Que se passerait-il si la négociation pouvait dépasser les luttes de pouvoir ? Dans son plus récent livre intitulé Split the Pie, Barry Nalebuff, professeur à la Yale School of Management, présente une nouvelle approche fondée sur des principes d’équité. Et si on reconsidérait tout simplement la valeur du « gâteau » qu’on aimerait partager avec les autres ?

Pourquoi négocier sa part du gâteau devrait-il être nécessairement un tour de force ? Après tout, il suffirait de traiter équitablement toutes les parties présentes à la table des négociations pour mieux distribuer le pouvoir. C’est justement la solution proposée par l’auteur : reconsidérer la valeur de ce qui est réellement en jeu pour sortir des luttes de domination. Études de cas à l’appui, l’auteur, qui a vendu son entreprise Honest Tea à Coca-Cola en 2008, enseigne comment se concentrer sur la vraie valeur du « gâteau » à diviser.

Le véritable enjeu

Argent, occasions, relations, réputations : plus les intérêts en jeu sont importants, plus la négociation peut devenir stressante. « La négociation peut faire ressortir le pire chez les gens, alors qu’ils essaient de profiter de la situation ou simplement d’imiter naïvement les négociateurs féroces dont ils ont entendu parler. » Première erreur de négociation : se concentrer sur le montant total du gâteau au lieu du gain qu’on pourrait faire si on travaillait ensemble. « La partie la plus difficile de la négociation est de mesurer correctement le gâteau », souligne l’auteur, qui incite ainsi à se concentrer sur la valeur ajoutée qui serait créée à la suite d’un accord. À retenir : la meilleure négociation n’est pas celle qui vise à obtenir la plus grosse part du gâteau, mais celle qui débouche sur une association donnant accès à un « plus gros » gâteau, de façon à tirer le meilleur profit de cette alliance.

Une solution talmudique

Lors d’une négociation, certaines personnes utiliseront des arguments fondés sur le pouvoir. « Une des parties pourrait ainsi dire qu’elle a “droit” à une part plus importante parce qu’elle est plus grande, parce qu’elle apporte plus à la table, parce qu’elle peut s’en aller plus facilement, parce qu’elle a plus d’options, et ainsi de suite. » Résultat ? On aura alors le réflexe de diviser le gâteau proportionnellement en fonction de la taille des parties impliquées (unités, revenus, bénéfices, dollars investis). C’est là une autre erreur : il faudrait plutôt calculer la part de chacune des parties selon sa contribution. Sur la question du partage, l’auteur introduit alors l’approche du Talmud – vieille de 2000 ans – comme une méthode équitable, distincte de l’option de division proportionnelle. La solution du Talmud consiste à accorder à chaque partie ce qui lui a été concédé par l’autre et à partager ce qui reste en parts égales entre les parties.

La force de l’empathie

Négociation rime souvent avec émotions. Heureusement, la logique permet de calmer les ardeurs. Néanmoins, « il est tout à fait rationnel de se montrer empathique », plaide l’auteur. La force de l’empathie est de sortir de l’égocentrisme pour mieux comprendre les objectifs de l’autre partie. « Si vous pouvez combiner logique et empathie, vous aurez le meilleur de M. Spock et du capitaine Kirk. » En pratique, on peut faire preuve d’empathie en montrant que l’on comprend la position de l’autre. De quoi commencer à s’entendre avant même de trouver un accord !

* Cet article est publié grâce à un partenariat avec le magazine Gestion HEC Montréal, où il est d’abord paru.

Split the Pie : A Radical New Way to Negotiate

Split the Pie : A Radical New Way to Negotiate

Harper Business

304 pages