En collaboration avec HEC Montréal, nous reprenons cette semaine notre chronique hebdomadaire sur les défis auxquels font face les entreprises au plan de la gestion.

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Le virage ambulatoire amorcé au Québec au milieu des années 90 s'inscrit dans une perspective de désinstitutionnalisation et dans une orientation sociétale de maintien à domicile des personnes malades.

On maintient les patients à domicile en invoquant les coûts prohibitifs liés à l'hospitalisation, mais aussi en soulignant le désir des personnes âgées de vieillir à la maison.

En fait, le Québec constitue l'un des meneurs dans les soins à domicile au Canada selon une étude menée en 2007 par l'Institut canadien d'information sur la santé.

La demande croissante pour ce type de soins, associée notamment au vieillissement de la population, ne peut toutefois pas être satisfaite dans un contexte où les effectifs infirmiers sont nettement insuffisants. À cet égard, le ministère de la Santé et des Services sociaux estime qu'il manque actuellement plus de 3000 infirmières au Québec et que la pénurie devrait atteindre 7300 infirmières en 2012 et 23 000 infirmières en 2022.

Un rappel

Selon le rapport du groupe de travail sur le financement du système de santé présidé par Claude Castonguay, une utilisation appropriée et plus généralisée des technologies de l'information (TI), dont le dossier patient électronique, serait susceptible d'améliorer l'efficacité globale du système de santé et la productivité du personnel soignant.

C'est ce qu'a tenté de démontrer la direction du CLSC Vallée-des-Forts situé à Saint-Jean-sur-Richelieu avec le déploiement du logiciel SyMO au sein de son unité d'oncologie et de soins palliatifs.

SyMO, un produit de la firme québécoise PG Documex, vise à optimiser le processus clinique consacré aux activités de soutien à domicile. Le logiciel permet aux infirmières d'inscrire à la source, soit lors des visites, les renseignements cliniques pertinents concernant l'état de santé de leurs patients et par le fait même la diffusion instantanée de ces renseignements aux autres infirmières de l'unité assurant ainsi une meilleure continuité des soins. SyMO gère entre autres les plans de soins, le "Case Load" du personnel infirmier, les horaires des visites à domicile ainsi que les parcours à suivre à l'aide de cartes routières.

Le logiciel génère divers formulaires électroniques préremplis, ce qui permet d'éliminer la retranscription d'informations par les infirmières.

En juin 2007, chacune des sept infirmières de l'unité de soins fut munie d'un ordinateur portable contenant le logiciel SyMO.

Les objectifs visés

Les principaux objectifs visés dans le cadre de ce projet étaient au nombre de trois, soit: augmenter le nombre de visites à domicile par infirmière, accroître le temps consacré aux soins directs aux patients et diminuer celui passé à documenter et à retranscrire les mêmes informations sur divers formulaires.

Une étude menée à la Chaire de recherche du Canada en TI dans le secteur de la santé à HEC Montréal a permis de vérifier l'étendue des bénéfices associés à ce projet.

Les effets ont été mesurés lors de deux périodes de quatre semaines ayant eu lieu quatre mois avant et huit mois après le déploiement du progiciel.

Les résultats indiquent que, en contrôlant le nombre total de jours travaillés par le personnel infirmier, le nombre de visites à domicile a augmenté de 18% suite au recours au nouveau système informatisé.

Plus concrètement, cela signifie que les infirmières de l'unité d'oncologie et de soins palliatifs ont effectué 65 visites à domicile de plus par mois.

Si la tendance se maintien, on peut alors anticiper un total de 780 visites à domicile de plus au cours des 12 prochains mois, et ce, en ayant recours à aucune ressource infirmière additionnelle.

Non seulement le nombre de visites à domicile a-t-il augmenté, mais la durée moyenne de chaque visite s'est elle aussi accrue.

Une heure de plus par quart de travail

Au total, le temps consacré aux soins directs aux patients est passé de 43% à 57%, représentant une heure de plus par quart de travail par infirmière. Enfin, le temps consacré à la documentation a chuté d'environ une une heure par jour, notamment en raison de la rapidité de saisie des données dans SyMO et de l'élimination de la retranscription d'informations.

Bref, l'expérience du CLSC Vallée-des-Forts permet de conclure qu'il est possible, grâce au recours aux technologies de l'information, d'améliorer de manière significative la performance du système de santé.

Mais pour les infirmières et les autorités du CLSC, la réussite de ce projet va bien au-delà du seul critère de la productivité. En effet, les bénéfices se situent également au plan de la qualité et de la continuité des soins offerts aux patients.

L'auteur, Guy Paré, Ph.D. est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en TI dans le secteur de la santé à HEC Montréal

https://neumann.hec.ca/chairetisante/