Vaut-il mieux être grand ou petit ? À écouter vos concurrents, ils posséderaient tous la taille optimale, au point d’avoir un avantage compétitif. La réalité est que des entreprises de différentes tailles ont des performances exemplaires sur de longues périodes. D’où la question : quelle est l’importance réelle de la taille d’une entreprise ?

J’accorde d’emblée des avantages aux entreprises de grande taille. Parmi les entreprises ayant connu des résultats financiers bien en deçà des attentes sur une longue période, les marchés financiers, à tort ou à raison, sont généralement plus tolérants envers les grandes organisations, ce qui leur confère un meilleur accès aux capitaux.

PHOTO MATHIEU BÉLANGER, ARCHIVES LA PRESSE

Yvon Charest

Leur verre serait à moitié plein : la mauvaise passe est derrière elles, un nouveau PDG va réaliser une transformation, etc. Alors que pour les plus petites organisations, c’est l’inverse, le verre est à moitié vide : la fin est proche, les plus grands vont rebondir, etc.

Les grands ont aussi l’avantage de pouvoir choisir les occasions de développement parmi un large éventail de produits et de secteurs géographiques. Ils peuvent aisément diminuer, voire fermer la vente de certains produits, sachant qu’ils pourront plus que compenser avec des produits dont la croissance et le retour sur les capitaux sont nettement supérieurs. Tous rêvent de pouvoir ainsi ouvrir et fermer des robinets de capitaux et de talents !

L’importance de la culture

La grande taille d’une organisation doit cependant affronter un obstacle majeur, soit une culture mal diffusée à travers l’organisation. La culture d’une organisation est si importante que l’on dit Culture eats strategy for breakfast (« La culture avale la stratégie au déjeuner »).

Toutes les organisations aspirent à développer quelques principes d’action largement diffusés, acceptés et pleinement utilisés qui donnent une cohérence d’action, un message unique aux clients, bref, une exécution supérieure.

Le développement et le déploiement d’une culture sont beaucoup plus faciles pour les entreprises de plus petite taille, au point qu’ils ne font même pas partie de l’ordre du jour des plus petites entreprises.

Toute culture prend sa source dans les comportements de quelques dirigeants. Au fil du temps, il devient nécessaire de décrire, de répéter et de valoriser le « comment » on sert un client, on aborde un problème et on améliore une activité. C’est difficile pour une grande organisation d’obtenir du succès à ce chapitre dans l’ensemble de ses activités.

Les entreprises de taille plus modeste peuvent tirer avantage de leur culture dans la guerre des talents. La loyauté des employés est l’élément clé dans cette guerre, et cette loyauté se manifeste quand un employé sent que l’on s’occupe de son développement, qu’il croit qu’à moyen terme, ses aspirations en matière de travail, de responsabilités et de rémunération pourront être comblées.

Développer le talent passe par la mobilité dans l’organisation et le feedback franc. Cette activité doit avoir la même priorité que réaliser des résultats financiers solides. Ces grands principes doivent être soutenus par une culture dans laquelle il est valorisé de rendre les bonnes ressources disponibles aux autres secteurs et où les discussions sur la performance vont bien au-delà de bulletins incolores et sans saveur.

Une culture solidement implantée peut aussi être déterminante au chapitre de la structure de coûts. Quel dirigeant ne rêve pas que chaque employé gère les dépenses de l’organisation comme si l’argent venait de son portefeuille ?

Quel dirigeant ne rêve pas que tous les employés acceptent qu’il y ait des dépenses prioritaires, des coupes nécessaires et que les décisions doivent faire abstraction du confort de chacun ?

Les grandes organisations vivent à la fois avec le potentiel d’une meilleure structure de coûts et le danger bien réel de recevoir une panoplie de projets à incorporer au prochain budget. La discipline est plus difficile quand l’organisation est riche et que nos collègues ont plein de bonnes idées… pour faire croître leur propre secteur. Bref, les grandes organisations gagnent en théorie, mais perdent dans le temps au chapitre des coûts et doivent s’ajuster par des réorganisations qui effritent la loyauté des employés, ce qui nuit à la gestion des talents.

Il reste un dernier enjeu : les marques de commerce.

Les organisations aux compétences supérieures en matière de stratégies et de vision, quelle que soit leur taille, seront les grandes gagnantes en matière de marque de commerce. C’est une question de compréhension des tendances profondes, du potentiel des nouvelles technologies et de l’exécution d’une expérience client supérieure.

C’est rassurant de savoir que la stratégie est plus importante que la taille.

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