Pour maintenir le logement abordable, les principaux candidats à la mairie de Montréal s’entendent pour augmenter l’offre de logements. Peu a été dit sur la façon d’y parvenir et encore moins sur l’ampleur de la facture pour y arriver.

Denis Coderre annonce 50 000 logements en quatre ans. La mairesse sortante, Valérie Plante, promet pour sa part 60 000 logements abordables.

Pour donner une idée de l’ampleur du défi auquel les partis municipaux nous convient, il s’est construit en moyenne 7400 logements par année à Montréal, de 2015 à 2019. Pour ce qui est des logements abordables et sociaux, un total de 7000 logements ont été livrés en quatre ans, selon une recension faite par notre collègue Mario Girard.

« Si on s’entend pour dire qu’il manque 40 000 logements à Montréal, il faut de nos jours compter sur un coût de 250 000 $ par logement de 100 mètres carrés incluant le terrain, explique au téléphone Serge Goulet, président de Devimco. Selon ces paramètres, construire 40 000 logements coûtera 10 milliards, calcule-t-il. La Ville n’a pas les moyens de payer la facture toute seule. Le privé est capable avec ses ressources de pallier le problème collectif de la crise du logement. Mais personne ne s’adresse à nous. On est tenus à l’écart de cette discussion », déplore-t-il.

Ne pas voir le privé « comme un problème »

Mardi, Devimco s’est joint au Groupe Mach de Vincent Chiara, le promoteur qui construit le Quartier des lumières sur les terrains de Radio-Canada, pour demander qu’on accorde une plus grande place à l’entreprise privée pour la croissance de Montréal.

« Il faut cesser de voir le secteur privé comme un problème », écrivent MM. Chiara et Goulet dans un communiqué paru au lendemain du débat économique de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain entre les deux principaux candidats à la mairie.

« On constate qu’au fil des ans, au lieu que les relations gagnent en agilité, il s’est construit une muraille entre le public et le privé, poursuit M. Goulet, au téléphone. Alors qu’on aurait dû travailler de façon inclusive et transparente, on a plutôt choisi l’opacité. Comme si c’était dangereux d’asseoir le public et le privé ensemble. »

C’est dommage parce que l’on se prive, de part et d’autre, de nos compétences respectives et, au final, ce n’est pas gagnant pour la population qui a besoin de se trouver un appartement ou de devenir propriétaire.

Serge Goulet, président de Devimco

Les deux hommes d’affaires reprochent notamment à la Ville de Montréal le peu de place qu’elle réserve au secteur privé dans les structures de concertation ad hoc mises sur pied dans le cadre du mécanisme d’approbation des projets.

Ils ont cité par exemple les ateliers de concertation citoyenne organisés par l’Institut du Nouveau Monde dans le but d’aider la Ville à définir sa vision pour le secteur du bassin Peel, au sud-ouest du centre-ville.

Les promoteurs immobiliers ont dû jouer des coudes pour pouvoir y participer. La Ville avait même oublié d’inviter Stephen Bronfman à participer aux trois premiers ateliers. Son groupe veut construire dans le quartier un stade de baseball pour le retour éventuel d’une équipe des ligues majeures. M. Bronfman n’a pas été invité non plus, dans un premier temps du moins, à siéger à la table de concertation en aval des ateliers.

Lisez l’article « Pas de place pour Bronfman et Devimco à la table de concertation »

« Ces ateliers et ces tables de concertation, qui sont mis sur pied avant et après le processus de l’Office de consultation publique, doivent être mieux structurés et balisés, suggère aujourd’hui le président de Devimco. Il faut bien définir les acteurs présents, il faut se donner un échéancier, il faut prévoir une reddition de comptes pour qu’on puisse faire rapport au grand public. Il doit aussi y avoir une rétroaction de la part de la Ville. »

MM. Goulet et Chiara insistent pour dire que leur sortie publique ne vise pas à faire le procès de l’actuelle équipe au pouvoir à l’hôtel de ville. « Le fossé qui s’est créé entre le public et le privé ne date pas de quatre ans, soyons honnêtes, dit M. Goulet. Nous intervenons de façon constructive comme des gens d’affaires pour résoudre un problème qui a cours depuis longtemps. » Les deux promoteurs se disent prêts à travailler avec la nouvelle administration au lendemain des élections, quelle qu’elle soit.