À neuf jours de l'échéance du 11 décembre, le suspense dure à propos des chances de survie du projet d'achat de BCE (T.BCE) par le fonds torontois Teachers' et ses partenaires américains.

À neuf jours de l'échéance du 11 décembre, le suspense dure à propos des chances de survie du projet d'achat de BCE [[|ticker sym='T.BCE'|]] par le fonds torontois Teachers' et ses partenaires américains.

Mais en attendant le prochain geste du conseil d'administration de BCE, les nombreux actionnaires de l'entreprise, eux, continuent de voir la valeur marchande de leurs titres rapetisser à vue d'oeil depuis l'avis d'insolvabilité émis la semaine dernière par la firme comptable KPMG.

Après une autre rechute de 7,5%, à 23,06$ hier, à la Bourse de Toronto, les actions de BCE cotent maintenant à leur prix le plus bas depuis la fin d'avril 2004.

Pire, cette cote se situe désormais tout près de la moitié de l'offre de 42,75$ l'action convenue entre BCE et le groupe de Teachers'.

Cette différence représente un énorme manque à gagner de 16 milliards de dollars pour les actionnaires de BCE qui espéraient le pactole de l'offre de Teachers'.

De l'avis d'analyses, un tel écart s'avère désormais un gouffre insurmontable pour la survie de la transaction convenue il y a un an. Et plusieurs fois retardée au fil des défis financiers et juridiques, jusqu'en Cour suprême avec les détenteurs d'obligations de BCE.

N'empêche, des analystes n'écartent pas la possibilité d'une "résurrection" de l'offre avec un prix révisé à la baisse, d'un commun accord entre BCE et Teachers'.

Encore hier, certains suggéraient qu'un prix abaissé autour de 35$ l'action de BCE retrancherait environ 6 milliards au coût de l'acquisition.

Assez, semble-t-il, pour renverser favorablement l'avis de la firme comptable KPMG sur le risque d'insolvabilité de BCE après son rachat par endettement.

Un tel avis favorable de solvabilité de BCE, faut-il rappeler, est l'une des conditions de la transaction convenue avec Teachers' et ses partenaires.

Mais pour le moment, autant BCE que Teachers' préfèrent ignorer la possibilité d'un prix renégocié à la baisse.

«Nous n'avons pas de commentaires sur toutes les spéculations qui circulent. Nous communiquerons l'information pertinente pour les actionnaires en temps et lieu», a indiqué Jacques Bouchard, porte-parole au siège social de BCE, à Montréal.

Au siège de Teachers', à Toronto, «pas de commentaires additionnels» à la suite des brefs propos émis la semaine dernière après l'avis défavorable de KPMG.

Il faut dire que, de l'avis de spécialistes en fusions et acquisitions (F&A), la négociation d'un nouveau prix de transaction entre BCE et le groupe de Teachers' pourrait s'avérer une véritable boîte de Pandore.

«Les étapes à franchir sont telles que ça serait presque l'équivalent de repartir à neuf avec cette offre déjà très complexe. Et ce, même si on pourrait procéder plus rapidement que la première fois», a résumé Nicolas Marcoux, directeur en F&A chez la firme PricewaterhouseCoopers, à Montréal.

Entre autres, une modification majeure à une offre d'achat telle que le prix offert par action obligerait la tenue d'une autre assemblée extraordinaire d'approbation par les actionnaires.

En plus, pour démontrer à ces derniers que le nouveau prix révisé est le meilleur possible, le conseil d'administration de BCE serait sans doute tenté de procéder à une nouvelle sollicitation publique d'offres.

Et qui sait, peut-être que d'autres acheteurs que Teachers' et son groupe, comme la société Telus, l'un des principaux concurrents de BCE, pourraient se mettre en ligne.

Mais dans l'immédiat, c'est l'état des relations entre les hauts dirigeants de Teachers' et de BCE qui pourrait décider de la survie ou non de leur transaction, même modifiée.

Selon les dernières rumeurs dans le milieu juridique et financier, BCE, Teachers' et ses partenaires d'achat seraient déjà en dispute sur le sort des "frais de rupture" de leur transaction.

L'enjeu monétaire est considérable, de l'ordre de plusieurs centaines de millions de dollars.

Selon leur entente actuelle, Teachers' et ses partenaires devraient débourser 1,2 milliard en dédommagement à BCE s'ils sont tenus responsables de l'échec de l'offre d'achat.

En contrepartie, BCE devrait débourser 800 millions au groupe mené par Teachers' si cet échec découlait de sa propre faute.

D'ailleurs, BCE a déjà déboursé pour 214 millions en frais directs liés à la préparation de la transaction avec Teachers', selon ses plus récents états financiers.

Toutefois, ce montant exclut les frais spéciaux de restructuration subis par BCE et sa filiale Bell Canada depuis deux trimestres, qui comprennent le licenciement de centaines de cadres.

Ces frais découlent de la réforme accélérée de la gestion amorcée par le nouveau chef de direction de BCE, George Cope, nommé en juillet à l'instigation de Teachers'.