(Calgary) Un an après que les prix du pétrole se soient tellement effondrés pour se retrouver en territoire négatif, les entreprises ayant des activités dans les sables bitumineux du Canada ont repris du poil de la bête grâce à une reprise spectaculaire de la demande mondiale.

Le 20 avril 2020, le prix de référence américain West Texas Intermediate (WTI) avait dégringolé de 55,90 $ US à un niveau sans précédent de (-) 37,63 $ le baril.

Ce prix négatif était attribuable à un mélange de facteurs technique du marché des produits de base et des inquiétudes provoquées par l’offre excédentaire. Les réserves d’entreposage étaient presque pleines tandis que la demande était en chute libre. Sans compter la courte guerre des prix entre l’Arabie saoudite et la Russie, résume un analyste principal des matières premières, Martin King de RBN Energy.

« Tout le monde était pessimiste, très pessimiste au sujet de la demande en pétrole », rappelle-t-il.

Mais la stabilisation rapide des cours indique à quel point ce secteur peut être résilient. « Le marché a fini par s’équilibrer. Nous avons eu une reprise qui a sorti le secteur des profondeurs de l’enfer. Ce n’est pas encore le paradis, mais c’est sûrement une reprise à très grande échelle. »

Il ajoute que l’offre et la demande ont retrouvé un meilleur équilibre. « Avec la reprise de la demande, nous voyons les réserves mondiales descendre à des niveaux plus normaux. »

Vendredi, le prix du WTI a remonté à 61,19 $ le baril. À ce prix, la production pétrolière est redevenue rentable en Amérique du Nord, y compris dans les sables bitumineux de l’Alberta, dit M. King.

Depuis le début du deuxième trimestre, l’indice du WTI s’établit en moyenne à 60,46 $, comparativement à 58,13 $ au trimestre précédent. Ces deux données sont supérieures, et de beaucoup, à la moyenne enregistrée au deuxième trimestre de 2020 : 27,95 $.

L’Agence internationale de l’énergie a revu à la hausse son estimation de la demande mondiale de pétrole pour 2021. Selon elle, certains signes démontrent que l’économie mondiale se rétablit plus rapidement que prévu, en particulier aux États-Unis et en Chine.

Elle s’attend désormais à ce que la demande mondiale augmente de 5,7 millions de barils par jour en 2021 pour atteindre 96,7 millions.

Des attentes élevées

Les attentes sont élevées pour les résultats du premier trimestre du secteur pétrolier canadien, disent plusieurs analystes.

La Financière Banque Nationale croit que le secteur est maintenant mieux positionné. Elle souligne que la crise a contraint les entreprises à reconsidérer leurs habitudes de dépenses en capital, leurs politiques de dividendes, les acquisitions et cessions, la gestion des coûts de trésorerie et les pratiques opérationnelles. Combiné à un contexte macroéconomique bien amélioré, le secteur se trouve dans une position enviable pour maintenir des flux de trésorerie significatifs, indique-t-elle.

Un analyste de la RBC, Michael Harvey, dit s’attendre à ce que le flux de trésorerie par action du premier trimestre augmentera de 39 % pour les producteurs pétroliers et de 45 % pour les producteurs gaziers d’un trimestre à l’autre grâce à la forte vigueur des prix des produits de base.

Selon les analystes de la CIBC, la fin du programme de quotas de brut obligatoire de l’Alberta en décembre permettra aux producteurs des sables bitumineux d’afficher une « augmentation significative » de leur production au premier trimestre.

L’ensemble des analystes s’attendent à ce que les stocks de liquidités soient utilisés pour la réduction de la dette et pour le redressement des bilans plutôt qu’à servir aux dépenses en capital.

Cela correspond au message présenté par Alex Pourbaix, le PDG de la société Cenovus Energy. Celui-ci a déclaré plus tôt ce mois-ci que les revenus générés par des prix plus élevés serviront à rembourser sa dette à la suite de l’achat de 3,8 milliards de Husky Energy

« Nous allons essentiellement verser la totalité de notre trésorerie disponible pour redresser notre bilan jusqu’à ce que nous atteignions 10 milliards [en dette nette], mais j’aimerais finalement baisser encore plus considérablement, quelque chose de l’ordre de 8 milliards, avait-il dit lors d’un symposium d’investisseurs. Nous commencerons ensuite à envisager de restituer des liquidités aux actionnaires ou peut-être une croissance modeste. »