Environ 53 % des Québécois appuient la construction de la méga-usine à 7 milliards de Northvolt en Montérégie, selon un nouveau sondage commandé par un regroupement d’organismes écologistes. Les Québécois sont nettement moins favorables que les habitants des villes avoisinantes qui soutiennent le projet à 72%, selon le dernier sondage Léger.

Ce sont 31 % des quelque 1100 personnes sondées qui se disent « très favorables » au projet, et 22 % « favorables », soit au total 53 %. En revanche, 30 % des répondants sont en désaccord et 17 % sont indécis.

Chez les électeurs caquistes, l’appui global atteint 82 %, alors que chez les libéraux, c’est 52 %. Les péquistes, eux, sont d’accord avec le projet à 58 %, tandis que les solidaires et les conservateurs sont à peine 30 % et 23 % à soutenir le chantier en cours.

C’est la firme Pallas Dalta qui a réalisé l’exercice auprès d’un échantillon aléatoire de 1122 personnes âgées de 18 ans et plus, le 24 février dernier. L’exercice a été fait dans l’ensemble du Québec par l’entremise d’appels faits par réponse vocale interactive, autrement dit par une voix automatisée au téléphone.

Le nouveau sondage survient deux jours après celui de Northvolt, mené par Léger, qui a conclu que 72 % des répondants estimaient que l’usine de cellules de batteries, construite sur un ancien terrain industriel qui chevauche Saint-Basile-le-Grand et McMasterville, était « plutôt un bon projet ». Ce premier sondage avait quant à lui été réalisé auprès de 500 résidants de villes avoisinantes, soit Saint-Basile-le-Grand et McMasterville, Belœil, Mont-Saint-Hilaire, Otterburn Park et Saint-Bruno-de-Montarville.

Huit groupes écologistes sont derrière le deuxième coup de sonde, dont le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), qui conteste toujours le feu vert du gouvernement Legault devant les tribunaux malgré un rejet en Cour supérieure. Équiterre, Eau Secours, la Fondation David Suzuki, Greenpeace Canada, Nature Québec, la SNAP Québec et le Front commun québécois pour une gestion écologique y sont aussi.

Les groupes ont fait valoir mercredi dans un communiqué commun que « près d’un répondant sur cinq affirme être indécis à l’égard du projet ». « Ça nous montre que les gens veulent avoir plus d’informations avant d’avoir une opinion là-dessus. On aurait tous intérêt à consulter davantage le public », affirme l’avocate au CQDE, MCamille Cloutier, qui a participé à l’élaboration dudit sondage.

Un BAPE fait consensus

Peu importe l’allégeance politique, il ressort du coup de sonde que la tenue d’une consultation par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) fait largement consensus. En moyenne, ce sont environ 68 % des répondants sondés qui sont d’accord sur ce point. Dans le sondage de Northvolt, lundi, ce chiffre était très similaire, environ 67 %.

Rappelons que le mécanisme du BAPE oblige notamment le promoteur à présenter une étude d’impact et à répondre aux questions du public. Le Bureau transmet par la suite ses recommandations au gouvernement.

À ce stade-ci, Northvolt n’est pas assujettie à cette procédure, sauf pour la phase « recyclage » de l’usine. L’entreprise bénéficie en effet de la modification d’un règlement par Québec, qui a relevé le plafond d’assujettissement du cadre réglementaire pour des usines de matériaux de batteries.

D’ailleurs, 53 % des Québécois se disent défavorables à la décision du gouvernement de soustraire Northvolt à un examen du BAPE. Chez les caquistes, ce chiffre chute à 22 %, mais il est très fort chez tous les autres électeurs. En moyenne, environ 36 % d’entre eux appuient toutefois Québec à cet égard, et 11 % sont indécis.

« La population réclame une évaluation complète des impacts du projet et il n’est pas trop tard à ce stade-ci pour le faire, même si les travaux sur le terrain sont avancés », affirme MCloutier. « Les institutions auxquelles on fait confiance, il faut qu’elles soient utilisées, elles sont là pour ça », persiste-t-elle.

Dans le communiqué de presse, le regroupement écologiste a ajouté que « la meilleure méthode pour s’assurer de l’adhésion de la population envers les projets proposés par le gouvernement du Québec, c’est de suivre les règles en place ». Les organismes accusent le gouvernement d’avoir par ses actions « entraîn[é] la méfiance envers ses décisions ».

Tout cela survient en contexte de hautes tensions dans ce dossier. Plus tôt, mercredi, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, assurait que le fonctionnaire qui a décrit l’autorisation donnée à Northvolt de détruire des milieux humides comme une « commande gouvernementale » ne connaissait pas le dossier. Il a assuré qu’« aucune pression politique » n’avait été exercée sur les employés responsables du dossier.

Le ministre réagissait ainsi à un reportage de Radio-Canada, qui citait deux messages rédigés par le coordonnateur de l’équipe d’analyse et d’expertise du ministère de l’Environnement pour la région du Bas-Saint-Laurent, Ghislain Côté.

Avec Charles Lecavalier, La Presse