Monique Bessette connaît bien l’impact de la hausse des prix de l’alimentaire. Depuis la pandémie, cette bénévole de l’Association bénévole de Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est arpente les rayons des supermarchés pour aider les 167 prestataires du programme d’aide à l’épicerie mis en place par l’organisme. « Tout est plus cher et nos bénéficiaires le voient sur leur facture », raconte la bénévole sur le chemin du supermarché.

Les listes de courses que Monique Bessette imprime contiennent 20 produits en moyenne, tous repérés par ses clients sur des circulaires de promotion. Certains mots ne figurent plus sur les pages imprimées par la bénévole. « On achète très rarement des steaks. C’est arrivé une fois qu’une personne se le permette », raconte-t-elle.

Les pièces de bœuf font partie des produits dont le prix a le plus augmenté. Alors que le kilogramme de bifteck était à 17,17 $ en 2017, il coûte en moyenne 25,44 $ en 2022. Les produits que préfèrent les prestataires du programme, les côtes de porc et le poisson, accusent la même augmentation. Alors que le kilogramme de côtes de porc était à 8,35 $ en 2017, il coûte 12,25 $ en 2022.

Globalement, les prix des produits alimentaires ont fortement augmenté depuis cinq ans et plus fortement encore ces derniers mois. Selon un panier d’épicerie réalisé par La Presse à partir des données de Statistique Canada, le coût de 25 aliments de base au Québec est passé de 112,36 $ en 2017 à 143,09 $ en 2022, soit une augmentation de 27 %.

Sur la liste de Monique, d’autres produits ont connu une hausse de prix considérable. En 2017, le kilogramme de tomates coûtait 4,17 $ alors qu’il coûte 4,87 $ en 2022. Même constat pour le fromage avec une augmentation de 13,8 % du bloc de 500 g. Dans son Rapport sur le coût du panier provisions nutritif et économique, le Dispensaire diététique de Montréal chiffre aussi l’augmentation : le coût minimal annuel d’une épicerie pour nourrir une famille de quatre personnes est passé de 11 286 $ en 2021 à 12 987 $ en 2022.

Cette hausse significative est le résultat de plusieurs phénomènes survenus simultanément, explique Sylvain Charlebois, directeur principal du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie. « Il y a une séquence de différents facteurs macroéconomiques dont font partie les changements climatiques, la guerre en Ukraine et des problèmes dans les chaînes d’approvisionnement, par exemple. Tout cela fait en sorte que l’inflation alimentaire augmente depuis des mois et surpasse le taux d’inflation générale. »

Petit budget pour petit bilan nutritif

En bas de la liste de Monique Bessette, il est noté « repas surgelés ». Il y en a de toutes sortes. La bénévole en montre certains du doigt en affirmant : « Ceux-là sont bons, encore assez équilibrés. » Puis, elle se dirige vers les plats en promotion. « Les moins chers ne sont pas très nutritifs, par contre. » Ce ne sont que des plats de pâtes ou de riz, bolognaise, coquillettes au fromage… 47 % de l’apport en sodium recommandé par jour pour un plat de 280 g. Mais pour ces trois barquettes, la prestataire paiera 4 $.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Les listes de courses que Monique Bessette imprime contiennent 20 produits en moyenne, tous repérés par ses clients sur des circulaires de promotion.

« La part de budget que l’on met dans l’alimentation est plus flexible que d’autres, comme le loyer ou les transports. En réduisant le budget alimentation, nos choix sont de moins bonne qualité nutritive. Les aliments transformés sont plus économiques, par exemple », explique Marie Ève Labonté, professeure agrégée de l’Université Laval et membre de l’Observatoire de la qualité de l’offre alimentaire.

Une fois à la caisse, Monique remplit un sac et demi d’aliments avec un budget de 44 $. Il y a 18 articles, pas un de plus. À tous les coups, la bénévole s’est dirigée vers les produits en promotion. Résultat : 26 $ d’économie, selon l’épicerie. Mais le bilan reste lourd et l’est de plus en plus.

Des solutions pour les consommateurs

En effet, les solutions sont rares et doivent souvent venir des consommateurs. Comme le font les membres de l’Association bénévole de Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est, l’une d’elles consiste à chasser les bonnes affaires. « Il y a toutes sortes de choses que les personnes peuvent faire. On peut vérifier les prix avant d’aller en épicerie. Le marché est très virtuel aujourd’hui », conseille Sylvain Charlebois.

« Des produits à prix réduit sont vendus dans les supermarchés, car ils sont près de la date de péremption. C’est une manière intéressante de réduire la facture d’épicerie. On peut aussi se passer de la viande dans certains plats en la remplaçant par des protéines d’origine végétale peu dispendieuses », ajoute Marie-Ève Labonté.

En dehors de ces initiatives, la patience est le mot d’ordre. « On s’attend à une baisse, mais pas tout de suite. Ça va prendre quelque temps. Le dollar peut nous jouer des tours, l’essence aussi, mais on espère que les choses vont se replacer dans les prochains mois », explique Sylvain Charlebois.

Consultez le site web de l’Association bénévole de Pointe-aux-Trembles et Montréal-Est