Hydro-Québec devra prouver chaque année au gouvernement fédéral que l’aide financière d’Ottawa à la production d’électricité dont elle bénéficiera réduit réellement la facture d’électricité de ses clients.

C’est la condition imposée par Ottawa aux sociétés d’État provinciales pour avoir accès au crédit d’impôt fédéral de 15 % pour l’investissement dans la production d’électricité propre. Ce crédit d’impôt avait été annoncé dans le budget de l’an dernier et la ministre des Finances, Chrystia Freeland, en a précisé les modalités d’application mardi dernier.

Les sociétés d’État, qui ne paient pas d’impôt fédéral, pourront réclamer l’aide financière fédérale à la condition « qu’elles rendent compte publiquement, chaque année, de la façon dont le crédit d’impôt a allégé les factures des contribuables », indique le budget.

Ottawa veut ainsi s’assurer que son aide financière ne sert pas à augmenter la marge de profit des entreprises bénéficiaires.

Les nouvelles installations de production d’électricité, centrales hydroélectriques ou parcs éoliens, la rénovation d’anciennes installations, de même que les lignes de transport, sont admissibles à l’aide fédérale.

Il y a beaucoup d’argent sur la table : Ottawa estime que le crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre lui coûtera 7,2  milliards d’ici cinq ans et 25 milliards de plus entre 2029-2030 et 2034-2035.

Une manne

Pour Hydro-Québec, l’aide fédérale ne peut pas mieux tomber. La société d’État québécoise vient de se lancer dans un programme d’investissement historique de 185 milliards pour accroître sa production de 9000 mégawatts. La construction de nouvelles centrales, la réfection des centrales existantes et la construction de 5000 kilomètres de nouvelles lignes de transport sont au menu des 10 prochaines années.

Hydro-Québec prévoit aussi des achats massifs d’énergie éolienne au moyen d’appels d’offres auprès de producteurs privés qui ont des partenaires municipaux et communautaires susceptibles de revendiquer leur part de l’aide fédérale.

Pour bénéficier de l’aide fédérale, Hydro-Québec devra rendre des comptes au gouvernement fédéral sur sa gestion, ce qui constituerait une première. Des questions se posent aussi sur la façon dont le calcul sera fait pour se refléter sur la facture d’électricité des Québécois.

Est-ce que ce sont les producteurs privés qui répondent aux appels d’offres ou Hydro-Québec elle-même qui encaisseront le crédit d’impôt fédéral ? Et comment se fera la reddition de compte pour que ce soit clair qu’il réduit la facture d’électricité ?

« Ce crédit d’impôt, peu importe qui va l’avoir, il faut que les tarifs le reflètent », a assuré le ministre de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, en commission parlementaire la semaine dernière.

Interrogé à ce sujet lui aussi, le PDG d’Hydro-Québec s’est contenté de dire que « ce n’est pas un enjeu pour nous ». Du temps qu’il était sous-ministre des Finances à Ottawa, Michael Sabia a participé à la conception de ce crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité verte qui est accessible pour la première fois à des sociétés d’État comme Hydro-Québec.

Mais qui recevra ce crédit d’impôt ? La question reste entière. Les producteurs privés regroupés au sein de l’Association québécoise des producteurs d’énergie renouvelable (AQPER) ne savent pas sur quel pied danser et renvoient la balle à Hydro-Québec, qui n’a pas répondu à nos questions.

« Du côté des promoteurs indépendants, nous nous adapterons aux conditions énoncées par Hydro-Québec dans le cadre d’un appel d’offres », a fait savoir le porte-parole de l’AQPER, Samuel Bergeron.