« J’ai l’impression que ça ne sera jamais assez ! Jusqu’où vais-je devoir aller ? »

Je sentais le désarroi dans la voix de mon client au bout du fil. Je venais d’annoncer ma décision d’implanter la semaine de quatre jours pour mes employées. Je dirige une entreprise spécialisée en ressources humaines et c’est probablement la raison pour laquelle mon annonce a suscité autant de réactions. J’ai eu droit à des éloges, mais aussi à des commentaires d’entrepreneurs inquiets de mon initiative.

Qu’on se le dise : la semaine de quatre jours n’est pas une « saveur du mois », si l’on se fie à une récente étude réalisée en Royaume-Uni et rapportée par La Presse le 26 septembre dernier. La plupart des 73 entreprises qui participaient au projet pilote avec la semaine de quatre jours ont déclaré n’avoir constaté aucune perte de productivité avec leurs employés. Plusieurs ont même observé une amélioration significative de leur rendement.

La grande question : est-ce que la semaine de 4 jours est véritablement LA solution pour garder nos employés, les motiver et accroître la productivité de nos entreprises au Québec ? Plusieurs entrepreneurs restent perplexes. La semaine de quatre jours amplifie-t-elle le phénomène des employés-rois ? Doit-on vraiment revoir nos façons de faire pour des employés qui magasinent leurs emplois ?

Je comprends l’inquiétude des employeurs. Nous sommes dans une société qui valorise beaucoup le bien-être individuel et l’équilibre travail-famille-loisirs-Netflix. Une société qui encourage les employés à demander et surtout à exiger plus.

La vérité, c’est qu’à force de toujours privilégier les employés, nous avons tendance à oublier les entrepreneurs et les gestionnaires qui tiennent les entreprises à bout de bras.

Parce que ces femmes et ces hommes ne se permettent pas un quatre jours par semaine, même s’ils l’accordent à leurs employés ! Je parle en connaissance de cause : rien n’a changé dans mon horaire, même si mes employées se reposent trois jours sur sept.

Soyons lucides : le rôle de l’entrepreneur n’a jamais été aussi difficile et c’est la source des inquiétudes avec la semaine de quatre jours. La pandémie, l’inflation, les pénuries de main-d’œuvre et de matières premières rajoutent une pression insoutenable sur les épaules déjà bien chargées des entrepreneurs, à un tel point que plusieurs envisagent même de tout abandonner.

Cela dit, les employeurs qui réfléchissent à la semaine de quatre jours doivent la considérer comme une tactique dans leur artillerie RH. Chaque cas est unique. Chaque entreprise vit ses propres réalités. Chaque noyau d’employés possède sa propre dynamique.

C’est beaucoup plus facile d’implanter la semaine de quatre jours dans un cabinet comptable que sur un chantier de construction à Montréal ou dans une usine manufacturière en Beauce. Non, ce n’est pas LA solution miracle. Qu’on se le dise : la semaine de 4 jours est UNE option parmi tant d’autres pour motiver les employés et pour assurer leur rétention.

Aux entrepreneurs, voici mon message : le débat sur la semaine de quatre jours devrait être un appel à votre créativité. Pouvez-vous être créatif pour mieux prendre soin de vos employés ? Quel avantage pourriez-vous leur offrir qui ferait une réelle différence pour leur motivation, pour leur productivité et pour votre propre bien-être ? Quelle initiative vous permettrait, vous, de mieux respirer ?

Soyons à l’écoute de ceux qui créent la richesse au Québec. C’est à nous tous, et j’inclus leurs employés, de ne jamais oublier les entrepreneurs. Parce que ça prend des entreprises en santé pour que des employés puissent profiter de la semaine de quatre jours.