Dans un univers ultra-concurrentiel, comment les sociétés peuvent-elles arriver à croître ? Chaque semaine, des chefs d'entreprise nous présentent leurs stratégies, leurs idées et leurs conseils.

Dans un univers ultra-concurrentiel, comment les sociétés peuvent-elles arriver à croître ? Chaque semaine, des chefs d'entreprise nous présentent leurs stratégies, leurs idées et leurs conseils.

Tous les samedis matin, Jean-François Courville retrouve une centaine de cyclistes prêts à se défoncer.

Beau temps, mauvais temps, 12 mois sur 12, il roule 100 km en trois heures.

À 38 ans seulement, il est quand même l'un des plus âgés du groupe. "J'en bave chaque fois, dit-il. C'est une épreuve presque surhumaine."

Mais c'est le seul sport qui lui permet de faire le vide. De décrocher complètement. "Dans un peloton, tu dois être extrêmement concentré sur ce qui se passe autour de toi, précise-t-il. Si tu touches une roue, tu fais tomber 60 personnes."

Le cyclisme de performance est un travail d'équipe. Chacun doit faire sa part. "Il se créé une symbiose dans le groupe, explique M. Courville. En vélo, tu vois les valeurs et l'éthique des gens."

C'est ce type de synergie que le nouveau président, en poste depuis un mois, entend utiliser pour faire grandir Gestion des placements mondiaux MFC, une filiale de la Financière Manuvie.

Son objectif: créer une vraie entreprise mondiale; pas une société canadienne qui a des bureaux à l'étranger.

"On a déjà 100 milliards sous gestion pour des clients externes, calcule-t-il. D'ici trois ou quatre ans, je ne veux pas juste additionner à ce chiffre-là. Je veux le multiplier par deux ou trois fois."

Manuvie est la deuxième compagnie d'assurances en Amérique du Nord et la cinquième au monde. "Avec un tel appui, Gestion de placements mondiaux MFC pourrait être une des plus grandes histoires à succès qu'on ait vues en gestion de portefeuille", avance-t-il.

Pour y arriver, le jeune dirigeant mise sur le travail d'équipe, sur une relation privilégiée avec ses clients et sur l'expertise de MFC, spécialisée dans la gestion de portefeuilles depuis 1887.

À partir de ses bureaux de Toronto, de Montréal, de Londres, de Hong-Kong et de Tokyo, l'entreprise offre toute la gamme de placements traditionnels et alternatifs aux grands clients institutionnels, de même que des fonds communs pour la clientèle au détail du réseau de la Financière Manuvie.

"On se démarque de la concurrence grâce à nos spécialistes qui ont des idées innovatrices et des compétences exclusives en termes de stratégie d'investissements et d'allocations d'actifs", dit Jean-François Courville.

Parmi ces facteurs de différenciation, l'équipe de gestionnaires a développé une expertise dans l'appariement des actifs et des passifs (pas seulement dans la gestion de l'actif). De plus, elle possède un savoir-faire dans les placements liés aux terres à bois (plus grand gestionnaire au monde), aux produits agricoles, à l'immobilier et au secteur des pétroles et gaz.

"Grâce à nos activités internationales, nous avons une stratégie globale mais une livraison locale de services", explique le président.

En plus de son équipe de 75 personnes, le dirigeant compte également sur la force des 300 gestionnaires professionnels du groupe des placements Manuvie, qui gèrent un total de 240 milliards d'actifs, pour présenter une offre intégrée à ses clients.

LE SECRET DE LA CROISSANCE

"Pour grandir, il n'y a qu'une seule façon de faire: s'investir dans le succès de ses clients, dit Jean-François Courville. C'est seulement quand tes clients réussissent que tu as le droit de faire des profits."

Au bout du compte, ajoute-t-il, la croissance des revenus et des bénéfices est le résultat des efforts consentis par tous. "Mais la véritable stratégie de croissance, c'est d'abord et avant tout la profondeur des relations avec nos clients", dit-il.

Dans le monde financier, on mesure le succès par la gamme de produits vendus et par le niveau de transactions de chaque client. "Notre but est devenir un partenaire stratégique et pas seulement un agent de transactions, explique-t-il. Si on fait partie des premiers appels quand vient le temps d'offrir une solution ou de créer une stratégie pour les aider, on sait que l'on a réussi."

Pour développer ce climat de confiance, souligne M. Courville, il faut être fidèle et constant dans son objectif de livrer ce que l'on a promis. "C'est important de le faire quand les choses vont bien mais ce l'est encore plus quand les choses se compliquent, rappelle-t-il. Quand tu vis des épreuves avec tes clients, tu en ressors plus grand dans la relation après avoir réalisé cette promesse."

Un exemple?

Dans des moments difficiles, comme en septembre 2001, un partenaire financier doit être prêt à assurer la liquidité dans le marché et à acheter des titres quand le nombre de participants s'effrite.

"Ce n'est pas ces jours-là que l'on fait nos profits mais les clients s'en souviennent, dit le président. Dans ces situations, on est comme un ami qui vient te voir à l'hôpital quand tu es malade."

L'entreprise

Gestion de placements mondiaux MFC, qui gère des actifs de 100 milliards pour des clients externes, fait partie des activités d'investissements de la Financière Manuvie.

Don Guloien dirige l'ensemble du groupe, qui emploie 2000 personnes et gère 240 milliards (incluant les placements liés aux primes d'assurances).

Warren Thompson, spécialisé dans les placements alternatifs, est responsable des activités de Gestion de placements mondiaux MFC aux États-Unis.

Jean-François Courville est responsable pour les marchés canadiens, européens et asiatiques.

À retenir

> "J'ai une dépendance humaine. Pour moi, c'est très important de faire le bonheur des gens qui m'entourent. Mon succès, c'est le succès de mon entourage et de mon équipe."

> "Chaque personne est importante dans le tout. Chacun peut faire un bon travail s'il y a un pont entre les ressources de son équipe et les besoins des clients. Mon rôle est de bâtir des ponts."

> "La réussite et la défaite se trouvent dans les moindres petits détails. J'essaie toujours de penser à l'effet d'un geste, d'une parole, d'une idée."

> Valeur importante: l'intégrité. "C'est être transparent. C'est faire ce que tu promets. Et si tu diverges de tes promesses (à la hausse ou à la baisse), tu l'annonces. De cette façon, l'équipe peut s'ajuster."

Recette pour réussir

> Être plus local que nos concurrents globaux et plus global que nos compétiteurs locaux.

> Trouver une façon d'être différents. Offrir un gadget dans l'univers des gadgets c'est intéressant. Mais inventer une nouvelle façon de faire, ou un gadget qui n'existe pas, ça c'est cool!

Bon coup

Laisser des emplois confortables, où je pouvais bénéficier du fruit de mon travail, pour me lancer dans des défis plus importants. Quand on est inconfortable, on cherche toujours à se différencier et à se dépasser.

Pire coup

Confondre pouvoir et influence. Le pouvoir est une façon démodée de gérer. L'important c'est d'accorder une voix à chacun et de s'organiser autour d'une idée commune. Tu peux "influencer" une idée, mais "commander" une idée, ça t'amène peut-être vite mais ça ne t'amène jamais loin.

BiographieJean-François Courville, CFA

> Président et chef de l'exploitation de Gestion de placements mondiaux MFC

> 38 ans

> 1996 à 2007: State Street Canada, différents postes dont président et chef de la direction

> 1991 à 1996: marché des devises, Banque Nationale du Canada, différents postes dont chef du change étranger.