Deux ans après le tsunami dans la province indonésienne d'Aceh, le micro-crédit aide des milliers d'habitants, surtout des femmes, à recommencer leur vie.

Deux ans après le tsunami dans la province indonésienne d'Aceh, le micro-crédit aide des milliers d'habitants, surtout des femmes, à recommencer leur vie.

Le promoteur de ce concept, le Bangladais Muhammad Yunus, surnommé le «banquier des pauvres» et prix Nobel de la paix 2006, est pourtant méconnu dans le nord de Sumatra, tout comme l'est sa banque Grameen.

Dans le village de Lam Kuta, dévasté par le raz-de-marée du 26 décembre 2004, des petits commerces repartent grâce à de modestes prêts sans intérêt.

Salmia, 36 ans, écosse des haricots dans la cuisine exiguë de sa maison récemment reconstruite par une organisation humanitaire.

Grâce à deux emprunts d'un million de roupies (110 dollars chacun) souscrits auprès d'un groupement de femmes du village pour confectionner et vendre des gâteaux, les revenus de l'assistante maternelle ont presque doublé.

«J'ai acheté des poêles, un batteur et tout ce dont j'avais besoin», dit-elle, montrant les ustensiles empilés sur le sol.

Chaque soir Salmia confectionne des beignets ou des gâteaux au manioc et les dépose dans les étals voisins le lendemain matin. «Je récupère l'argent le soir. Je fais environ 500 000 roupies par mois (55 $)», sourit-elle, satisfaite.

De l'autre côté de la rue, quand le tsunami a emporté son mari, l'un de ses dix enfants et anéanti la petite entreprise de construction de puits de la famille, Abida, 50 ans, a dû recommencer à zéro, seule avec 9 enfants.

«Je n'avais pas l'argent pour racheter du sable, du ciment et les moules pour faire les buses», dit-elle, ajoutant qu'«avec tous ces enfants, il faut continuer a avancer».

Aussi, il y a un an, Abida a rejoint 9 autres femmes du village à l'invitation de Triangle génération humanitaire.

Cette ONG française a apporté un capital de 75 000 euros (114 000 $ CAN) réparti sur 9 groupes de 10 personnes qui déposent chacune 50 centimes par semaine dans une cagnotte.

«L'idée était non seulement d'aider à relancer l'économie locale mais aussi de reformer les liens sociaux rompus lors du tsunami», explique Abel Bové, le chef du projet.

Chaque semaine un membre tiré au sort remporte la cagnotte, et, plus important, l'un d'entre eux peut demander au chef du groupe un prêt de 200 $ maximum.

Grâce aux nombreuses maisons à reconstruire dans son village sinistré, Abida a relancé l'entreprise de son mari et emploie aujourd'hui deux ouvriers.

Selon Abel Bové, les bénéficiaires ont remboursé leurs emprunts, motivés par la pression morale et la confiance mutuelle mais les femmes sont plus fiables que les hommes, estime-t-il.

S.M. Ahsan Habib, responsable de la Fondation Grameen à Aceh qui espère aider 25 000 personnes d'ici à 2009 avec le micro-crédit, admet que «si l'on donne l'argent aux hommes, ils le dépensent au café ou en cigarettes».

Les principes de la loi islamique ou charia sont graduellement appliqués dans la province d'Aceh, y compris dans les petites banques rurales où l'on ne pratique pas de taux d'intérêt, contraires à la religion musulmane, mais un système de partage des profits entre créditeur et débiteur.

Depuis mai, la Banque asiatique de développement a insufflé près de 8 millions et demi de dollars dans 140 de ces banques pour aider 100 000 personnes à Aceh et Nias.

C'est le cas de Ita, 26 ans, dans le village de Lam Cot, à l'extérieur de la capitale provinciale Banda Aceh, qui a emprunté 500 000 roupies pour faire des biscuits traditionnels «kekarah» avec sa mère Saudah.

Grâce au micro-crédit, «je peux stocker des ingrédients comme le riz, l'huile ou le pétrole domestique pour faire plus de biscuits donc plus de profit», dit la jeune femme qui reçoit même des commandes de Jakarta.