Les 25 à 44 ans changent d’emploi en moyenne tous les 5,5 ans. Ça n’a pas toujours été ainsi. Mais la dernière génération à avoir consacré sa vie entière à une seule entreprise aura bientôt quitté le marché du travail pour de bon. La Presse a fait le tour du Québec pour rencontrer ces travailleurs qui éprouvent encore du plaisir au boulot.

Luc Martin est opérateur de presse depuis 45 ans à l’Imprimerie Ste-Julie, entreprise spécialisée en conception et fabrication d’étiquettes autocollantes pour les emballages de produits alimentaires et pharmaceutiques.

Rendu au début de la soixantaine, et faisant désormais figure de doyen parmi les 116 employés de l’Imprimerie Ste-Julie, Luc Martin n’a pas pour autant de projet de retraite prochaine.

« Je commence à y penser, mais je ne suis pas du tout pressé. Après toutes ces années, j’apprécie encore beaucoup mon métier et le milieu de travail chez Imprimerie Ste-Julie », confie Luc Martin dans une discussion avec La Presse à l’occasion d’une visite de l’usine située dans le parc industriel de Sainte-Julie, en banlieue de Montréal.

Ce qui me motive aussi à continuer tant que j’en serai capable, c’est que je me sens apprécié comme pressier, tant auprès des dirigeants que parmi mes collègues de travail.

Luc Martin

Aussi, avec l’évolution des technologies de conception et de fabrication d’étiquettes autocollantes dans le marché des emballages commerciaux, Luc Martin apprécie encore les occasions de « relever des défis » liés à la production de « jobs plus compliqués » et à l’apprentissage de « nouvelle machinerie » en impression.

Ces temps-ci, Luc Martin termine une formation d’appoint comme opérateur des nouveaux équipements de fabrication de la plus récente innovation technique en étiquettes d’emballages commerciaux : les étiquettes autocollantes dépourvues de l’habituelle couche de papier ciré protecteur jusqu’à leur pose sur les emballages.

Surnommée « liner-less » dans le jargon de l’imprimerie commerciale, cette innovation permet de réduire la quantité de rebuts dans la chaîne d’emballage ou d’embouteillage de produits alimentaires et pharmaceutiques. Cela représente un élément clé des objectifs en « économie durable » qui font désormais partie des priorités d’affaires à l’Imprimerie Ste-Julie.

« Le secteur de l’imprimerie est présumé en déclin de façon irréversible face aux médias numériques. Or, ce n’est pas du tout ce qui se passe dans le marché des étiquettes et des emballages », souligne Marilène Fournier, coprésidente (avec sa sœur Caroline) de l’Imprimerie Ste-Julie.

Les sœurs Fournier sont les filles du fondateur de l’entreprise, Jean-Maurice Fournier, celui-là même qui avait embauché Luc Martin à 17 ans comme apprenti à son premier atelier d’imprimerie en 1978 !

« Ma sœur et moi n’étions même pas nées lorsque notre père a embauché Luc Martin. Même qu’à ses débuts, il dormait au sous-sol de la maison de nos parents entre ses journées de travail », relate Marilène Fournier sur un ton blagueur lors de la discussion avec La Presse.

Depuis qu’elle a pris la relève de son père en compagnie de sa sœur en 2018, Marilène Fournier ne tarit pas d’éloges envers son vétéran pressier et son frère cadet, Jacques, également pressier, mais depuis « seulement » 35 ans, à l’Imprimerie Ste-Julie.

« J’ai grandi avec eux dans l’entreprise dirigée par mon père. J’ai toujours apprécié la qualité de leur travail, ainsi que leur générosité en conseils envers leurs collègues, indique Marilène Fournier.

« Et depuis que ma sœur et moi avons pris la relève de notre père à la direction de l’Imprimerie Ste-Julie, c’est rassurant en arrivant au travail de savoir que Luc et son frère Jacques sont présents avec leur expérience et leur débrouillardise pour guider nos activités de production. »

D’hier à aujourd’hui

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Les frères Luc (à droite) et Jacques Martin sont opérateurs de presse depuis 45 et 35 ans, respectivement, à l’Imprimerie Ste-Julie, spécialisée en étiquettes autocollantes pour les emballages commerciaux en alimentation et en pharmaceutique.

« Avant l’arrivée des presses plus automatisées, durant mes 20 premières années chez Imprimerie Ste-Julie, il fallait beaucoup de temps de préparation et d’ajustement avant de produire chaque job d’étiquettes, explique Luc Martin

« Mais depuis l’arrivée des machines à contrôle numérique, au tournant des années 2000, nous avons réduit considérablement notre temps de set-up entre les jobs, tout en pouvant produire des étiquettes de plus en plus complexes et spécifiques. »

Luc Martin

Âge : 62 ans

Métier : opérateur de presse de fabrication d’étiquettes autocollantes pour les emballages commerciaux en alimentation et en pharmaceutique

Employeur : Imprimerie Ste-Julie

Ancienneté : 45 ans

Lieu d’emploi : parc industriel de Sainte-Julie