'hui, l'enseigne de Warshaw, par exemple, ne serait pas acceptée comme telle. Ces lettres de quatre pieds de haut sont trop grosses et trop larges. Comme le boulevard Saint-Laurent (lieu du commerce jusqu'à sa fermeture en décembre 2002) était relativement étroit, en perspective, on obtenait une compression visuelle.»

Devant toutes les enseignes, exposées à différents étages du pavillon de Concordia, Bill Kovacevic explique dans le détail les méthodes de fabrication et les retouches apportées. Il n'était pas question de donner un vrai coup de jeune à ces vestiges qui prennent habituellement le chemin de la poubelle. «Pour celle de la Monkland Tavern, dont les lettres attachées sont façonnées en métal galvanisé, on a posé une petite plaque sous l'enseigne, mis de la bonne colle époxy et de la bonne peinture. On n'a pas voulu enlever son cachet d'antan ni la remettre à neuf pour ne pas altérer son âge (environ 70 ans).»

Pour l'instant, cinq enseignes décorent les murs du pavillon de l'Université et peu de renseignements enrichissent les installations. Ça viendra, promet Matt Soar qui nous dirige vers le site internet https://enseignes.concordia.ca pour capter l'essence de cette initiative. «Nous voulons maintenant que les gens nous en apprennent davantage sur ces enseignes, dit Matt Soar. Nous voulons aussi en récupérer d'autres, des enseignes qu'on pense détruire ou qui vont se perdre.»