Après avoir accueilli de nouveaux acteurs pendant des années, le marché aérien canadien s’oriente à nouveau vers une consolidation, ce qui augmente la probabilité de voir des prix plus élevés et une diminution des options de vols.

Depuis mai, les transporteurs à bas prix Swoop et Lynx Air ont mis fin à leurs activités, tandis que WestJet a racheté Sunwing Airlines.

Ces deux derniers représentent à eux seuls 37 % de la capacité en sièges des vols directs vers des destinations soleil, et 72 % en provenance de l’Ouest canadien, selon un rapport du Bureau de la concurrence publié l’automne dernier.

Certains experts préviennent que la diminution du nombre de compagnies aériennes pourrait entraîner une baisse de l’offre de service et une hausse des prix, en particulier dans l’Ouest canadien et dans les petits marchés du pays.

Les loyers élevés des aéroports, les frais de sécurité et les taxes sur le carburant augmentent le coût de base de chaque vol, ce qui complique la tâche pour les transporteurs à bas prix qui cherchent à attirer les voyageurs soucieux de leur budget.

« Les frais élevés rendent certainement le tout plus difficile pour les transporteurs à bas coût », a confirmé le directeur de l’Institut des transports de l’Université du Manitoba, Barry Prentice.

Le fait que le marché soit dominé depuis des années par Air Canada et WestJet peut également étouffer la concurrence, selon certains acteurs de l’industrie.

Air Canada et WestJet représentent 79 % du trafic intérieur ce mois-ci, comparativement à 74 % il y a un an, selon les statistiques de la société de données aéronautiques Cirium.

« Le duopole a l’habitude d’utiliser son pouvoir pour imposer des prix aux petits acteurs », a soutenu le directeur général de Flair Airlines, Stephen Jones.

« Les grandes compagnies aériennes n’ont aucun intérêt à ce que les transporteurs à bas prix réussissent, et elles vont utiliser tous les outils qu’elles peuvent pour pousser des transporteurs comme Lynx au bord du gouffre. »

Fin 2018, le Bureau de la concurrence a ouvert une enquête sur des tactiques de prix d’éviction prétendument déployées par WestJet et Swoop, sa filiale de l’époque, sur certaines liaisons desservies par Flair.

Le régulateur fédéral a mis fin à son enquête environ cinq ans plus tard sans prendre de nouvelles mesures. La décision a été prise malgré le fait que le commissaire par intérim à la concurrence, Matthew Boswell, avait accusé en 2018 WestJet et Swoop de « se livrer à des prix d’éviction en diminuant considérablement le prix de leurs billets passagers à un niveau qui semble inférieur à leurs coûts évitables ».

Nombreux facteurs

Lynx, dont le premier vol a décollé en avril 2022, a fermé le mois dernier. Devant le tribunal, l’entreprise a cité la hausse des coûts, les redevances aéroportuaires et « un paysage aérien compétitif » pour expliquer pourquoi elle a été incapable de générer des revenus suffisants pour poursuivre ses opérations.

D’autres facteurs compliquent le travail des nouvelles entreprises qui cherchent à élargir, plutôt qu’à consolider, le paysage aérien du Canada.

Le manque de grands aéroports secondaires dans les grandes villes peut aussi forcer les petites compagnies aériennes à soumissionner pour les créneaux horaires plus chers des aéroports Pearson de Toronto et Trudeau de Montréal.

Leurs dirigeants se plaignent depuis longtemps des montants facturés pour les frais de porte et d’atterrissage, ainsi que pour des dépenses des agences fédérales telles que les contrôles de sécurité et la navigation aérienne.

Par ailleurs, le problème séculaire d’une vaste zone géographique peu peuplée crée des défis uniques pour tous les transporteurs au Canada, mais particulièrement pour les entreprises qui ont du mal à faire leur place.

Aux États-Unis, certains transporteurs à bas prix en activité depuis longtemps, comme Southwest Airlines et JetBlue, proposent des vols entre certaines grandes villes sur des distances relativement courtes. L’objectif est de générer plus de revenus pour chaque avion en leur faisant faire plusieurs voyages par jour.

Au Canada, toutefois, le nombre de zones urbaines de grande taille est beaucoup plus restreint, et des acteurs majeurs sont déjà présents dans les zones les plus lucratives.