Le service de train qui reliera Québec à Toronto sera « bien plus vite que bien des trains en Europe », promet Martin Imbleau, président-directeur général de la filiale de VIA Rail aux commandes de ce mégaprojet, en entrevue avec La Presse.

En poste depuis le 8 septembre dernier, ce dernier s’engage aussi à « essayer » d’aménager des tronçons où les voitures pourront rouler à plus de 200 km/h et enterrera l’appellation « train à grande fréquence (TGF) ».

L’ex-patron de l’Administration portuaire de Montréal ne s’en cache pas : il souhaite recentrer le discours, qui, à son avis, s’est « malheureusement » cristallisé autour du thème de la fréquence, qui a porté ombrage aux autres facettes du projet.

« C’est trois éléments qu’il nous faut, explique-t-il. Il faut que ça soit plus vite, fiable et qu’il [le train] soit fréquent. La vitesse est nécessaire, mais insuffisante à elle seule. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Le projet de train à grande fréquence doit relier notamment Québec, Montréal et Toronto.

Le projet multimilliardaire – dont l’appel d’offres a été officiellement lancé vendredi dernier – sera rebaptisé. Son nouveau nom sera dévoilé prochainement. Celui de VIA TGF, l’entité aux commandes du développement, demeurera le même.

Parce que le Canada est le seul pays du G7 à ne pas compter sur un train à grande vitesse (TGV) – qui peut rouler jusqu’à 300 km/h –, des voix se sont élevées, notamment au Québec, pour demander au gouvernement Trudeau de considérer cette option. Jugé trop onéreux, ce scénario, qui pourrait coûter jusqu’à 80 milliards, a été écarté par Ottawa.

Ce qui est sur la table n’est pas un prix de consolation, affirme M. Imbleau. Il va même jusqu’à dire que le projet ferroviaire qui reliera Québec, Montréal et Toronto n’aura rien à envier à ce que l’on voit sur le Vieux Continent.

« Je les prends, ces trains-là en Europe, et notre service va être bien plus vite que bien des trains en Europe, lance M. Imbleau. On est habitués au [caractère] bucolique des trains européens, mais on ne le connaît pas ici. »

Porte ouverte

Dans un premier temps, la question de la grande vitesse sera étudiée. Selon le scénario de « référence », les trains circuleront à des vitesses de pointe d’environ 200 km/h sur des voies ferroviaires réservées aux passagers. Le trajet entre la métropole et la Ville Reine serait d’environ 4 h 10 min. Les trois consortiums retenus devront cependant proposer un scénario plus ambitieux dans lequel il sera possible de cibler des tronçons où les voitures pourront aller plus vite.

« Le mandat que l’on a, c’est oui, il y a un scénario de quatre heures [entre Montréal et Toronto], mais aussi un scénario à 3 h 30 min, dit M. Imbleau. Avant de lancer un chiffre précis, on va voir où et comment on peut être plus rapides. Il y a un minimum de 200 km/h, mais on va essayer d’être plus rapides. »

Un « bon comparable » existant à ce qui pourrait voir le jour au Canada ? Le trajet qui relie Paris (France), Bruxelles (Belgique) et Amsterdam (Pays-Bas), selon le patron de VIA TGF. Sur le Vieux Continent, les trains relient Paris et Bruxelles en environ 90 minutes en atteignant des vitesses de quelque 300 km/h. Par la suite, il met environ 2 h 15 min pour effectuer les 200 kilomètres restants vers Amsterdam, un trajet où plusieurs arrêts sont effectués.

En moyenne, les trains roulent à 156 km/h sur l’ensemble du réseau.

L’exemple évoqué par M. Imbleau ne signifie pas que des trains rouleront à 300 km/h au Canada. Il témoigne plutôt de la cohabitation entre des tronçons à haute vitesse et des arrêts plus fréquents sur d’autres tronçons.

Plus qu’un élément

Il n’y a pas que la vitesse des wagons qui permettra de réduire les temps de trajet, martèle le président-directeur général de VIA TGF. On doit aussi pouvoir entrer dans les centres urbains et en sortir le plus rapidement possible.

« Quand vous prenez le train aujourd’hui pour sortir de Montréal, les 15 à 20 premières minutes, elles sont longues, souligne M. Imbleau. Pourquoi ? Vous roulez à basse vitesse parce que sortir de la gare Centrale prend une éternité. Un train qui roule à 250 km/h pendant une demi-heure, ce n’est pas seulement cela qui va sauver du temps. »

Ces réponses viendront dans la phase d’avant-projet qui s’effectuera avec le groupe privé qui sera retenu au terme de l’appel d’offres. À ce stade-ci du processus, le dirigeant de VIA TGF ne veut pas faire de promesses ou s’avancer sur des estimations de coûts et d’échéanciers. Sur ces deux derniers aspects, il y a « 100 % de chances de se tromper » pour l’instant, dit-il.

Des calculs effectués par La Presse estiment qu’un « demi-TGV », avec des segments à haute vitesse sur 60 % du parcours, coûterait 62 milliards. Dans le cas d’un TGF, la facture oscillerait entre 28 et 35 milliards.

En savoir plus
  • 1000 kilomètres
    Longueur du corridor ferroviaire réservé aux trains de passagers du TGF
    source : gouvernement du canada
    160 km/h
    Visite maximale limite à laquelle les trains de VIA Rail peuvent rouler actuellement
    source : via Rail