Les gens d’affaires appuient sans réserve la transition vers une économie verte. Les entreprises canadiennes investissent déjà des sommes colossales en recherche et en innovation depuis quelques années afin de réduire leur empreinte environnementale.

Mais cette transition nécessaire doit être faite de manière « responsable » et sans alourdir indûment le fardeau financier des citoyens, soutient-on. Car sans le concours des consommateurs, la lutte contre les changements climatiques sera difficilement couronnée de succès.

Tandis que la COP26 se poursuit à Glasgow, le Conseil canadien des affaires (CCA) a tenu vendredi à ajouter sa perspective quant à la feuille de route dont doivent se doter le gouvernement fédéral et les provinces pour atteindre les objectifs du Canada en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

« Nous avons soutenu l’idée d’un prix sur le carbone dès 2008. Les entreprises et le milieu des affaires croient depuis longtemps que nous avons un rôle de leadership important dans ce dossier. Les gouvernements à travers la planète font toutes sortes d’annonces, prennent toutes sortes d’engagements et fixent toutes sortes de cibles. Mais le gros du travail pour y arriver repose sur les épaules de ceux qui innovent et qui assemblent des capitaux », a soutenu vendredi le président et chef de la direction du CCA, Goldy Hyder.

M. Hyder a rassemblé virtuellement des représentants des principaux secteurs de l’économie – pétrole et gaz, agriculture, aluminium, automobile, entre autres – afin de souligner les progrès qui ont été faits jusqu’ici et les ingrédients essentiels pour que l’on atteigne les objectifs de réduction des émissions et la carboneutralité d’ici 2050.

« C’est une chose de voir les gouvernements et les entreprises accélérer la cadence. Mais comme on peut le voir en Europe où sévit une crise de l’énergie et dans d’autres pays, tout cela va avoir un impact important sur la population », a souligné M. Hyder.

La transition va prendre du temps et va nécessiter des investissements substantiels. Il faut être honnête avec la population. Il faut aussi s’assurer que les gens peuvent se le payer.

Goldy Hyder, président et chef de la direction du Conseil canadien des affaires

L’arrivée massive sur le marché de véhicules électriques est un exemple concret, selon David Paterson, vice-président aux affaires générales et environnementales de GM Canada.

Le géant de l’automobile compte investir 35 milliards de dollars pour transformer sa chaîne de production afin de construire uniquement des véhicules sans émissions d’ici 2035.

Il s’agit de la plus grande période de transformation pour le secteur automobile depuis que nous avons abandonné les chevaux comme moyen de transport. C’est une période excitante. Nous prévoyons avoir une production carboneutre en 2040.

David Paterson, vice-président aux affaires générales et environnementales de GM Canada

L’entreprise prévoit mettre en marché de 20 à 30 nouveaux modèles de véhicules électriques d’ici trois ans. Des usines d’assemblage sont adaptées pour en faciliter la production.

« Nous misons sur l’électrification. Nous effectuons des investissements colossaux dans les technologies pour les batteries. C’est la clé du succès pour notre secteur. Il faut arriver à produire des batteries qui coûtent moins cher et qui permettent une grande autonomie pour les consommateurs. Et les consommateurs vont déterminer si cela va être un succès ou un échec », a-t-il dit.

Relever les incitatifs

Pour que les consommateurs soient au rendez-vous, il faut que les prix soient concurrentiels. Mais avant d’en arriver là, les gouvernements devront rehausser les incitatifs financiers. Le prix d’un véhicule électrique est en général supérieur de 10 000 $ à celui d’un véhicule à moteur à essence.

Aux États-Unis, le Congrès s’apprête à adopter un plan de relance de 2000 milliards qui inclura notamment des incitatifs financiers pour l’achat de véhicules électriques. Les consommateurs américains se verront offrir 12 500 $ US s’ils optent pour un véhicule électrique.

Au Canada, les incitatifs sont insuffisants pour accélérer la transition, selon M. Paterson. Le gouvernement fédéral offre un crédit de 5000 $. Le Québec est l’une des rares provinces à offrir aussi un incitatif de 8000 $. En Ontario, le gouvernement Ford a mis fin au programme visant à encourager l’achat d’un véhicule sans émissions. Selon M. Paterson, il faudrait que les incitatifs financiers frisent les 15 000 $ au Canada.

« Nous devons aider les consommateurs à faire la transition », a-t-il fait valoir, ajoutant qu’il faut aussi faciliter l’accès à des bornes de recharge.

Selon John Stackhouse, premier vice-président, bureau du chef de la direction chez RBC, les investissements requis par le secteur privé pour que le Canada respecte son objectif d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050 seront colossaux : 2000 milliards de dollars, selon un rapport publié par l’institution bancaire la semaine dernière. « C’est une somme considérable. Cela représente de 60 à 80 milliards de dollars par année. » Selon lui, le secteur privé est prêt à se mettre à la tâche. Mais les gouvernements doivent absolument se doter d’une feuille de route précise pour favoriser ces investissements.